Raymond Bourque a trouvé difficile de devoir haïr le Canadien de Montréal, quand les Bruins de Boston ont fait de lui leur premier choix en 1979.

Quelques semaines auparavant, il se réjouissait de voir le Canadien éliminer les Bruins lors du septième match de la demi-finale de la coupe Stanley sur le désormais célèbre but en prolongation d'Yvon Lambert qui avait soulevé le Forum quelques jours avant une quatrième conquête de suite du calice d'argent par la Tricolore face aux Rangers de New York.

Une Coupe grandement méritée avec l'Avalanche

Voilà l'une des nombreuses confidences qu'a faites l'ancien défenseur étoile de la LNH lors d'une rare entrevue accordée à l'animateur de l'Antichambre à RDS, Stéphane Langdeau. Parfois avec émotions, d'autres fois avec humour, Bouque a accepté de revisiter le parcours qui a fait de lui un membre du Temple de la renommée.

Le petit gars de Montréal a déclaré qu'il avait été bien accueilli par les vétérans des Bruins quand il s'est pointé au Boston Garden à la fin de l'été 79 pour le camp et qu'il n'a pas oublié comment l'un des grands défenseurs de l'époque, Brad Park, l'avait pris sous aile.

À son arrivée à Boston, il a bien senti que la défaite des Bruins aux mains du Canadien était passée de travers dans la gorge des vétérans de l'équipe. D'autant plus que les Bruins n'étaient qu'à quelques minutes d'envoyer leurs rivaux au golf jusqu'à ce qu'ils se fassent prendre avec trop de joueurs sur la glace. « Dès la première minute, j'ai senti que les gars avaient du respect pour le Canadien, mais ça demeurait une rivalité. Il fallait apprendre à ne pas les aimer. »

Les frustrations des Bruins en séries face au Canadien se sont prolongées encore pendant quelques années, mais Bourque n'a pas oublié la première fois où lui et son équipe ont finalement eu le dernier mot sur le Bleu blanc rouge. Année après année, le poids des défaites était de plus en plus lourd à porter. « C'est arrivé en 1988, ça faisait presque 45 ans, je pense que les Bruins n'avaient pas battu le Canadien en séries. Chaque été, je retournais à Montréal et j'entendais les gens me dire qu'on avait encore perdu face au Canadien. Je peux vous dire que cette année-là, ç’a été l'été le plus tranquille. Personne n’est venu me narguer. »

La coupe Stanley

Après 1 518 parties dans l'uniforme des Bruins, Bourque n'a eu d'autres choix que de s'exiler au Colorado pour espérer soulever la coupe Stanley. À deux reprises, il avait vu ses Bruins baisser pavillon en finale devant les Oilers d'Edmonton. Constatant que son équipe n’allait nulle part et qu'il était vieillissant, c’est le coeur gros qu'il s'est résigné à demander aux Bruins de l'aider à réaliser son rêve.

Celui qui se voyait terminer sa carrière là où elle avait commencé a accepté de recommencer sa quête ailleurs à l'âge de 38 ans. Il a eu le bonheur d'atterrir au sein d'un club étoile qui comptait dans ses rangs des joueurs tels Joe Sakic, Patrick Roy, Peter Forsberg et Milan Hejduk notamment.

Ses premières séries avec l'Avalanche ont pris fin en demi-finale face aux Stars de Dallas. À la croisée des chemins, Bourque accepte de revenir une dernière année même s'il a accepté un contrat de deux ans. Il sait que coupe Stanley ou pas, ce sera sa dernière saison, car il n'a plus la force mentale pour reprendre le parcours du combattant.

15 mois après son arrivée à Denver, il réalise enfin le rêve de sa vie de hockeyeur quand son équipe élimine les tenants du titre, les Devils du New Jersey en sept parties. « Les deux dernières minutes du match ont été difficiles, tellement j'avais du mal à respirer. Je pensais m'évanouir sur la glace. »

Quand Joe Sakic lui a tendu la coupe après l'avoir reçu des mains du commissaire, il venait enfin d'effacer son nom d'une trop longue liste de grands athlètes qui se sont retirés sans jamais avoir gagné les grands honneurs. Il était maintenant un champion.

Le parcours de sa vie

Dans cette entrevue intimiste, Raymond Bourque a raconté comment son père avait pris soin de la marmaille quand son épouse est décédée. Le jeune homme avait 12 ans et il se souvient comment un ancien professeur d'éducation physique a été important dans sa vie au point de devenir le parrain de l'un de ses enfants.

Les premiers coups de patins de Raymond Bourque

Il n'a jamais oublié non plus comment Michel Bergeron, entraineur des Draveurs de Trois-Rivières, l'avait informé qu'il était échangé aux Éperviers de Sorel et comment il avait le coeur brisé. « Je n'ai jamais eu une réaction comme celle-là auparavant. Je pleurais comme un bébé parce que je ne m'y attendais pas du tout. J'ai dit à mon père que je voulais retourner dans le midget AAA avec le Lac St-Louis. Il m'a sagement conseillé de prendre une semaine avant de prendre une décision. Notre capitaine était Lucien Deblois. On ne gagnait pas beaucoup de matchs, mais l'équipe était tough et le fun. J'ai alors dit à mon père que j'allais rester. »

Bourque explique en détail comment les Bruins ont organisé dans le plus grand secret le retrait du chandail d'une autre légende des Bruins Phil Esposito. C'est la journée même du retrait du numéro 7 que Bourque a appris les intentions de la direction à la grande surprise de tous, y compris d'Esposito. « Cette journée-là, Terry O'Reilly m'a demandé si ça me dérangerait de rajouter un chiffre 7 sur mon chandail pour devenir le 77. À part ma femme, personne ne savait que j'allais changer de numéro. C'était une surprise pour tout le monde. Je pense d'ailleurs que personne d'autre n'aurait dû porter ce chandail après Phil. »

Il termine l'entrevue en parlant avec beaucoup d'émotion de son coéquipier Normand Léveillé qui a été victime d'un accident vasculaire cérébral le 23 octobre 1982 entre deux périodes lors d'un match à Vancouver.

Connais-tu ton Raymond?
Le hockey d'aujourd'hui selon Raymond Bourque