Les Golden Knights jouissent d’une énorme popularité parce qu’ils sont en train d’écrire sous nos yeux une nouvelle page d’histoire dans une ligue professionnelle vieille de 100 ans.

Dans quelques décennies, quand on racontera aux enfants d’aujourd’hui qu’une équipe de hockey, construite de la plus innovatrice des façons, s’est hissée jusqu’à la finale de la Coupe Stanley grâce notamment à des joueurs marginaux portant des noms aussi inhabituels que Tuck, Engelland, Haula, Sbisa, Eakin et Nosek, qui nous laissaient totalement indifférents le jour où on les a réunis, ils seront sans doute curieux d’en connaître plus sur eux. Ils voudront sans doute savoir qui était ce Fleury qu’on surnommait affectueusement Flower.

Bien sûr, Las Vegas a été favorisé par un système de sélection inhabituel, mais encore fallait-il qu’on place les pièces du casse-tête au bon endroit et qu’on incite les éléments choisis à adopter un système fort simple basé sur la discipline, l’oubli de soi et la fierté. Peut-être devrions-nous inciter davantage sur la fierté car la plupart de ces patineurs se sont présentés à Las Vegas blessés dans leur orgueil.

Le directeur général George McPhee les a habilement convaincus qu’ils étaient désirés. C’est eux qu’on voulait pour implanter solidement le sport du hockey dans une ville reconnue pour son haut taux de distraction. Ils étaient les meilleurs joueurs disponibles parmi tous ceux que les organisations ne voulaient plus. S’il n’y avait pas eu cette expansion, elles les auraient probablement tous gardés, mais comme elles devaient libérer un joueur chacune, ces laissés-pour-compte étaient les premiers sur le bord de la porte.

L’entraîneur Gerard Gallant a fait mieux encore en leur rappelant qu’il savait fort bien dans quel état d’esprit ils étaient, ayant lui-même été jeté à la rue par la direction d’une équipe (les Panthers de la Floride) qu’il avait conduite à une saison record de 103 points un an plus tôt. Ceux qui étaient appelés à former les Golden Knights savaient dès lors qu’ils auraient droit à un préjugé favorable de sa part. C’est plutôt bien parti quand on se sent aussi bien compris par l’entraîneur.

Des Capitals médiocres

Il y avait un certain élément de curiosité chaque fois que la Ligue nationale procédait à une expansion. On était toujours impatient de savoir qui avait fait les choix les plus judicieux ou qui s’était fourvoyé dans son rôle de bâtisseur? Inévitablement, il a eu des équipes poches. Quelle a été la plus mauvaise et la plus dérisoire équipe d’expansion? Les Capitals de Washington.

Quelle coïncidence quand on y pense! Les deux formations se battant pour leur première coupe Stanley ont écrit l’histoire à leur façon: Washington dans la médiocrité et Las Vegas dans un formidable coup d’éclat. On observe donc actuellement la plus mauvaise équipe d’expansion contre la meilleure de l’histoire.

Le tout premier entraîneur des Capitals, Jim Anderson, a été congédié à mi-chemin dans la saison... après 45 défaites. Son remplaçant, Red Sullivan, n’a guère fait mieux, si bien que le directeur général Milt Schmidt, une ancienne gloire des Bruins de Boston, est venu compléter la saison derrière le banc. Cette très mauvaise équipe a saboté la carrière de ces trois entraîneurs qu’on n’a plus jamais revus dans la Ligue nationale.

Bilan de cette affreuse première saison des Capitals : 8-67-5 pour 21 points. Le meilleur marqueur de l’équipe, Tom Williams, obtenu des Whalers de Hartford, a amassé 58 points tout en affichant le pire dossier défensif de l’équipe : moins-69. Les trois gardiens utilisés ont affiché des moyennes dérisoires: Michel Belhumeur (5,37), Ron Low (5,45) et John Adams (6,90).

Le rôle des gardiens de but

Bien sûr, on ne s’attend pas à ce que ces repêchages d’expansion produisent des candidats au trophée Maurice-Richard ou de futurs gagnants du trophée Norris. Depuis 1967, les meilleurs marqueurs de ces nouvelles équipes ont généralement été limités à une cinquantaine de points, parfois beaucoup moins dans certains cas.

À la suite de toutes ces expansions, Brian Bradley, du Lightning de Tampa Bay, est le seul à avoir amassé plus de points (86) que William Karlsson, des Golden Knights. Par contre, jamais personne n’a fait mieux que les 43 buts de Karlsson.

La situation la plus intéressante concerne celle des gardiens de but. Quelques gardiens de renom ont été abandonnés au profit d’une formation de l’expansion, mais Marc-André Fleury est l’unique triple gagnant de la coupe Stanley à s’être vu dans l’obligation de tout recommencer au sein d’une équipe naissante. Il a été fidèle à sa réputation en devenant l’épine dorsale des Golden Knights. Contre toute attente, Fleury est actuellement considéré comme un sérieux candidat au trophée Conn Smythe.

La première sélection d’importance concernant un gardien a été celle prise par Philadelphie dans le cas de Bernard Parent qui était le troisième gardien des Bruins de Boston derrière Gerry Cheevers et Eddie Johnston quand les Flyers l’ont réclamé. Sept ans plus tard, il a offert une performance extraordinaire pour permettre aux Flyers de devenir la première formation de l’expansion à remporter la coupe Stanley.

De son côté, Glenn Hall a été réclamé par St Louis immédiatement après avoir gagné le trophée Vézina avec les Blackhawks. Avant d’être repêché par les Blues, il avait eu le temps d’empocher un trophée Calder, deux Vézina et un Conn Smythe, sans avoir gagné la coupe.

Lors de l’expansion de 1970, Roger Crozier a été acquis de Detroit par les Sabres après avoir lui aussi mérité le trophée Conn Smythe sans avoir remporté la coupe. Incidemment, les trophées Conn Smythe de Hall et de Crozier ont été mérités dans les deux cas aux dépens d’un joueur vedette du Canadien, pourtant champion de la coupe Stanley.

La suite de l’histoire pourrait appartenir à Fleury qui pourrait devenir le premier gardien à remporter la coupe et le Conn Smythe dès son entrée au sein d’une nouvelle équipe.