NASHVILLE - Pekka Rinne et Matt Murray prouvent avec éloquence qu’il est difficile, voire impossible, de gagner une finale de la coupe Stanley sans les arrêts importants d’un gardien au sommet de sa forme.

Très ordinaire à Pittsburgh lors des deux premiers matchs, Rinne a accordé huit buts sur seulement 36 tirs (77% d’efficacité) alors que Murray a concédé quatre buts seulement sur les 64 tirs des Preds (93,7 % d’efficacité). Bien qu’ils aient globalement mieux joué que les Penguins lors de ces deux premières rencontres, les Predators ont encaissé deux revers.

À Nashville, Rinne a stoppé 50 des 52 tirs des Penguins (96,1 % d’efficacité) éclipsant facilement son jeune vis-à-vis qui a été victime de huit buts sur 58 tirs (86,2 % d’efficacité). Sans surprise, les Predators l’ont emporté.

Bon! Il est impossible d’imputer à Murray toute la responsabilité des deux revers. Mais il est toutefois facile de conclure que Murray a donné de meilleures chances de gagner à son équipe que Rinne lors des deux premières rencontres alors que les rôles ont été complètement inversés dans les matchs 3 et 4.

Après deux premières rencontres difficiles, Rinne a donné raison à son entraîneur-chef Peter Laviolette de maintenir sa pleine et entière confiance à son endroit. De fait, Laviolette a indiqué n’avoir jamais même songé à remplacer son as gardien pour le match trois.

On peut s’attendre à une réaction similaire de la part de Mike Sullivan à l’endroit de Murray qui, malgré tout ce que Marc-André Fleury a accompli en relève lors des deux premières rondes, demeure son gardien de confiance. Lors de la conférence téléphonique tenue par les Penguins mardi après-midi, l’entraîneur-chef a d’ailleurs insisté sur le fait que les performances de son gardien n’étaient pas en cause dans les deux défaites encaissées à Nashville.

Sullivan a aussi balayé du revers de la main un éventuel retour au jeu de Kristopher Letang en finale. «Il n’y a aucune chance de le voir en uniforme», a-t-il insisté.

Gros centre? Défensive imperméable?

Si la grande finale confirme l’importance de la tenue des gardiens, elle fait mentir deux autres grands principes du hockey. Deux principes selon lesquels il est impossible de gagner sans une défensive de premier plan et/ou sans un premier centre capable de catalyser l’offensive de son club.

Privés de Ryan Johansen – opération à la cuisse –, qui est, et de loin, leur meilleur joueur de centre, les Predators sont à deux victoires de la coupe Stanley.

Privés de Kristopher Letang – opération à la nuque – qui est, et de très loin, leur meilleur défenseur, les Penguins de Pittsburgh sont eux aussi à deux victoires des grands honneurs.

Comment des équipes qui reposent sur une attaque aussi anonyme que celles de «Preds» ou sur une défensive aussi poreuse que celle des Penguins peuvent être à quelques coups de patin du trophée le plus difficile à gagner de tous les sports professionnels?

«C’est tout à l’honneur de notre système de développement, des jeunes qui se sont greffés au club et du fait que nous formons une équipe avec tout ce que cela veut dire», a lancé le gardien Pekka Rinne au lendemain de sa deuxième victoire en finale.

«Peu importe l’identité des joueurs en uniformes, nous jouons de la même façon avec la même intensité. Le concept d’équipe est respecté par tous les joueurs», avait d’ailleurs spécifié le capitaine Mike Fisher après la rencontre de lundi.

On veut bien, mais quand les Predators ont perdu Johansen en finale de l’Ouest contre les Ducks d’Anaheim, un commencement de doute s’est certainement installé dans le vestiaire?

«Je n’ai jamais senti de doute, a assuré le défenseur Mattias Ekholm. La série était égale 2-2. Les pertes de Ryan et de Fisher – victime d’une commotion cérébrale, le capitaine des «Preds» a raté deux rencontres – étaient importantes. C’est vrai. Mais nous avions confiance aux gars appelés à les remplacer. Colton (Sissons) a fait un très bon travail avec Filip (Forsberg), Vernon Fidler, en bon vétéran, a saisi l’opportunité d’aider l’équipe et des gars comme Freddy (Frédérick Gaudreau) et Pontus Aberg sont entrés dans la formation. On connaissait ces gars. On savait qu’ils étaient bons. On savait qu’ils étaient capables de percer l’alignement et que ce n’était qu’une question de temps avant que cela ne se produise», a ajouté le défenseur suédois.

