La coupe de Paul Maurice
SUNRISE – Les Panthers de la Floride comptent sur des joueurs de premier plan.
À commencer par leur capitaine Aleksander Barkov qui vient de prouver, en soulevant la coupe Stanley pour une deuxième année consécutive, à quel point il mériterait une place bien plus en vue tout en haut de la liste des meilleurs joueurs de hockey au monde. Et des meilleurs leaders.
En passant, Barkov s'est ouvert la paume d'une main et a joué en dépit d'une blessure assez sérieuse au genou au fil des séries. Cela a peut-être un brin affecté ses performances offensives, mais défensivement il s'est malgré tout dressé comme un rempart devant les Oilers.
Compter sur des joueurs comme Barkov, entrer dans un vestiaire aussi rempli de joueurs de premier plan, c'est un atout pour tout entraîneur-chef.
Mais attention! Ça peut aussi devenir un péril quand tu n'arrives pas à soutirer le maximum de tous ces joueurs. Quand tu n'arrives pas à les regrouper; à leur faire accepter que l'équipe passe en premier; à les convaincre de se sacrifier pour le bien de l'équipe; pour maximiser les chances de gagner.
Regardez ce qui est arrivé aux Stars de Dallas en finale de l'Ouest. Ils formaient une meilleure équipe que les Oilers. Une équipe plus équilibrée. Une équipe plus solide. Mais cette équipe s'est effondrée.
Les joueurs ont donné l'impression de décrocher alors que Peter Deboer, pourtant considéré comme un excellent entraîneur-chef, leur demandait de pousser plus encore. Les Stars ont abandonné leur coach, ce qui a forcé le directeur général à le limoger bien qu'il venait de conduire son équipe en finale d'association pour une troisième saison de suite.
Pendant que Kris Knoblauch chambardait sa formation au fil des matchs, qu'il entrait et sortait des joueurs de l'alignement, jonglait avec ses trios avant et pendant les matchs, Paul Maurice affichait une confiance inébranlable en ses joueurs en maintenant intacte une formation en laquelle il croyait dur comme fer.
Une confiance contagieuse dont les joueurs des Panthers se sont imprégnés.
En écoutant les commentaires de ces joueurs depuis le début de la finale, en les questionnant encore hier soir sur la patinoire du Amerant Bank Arena, il est devenu très clair que la coupe soulevée pour la deuxième année de suite par les Panthers est aussi, et beaucoup, la coupe de Paul Maurice.
«- Ma vie a changé pour le mieux quand je suis passé aux Panthers – dans la transaction qui a envoyé Jonathan Huberdeau à Calgary – et que je me suis retrouvé sous les ordres de Paul Maurice. C'est non seulement le meilleur coach pour qui j'ai joué, mais je peux t'assurer que tous les gars de cette équipe l'adorent, le respectent, veulent jouer pour lui. Et ça, c'est rare. Dans un vestiaire, il y a toujours des gars qui aiment le coach et d'autres qui l'aiment moins ou pas du tout. Mais Paul fait l'unanimité », a lancé Matthew Tkachuk entre deux gorgées de bière échangées avec son père Keith et son frère Brady et des accolades chaleureuses avec sa mère et sa sœur.
Un génie du coaching
« Paul est un génie du coaching », a lancé avec conviction Sylvain Lefebvre quand je lui ai demandé de me parler de son patron.
« Il connaît la chambre. Il connaît les joueurs. Il sait choisir les bons moments pour pousser ou pour donner un répit. Il est droit avec les gars. Ils savent ce qu'il veut. Et ils lui donnent. Quand on perdait 2-0 contre Toronto en deuxième ronde, Paul maintenait le cap. Il était calme. Confiant. Les gars sentent ça. Ils réagissent positivement à ça. J'apprends depuis le premier jour que je suis arrivé ici, j'apprends encore et j'apprendrai toujours l'an prochain en le regardant aller », a poursuivi Lefebvre qui a prolongé son entente avec les Panthers.
Bill Zito, qui a décidé de confier son équipe à Paul Maurice pour qu'il réussisse, en Floride, ce qu'il n'avait pas été en mesure de faire à Winnipeg, c'est-à-dire de se rendre à la coupe Stanley, voue une admiration sans bornes à l'endroit de son coach.
« C'est un homme brillant. Un enseignant. Un guide. Il sait atteindre les joueurs de plusieurs façons. Mais sa plus grande qualité à mes yeux, c'est son caractère. Il est tellement bon pour regrouper ceux qui travaillent autour de lui, que ce soient les joueurs ou tous les autres membres de l'organisation, que tu ne veux pas le décevoir », a expliqué Zito.
Le directeur général des Panthers s'est assuré d'appuyer ce commentaire en soulignant que plusieurs joueurs sont arrivés en Floride après avoir été largués par leurs anciennes organisations.
Des gars comme Carter Verhaeghe acquis sur le marché des joueurs autonomes après avoir été libéré par le Lightning, Gustav Forsling acquis au ballottage où l'avait soumis les Hurricanes de la Caroline déjà très bien pourvus en fait de défenseurs, Nate Schmidt, le Québécois A.J. Greer libéré par les Flames de Calgary qui l'avait acquis au ballottage où il avait été placé par les Bruins de Boston.
