MONTRÉAL – Quand on voit le jour en Finlande, des arrêts en Saskatchewan, à Chicoutimi, à Toronto, en Californie et au Connecticut peuvent être perçus comme des détours. Pourtant, toutes ces étapes ont mené Christopher Gibson à sa destination rêvée, celle de la LNH.

Le 5 avril, le gardien aux origines finlandaises a finalement obtenu son premier départ dans le circuit Bettman et il a contribué à un gain de 4 à 3 des Islanders de New York face aux Capitals à Washington.

En plus de savourer la joie de cette introduction réussie, Gibson avait permis aux Islanders de confirmer leur place éliminatoire avec ce triomphe. Cette réalisation viendra ajouter une signification de taille à sa première victoire.

« C’était vraiment une belle sensation, je ressentais beaucoup d’émotions. Je ne pensais jamais que mon premier match serait contre Washington. Honnêtement, je pensais plus au fait que c’était incroyable d’avoir joué mon premier match et qu’on ait pu gagner. C’est après que j’ai su que cette victoire confirmait la place en séries », a confié Gibson, dans un français beaucoup plus que respectable, au RDS.ca.

Durant cette rencontre, les Islanders ont tiré de l’arrière de 3-1 avant de remonter la pente pour l’emporter en prolongation. Paradoxalement, c’est après avoir flanché une fois que Gibson a chassé la nervosité.

« Avant la partie, j’étais pas mal stressé, mais à partir du but assez rapide d’Alex Ovechkin (d’un tir fabuleux), je me suis senti plus détendu et plus concentré pour le reste du match », a exprimé l’athlète de six pieds un pouce et 195 livres.

Gibson avait été rappelé le 4 avril par mesure d’urgence par les Islanders en raison de la blessure subie par Jean-François Bérubé alors que Jaroslav Halak était déjà sur la touche (pour une période de 6 à 8 semaines).

En dépit de cette situation peu enviable, les Islanders ont remporté six de leurs sept dernières sorties. Gibson et Bérubé ont chacun contribué à une victoire tandis que Thomas Greiss a récolté les quatre autres.

Pour l’instant, l’ancien des Saguenéens de Chicoutimi demeure dans l’entourage des Islanders. Il souhaiterait compléter la saison avec eux, mais tout dépendra de la situation de Bérubé.

« Pour être franc, je n’ai pas les détails dans son cas, mais c’est certain que j’aimerais rester avec les Islanders pour la fin de la saison. J’aborde les choses un jour à la fois, je comprends que la décision ne me revient pas », a noté Gibson.Christopher Gibson

Puisque ses parents résident en Finlande et que sa copine est demeurée à Chicoutimi – où il l’a rencontrée – Gibson n’a pas vécu les joies de son premier départ auprès de son entourage.

« J’ai su le matin que j’allais jouer donc personne n’avait le temps de venir au match, mais mes parents ont regardé la partie en Finlande et ils n’ont pas pu dormir avant d’aller au travail », a-t-il raconté.

Par la force des choses, Gibson s’est habitué à effectuer ce parcours vers la LNH en solitaire et il s’assure de rester en contact avec ses proches.

« Je parle quand même souvent avec mes parents et les gens de ma pension à Chicoutimi. Ma blonde vient également me voir parfois à Bridgeport ou à New York », a précisé celui qui a été échangé aux Islanders en compagnie de quatre autres joueurs en retour de Michael Grabner.

« Ça fait partie des sacrifices pour se rendre dans la LNH et j’ai toujours été prêt à les faire pour réaliser mon rêve », a-t-il tenu à dire.

Un entraîneur québécois pour l’aider

À 23 ans, l’expérience de Gibson se limite donc à un départ et une présence en relève en janvier. Si son niveau de jeu se rapproche de celui de la LNH, il se retrouvera encore en compétition avec trois autres gardiens la saison prochaine.

« Jusqu’à maintenant, j’avoue que j’ai essayé de ne pas trop réfléchir à ça. Il reste encore des matchs à la saison des Islanders ou dans la Ligue américaine (avec les Sound Tigers de Bridgeport). Je veux me concentrer sur mon rendement et on verra la suite des choses cet été », a évalué le cerbère.

Greiss et Halak possèdent respectivement une et deux autres saisons à leur contrat. Quant à Bérubé et lui, ils seront joueurs autonomes avec restriction durant la pause estivale.