Deux défis plutôt qu’un

Bien qu’anonyme, l’attaque des Preds est rapide et teigneuse. Avec un échec avant soutenu, elle déstabilise souvent la défensive des Penguins qui est lente en plus d’afficher un manque à gagner en fait de talent.

«Nous avons adapté notre style à nos adversaires. On sait qu’ils sont très forts offensivement. On doit donc tenter de placer la rondelle derrière leurs défenseurs pour garder la rondelle le plus loin de leurs vedettes», a indiqué Colton Sissons.

Le nouveau premier centre des Predators admet aussi que le défi de combler la perte d’un gars comme Johansen et le mandat difficile d’affronter des vedettes comme Crosby, Malkin et Kessel le motivent grandement, tout comme ses coéquipiers.

«On peut dire sans se tromper qu’ils ont un net avantage sur nous en matière de réputation. Ça nous oblige à redoubler d’ardeur, car c’est plaisant de sortir de l’anonymat en jouant des matchs comme les quatre que nous venons de disputer contre eux. La série est égale 2-2, mais nous avons quand même disputé deux bonnes rencontres là-bas. Ça nous aide à maintenir un bon niveau de confiance à l’aube du cinquième match qui devient crucial», a ajouté Sissons.

Défenseurs enfin reconnus 

Si la finale met en évidence les qualités de l’attaque anonyme des Preds, elle confirme les grandes qualités d’une brigade défensive qui est enfin reconnue à sa juste valeur.

Débarqué à Nashville avec une immense réputation et un contrat plus dispendieux que ses trois principaux partenaires réunis, P.K. Subban a retenu beaucoup l’attention médiatique au cours de la saison.

Les succès des Preds en série ont toutefois permis de confirmer la place de Roman Josi au sein de l’élite de la LNH et de hisser Ryan Ellis et Mattias Ekholm parmi les bons défenseurs de la Ligue.

«C’est clair que notre présence en finale et le fait que nous ayons enfin prolongé nos séries nous permettent d’obtenir beaucoup plus de couvertures médiatiques que par le passé. Nous formons un très solide groupe de défenseurs. Nous savions depuis longtemps que nous avions du potentiel, que nous pouvions gagner en séries. Mais le fait d’y arriver nous assure de vous voir (journalistes) plus nombreux de jouer devant des amateurs qui ne nous voient pas jouer souvent. On a l’occasion de se faire connaître et nous en profitons», a indiqué Mattias Ekholm.

Principal partenaire de jeu de P.K. Subban, Ekholm se fait d’ailleurs connaître comme un défenseur capable d’être robuste et parfois même un brin salaud. Une caractéristique pas vraiment habituelle chez les Suédois.

«J’adapte mon style à la LNH d’aujourd’hui. Les attaquants convergent sur nos gardiens et nous devons prendre les moyens pour les protéger. J’ai appris avec Shea Weber qui était un défenseur très solide et qui s’imposait physiquement. Je tente de suivre ses traces et de jouer à la limite de ce qui est permis», a ajouté Ekholm qui garde de très bons souvenirs de son ancien capitaine.

«Je lui dois beaucoup. Il m’a pris sous son aile et m’a grandement aidé dans mon développement et mon adaptation à la LNH. C’était un très bon coéquipier. Un très bon capitaine aussi. Un gars qui était toujours prêt à échanger avec nous pour nous aider à être meilleurs.»

Après un congé salutaire mardi, les Predators s’entraîneront mardi à Nashville avant de mettre le cap sur Pittsburgh.

Au terme de 82 matchs de saison régulière et 20 parties de séries éliminatoires, voilà donc les Predators à deux victoires de la coupe Stanley.

«Quand tu y penses, c’est énorme 102 matchs de hockey pour nous rendre où nous sommes rendus. Mais on se bat pour ça durant toute l’année. On se bat pour jouer au mois de juin et nous y sommes. Nous sommes à deux victoires de la coupe Stanley, mais on est encore bien loin aussi. Car ces deux victoires seront les deux plus difficiles de la saison à aller chercher», a conclu Filip Forsberg.