« Tu regardes tous les gars qui se sont greffés à notre équipe depuis trois ans et ils ont une chose en commun. C'est ici qu'ils ont joué et jouent le meilleur hockey de leur carrière. Ça en dit long sur la qualité de notre entraîneur-chef et sur la qualité de l'organisation. Sur l'environnement que nous tenons à offrir à nos joueurs pour maximiser leurs succès et ceux de l'équipe », a conclu Bill Zito.
Récompenser tout le monde
Paul Maurice a donné un autre aperçu de ses qualités de meneur d'hommes en fin de match mardi alors qu'il a envoyé A.J. Greer et ses acolytes du quatrième trio sur la patinoire pour écouler les dernières secondes du match.
« Ils nous a crié de nous préparer. Qu'il voulait nous récompenser parce que nous avions aidé à changer le cours de la série contre Toronto. Il a dit que sans nous, nous ne serions pas ici ce soir et que nous méritions d'aller sur la patinoire pour finir le match. Il voulait nous donner la chance de lancer nos gants en l'air et d'être les premiers à entourer notre gardien. C'est un geste qui m'a beaucoup touché. J'ai traversé bien des épreuves au fil des dernières années alors que je croyais avoir raté mes dernières chances de jouer dans la LNH. Et d'avoir reçu un cadeau comme ça ce soir, et d'avoir eu la coupe à bout de bras, c'est vraiment sensationnel », a témoigné A.J. Greer en tenant son fils Jackson dans ses bras.
Défilé de la coupe
Avant de défiler dans les rues de Fort Lauderdale et de s'installer au mythique Elbo Room devant la plage pour une deuxième année de suite, la coupe Stanley a défilé sur la patinoire du Amerant Bank Arena.
Ce défilé orchestré par Aleksander Barkov a illustré les qualités de leader du capitaine et aussi la culture établie au fil des dernières années dans le vestiaire. Une culture qui permet l'intégration rapide et efficace des nouveaux venus.
Après avoir reçu la coupe des mains du commissaire Gary Bettman, Barkov s'est tourné vers les nouveaux membres de l'équipe pour qu'ils puissent, les premiers, parader avec la coupe. Particulièrement ceux qui n'avaient jamais eu l'honneur et la joie de savourer un tel moment.
Le vétéran défenseur Nate Schmidt a été le tout premier. Seth Jones, Tomas Nosek, le gardien auxiliaire Vitek Vanecek, A.J. Greer, Jesper Boqvist se sont ensuite échangé la coupe Stanley. Les réservistes Mackie Samoskevich, Uvis Balinskis, Jaykob Megna et le gardien ontarien Evan Cormier ont terminé la première vague.
« Ce que Barkov a fait là devrait prouver à tout le monde qu'il n'est pas seulement un très grand joueur de hockey, mais aussi une très bonne personne », a témoigné Sylvain Lefebvre.
Sergeï Bobrovsky a été le premier vétéran à brandir la coupe. Très solide encore mardi, Bobrovsky a stoppé 28 des 29 tirs des Oilers. Il a été privé de son blanchissage avec moins de cinq minutes à faire lorsque Vasily Podkolzin a poussé une rondelle libre derrière lui.
Brad Marchand a été le deuxième en lice. L'ancien des Bruins soulevait la coupe pour la deuxième fois de sa carrière après la conquête de 2011 avec les Bruins de Boston.
Les 14 années séparant les deux coupes de Marchand le placent au troisième rang de l'histoire de la LNH derrière Chris Chelios – 16 ans entre ses conquêtes avec le Canadien (1986) et les Red Wings (2002) – et Mark Recchi – 15 ans entre ses conquêtes avec les Penguins (1991) et les Hurricanes (2006). Darren Helm – Detroit 2008, Colorado 2022 – et Bill Guerin – New Jersey 1995, Pittsburgh 2009 – partagent le troisième rang avec Marchand.
Quand Bill Zito a voulu remettre la coupe entre les mains de son entraîneur-chef, Paul Maurice lui a fait un signe de la tête à son patron pour qu'il la remette d'abord au propriétaire Vinny Viola.
Quand son tour est venu, Maurice a lentement levé la coupe à bout de bras pour l'embrasser doucement à deux reprises.
Est-ce qu'il aura la chance de l'embrasser trois fois l'an prochain?
Les Islanders de New York – 1980, 1981, 1982, 1983 – sont les derniers à avoir gagné la coupe plus de deux années consécutives. Un exploit réalisé par les Oilers d'Edmonton (deux fois), les Penguins de Pittsburgh (deux fois), les Red Wings de Detroit et le Lightning de Tampa avant que les Panthers ne les rejoignent dans ce groupe sélect.
Le Canadien de Montréal – 1956, 1957, 1958, 1959, 1960 – détient le record de la LNH avec cinq conquêtes consécutives.
Un record intouchable dans une ligue de 32 clubs, et peut-être bientôt 34, qui doivent respecter un plafond salarial.