En étant à sa première saison au sein de l’organisation des Islanders, Gibson œuvre avec un nouvel entraîneur des gardiens qui l'a connu alors qu’il travaillait avec les défunts MAINEiacs de Lewiston.

« On a joué contre lui quand il était à Chicoutimi, je savais donc qu’il avait de très bonnes habiletés. Il a été capable de gagner des matchs par lui-même, il a beaucoup de détermination et il adore le hockey », a exprimé Marc Champagne.

« Il ne lui en manque pas beaucoup (pour s’établir dans la LNH). C’est une question d’expérience et de développer son art. On entend souvent dire que ça prend environ huit ans avant qu’un gardien se développe jusqu’à maturité dans la LNH », a soulevé l’entraîneur originaire de Verdun.

Champagne, qui épaule l’entraîneur des gardiens Mike Dunham, a eu à naviguer avec quatre différents gardiens cette saison. L’aventure aurait pu être périlleuse, mais ils ont tous, chacun leur tour, tenu le fort.

« On a une bonne pépinière de gardiens. J’ai toujours cru en eux et on a continué de travailler fort malgré les blessures. Je leur demande d’apprécier l’expérience et c’est génial de voir qu’ils ont tous bien répondu quand ils ont l’occasion de se faire valoir », a vanté Champagne.

S’il apprécie l’honnêteté de l’entraîneur Jack Capuano, Gibson adore le contact avec Champagne.

« Il veut que je fasse confiance à mes habiletés parce que je suis capable de jouer dans la LNH. Il a aussi beaucoup d’énergie et même si tu arrives fatigué à l’aréna, tu vas retrouver ton aplomb seulement en lui parlant deux minutes », a relevé le gardien sélectionné au plus haut rang (49e échelon) en 2011.

En collaboration avec Champagne, Gibson espère rehausser, en priorité, deux aspects de son répertoire.

« Évidemment, les lancers dans la LNH sont plus forts et décochés plus rapidement. Ça fait que le contrôle des retours est essentiel et je souhaite aussi améliorer ma lecture du jeu pour demeurer calme et ne pas bouger pour des raisons inutiles », a identifié qui a stoppé 29 lancers lors de sa première victoire.

Une carrière grâce à Clément Jodoin

Champagne n’a peut-être pas quitté la Finlande pour accéder à une carrière dans la LNH, mais son bagage était loin de lui assurer une place dans la ligue la plus compétitive du monde.

En tant que gardien, il n’a jamais atteint le niveau du junior majeur, mais il s’est servi de son audace pour gravir les échelons.

C’est finalement Clément Jodoin – quand il dirigeait à Lewiston – qui a joué le rôle essentiel dans son cheminement.

« J’avais remarqué que les MAINEiacs recherchaient un entraîneur des gardiens et j’ai décidé d’envoyer mon CV. J’étais en train de déménager quand j’ai reçu son appel et j’étais tellement content de lui parler. Il voulait me rencontrer quelques heures plus tard à un certain endroit, mais disons que je n’étais pas bien habillé en raison du déménagement et je m’en suis excusé. Je me souviens que je n’étais pas le seul intéressé au poste et il me l’a offert quelques jours plus tard », s’est rappelé Champagne.

« C’est une grande personne de hockey pour moi, il est un peu comme mon père », a-t-il avoué.
Après des expériences à Bathurst et à Moncton, Champagne visait des fonctions similaires à Val-d’Or quand il a décidé de foncer une autre fois.

« J’ai demandé à Allan Walsh, l’agent de Jaroslav, si une équipe de la LNH cherchait quelqu’un pour leur club ou celui de la Ligue américaine. Une bonne journée, il a texté Garth Snow (le directeur général des Islanders) et il a demandé que je lui fasse parvenir mon CV. Deux semaines plus tard, alors que je n’avais pas eu l’emploi à Val-d’Or, j’ai eu celui avec les Islanders », a décrit Champagne.

Cette décision, qui représente un autre point tournant dans sa carrière, lui permet d’en être à sa deuxième saison avec les Islanders. Quand il réfléchit au portrait qui a nécessité la contribution de quatre gardiens pour accéder aux séries, il répond avec un constat qui s’applique bien à sa carrière.

« C’est un beau défi, tu peux aller loin avec les bonnes personnes », a conclu Champagne.