LAVAL – Juste avant que les Stingers de Concordia entrent en séries éliminatoires, Anthony Beauregard a reçu un petit mot d’encouragement de son agent. Les nouvelles étaient bonnes : certaines équipes professionnelles souhaitaient lui offrir un essai à la fin de sa saison.

Jusque-là, rien de trop déstabilisant. Marc-André Élement, son entraîneur-chef, lui avait déjà dit avoir reçu la visite de quelques dépisteurs pendant la saison régulière. Ceux-ci n’allaient certainement pas rebrousser chemin maintenant qu’il venait de finir l’année en tête du classement des pointeurs du réseau universitaire canadien.

Mais il y avait du nouveau. Il savait maintenant que le Canadien de Montréal était l’une des équipes curieuses.

« Je ne sais pas s’il m’a dit ça pour me motiver, mais veux, veux pas, c’est ce que ça a fait, racontait Beauregard vendredi matin. Tu essaies de ne pas trop y penser, mais en même temps, tu te fais des scénarios dans ta tête... »

Au moment d’amorcer sa première saison complète avec les Stingers, l’automne dernier, Beauregard n’aurait jamais cru qu’il se retrouverait dans le vestiaire du Rocket de Laval au printemps. Et même après avoir amassé 60 points en 28 matchs, 14 de plus que son plus proche poursuivant dans la course au championnat des marqueurs, il lui arrivait de se perdre dans ses pensées. Était-il en train de rêver?

« Si tu m’avais dit que je ferais autant de points au début de l’année, je serais parti à rire. Je ne m’attendais vraiment pas à ça, avance celui qui avait obtenu 19 points en 12 matchs en 2016-2017. Je pense que c’est le résultat de l’approche que le coach a pris avec moi. Dès que je suis arrivé à Concordia au milieu de la saison dernière, il m’a dit qu’il allait me donner toutes les opportunités pour que je m’améliore. »

Beauregard arrivait à Concordia avec une belle feuille de route. Il avait joué trois saisons complètes avec les Foreurs de Val-d’Or, récoltant 87 et 93 points avant la fin de sa période d’admissibilité, et avait goûté au hockey professionnel. Mais sur le campus, il sentait que tout était à rebâtir.

« Le coach m’a tellement aidé à être confiant, à faire des choses que peut-être je n’aurais pas faites au début. Même si j’avais connu le pro et que je revenais universitaire, c’est une autre ligue, c’est complètement différent. Au début, j’hésitais au lieu de tenter ma chance, je me contentais du jeu simple. C’est lui qui m’a dit de m’amuser, de faire ce que je savais faire. »

Incluant les séries éliminatoires et le bref passage des Stingers au championnat national, Beauregard a participé au pointage dans 34 des 38 matchs des siens cette saison. Le 3 novembre, il a connu un match de six points. Dans une séquence de trois matchs qui précédaient la pause des Fêtes, il a inscrit un but et treize mentions d’aide.

« J’ai connu des matchs qui ne se peuvent presque pas, s’étonne encore le jeune joueur de centre de 5 pieds 7 pouces. Mais quand tout fonctionne, tout fonctionne. J’ai travaillé fort durant l’été, je ne m’enlève rien, mais des fois, c’est aussi de la pure chance. Par contre, j’ai été capable d’être constant. J’arrivais à chaque match en me disant que si j’étais capable de faire la différence, je devais et j’allais le faire. »

Beauregard souhaite maintenant que son deuxième passage chez les pros soit plus long que son premier. Il y a deux ans, il avait joué 21 matchs dans l’ECHL après une brève participation au camp d’entraînement des IceHogs de Rockford, le club-école des Blackhawks de Chicago. Risquant de perdre les bourses universitaires qui étaient à sa portée, il avait décidé de faire un pas de recul.

Mais l’école n’a jamais été sa priorité. Il s’est inscrit au certificat en Arts et Sciences, « peut-être le papier le plus facile à aller chercher », admet-il avec candeur. Il tentera maintenant de compléter son cours à distance.

« J’ai choisi l’université en raison du hockey. Je savais qu’on allait me donner beaucoup de temps de jeu et que j’allais pouvoir m’améliorer. J’ai toujours pensé au pro, jamais je ne me suis dit que j’allais faire six années d’université. Je voulais aller chercher un papier et voir ce que la suite pourrait me réserver, mais quand tu as une occasion comme celle qui s’est présentée, tu ne peux pas vraiment passer à côté. Surtout quand c’est le Canadien. »

Beauregard a signé son essai amateur avec le Rocket mardi. Il disputera vendredi son premier match en carrière dans la Ligue américaine. Il en aura dix autres par la suite pour donner une suite enviable à sa belle histoire.

« C’est un gars qui est capable de marquer, de faire des jeux », constate l’entraîneur-chef du Rocket Sylvain Lefebvre, qui est allé aux sources auprès de son bon ami Mario Durocher quand le nouveau pivot de son quatrième trio est arrivé dans l’entourage du Rocket. Durocher dirigeait les Foreurs durant les belles années de Beauregard en Abitibi.

« Son patin a toujours été un de ses points à améliorer depuis le junior. On va voir comment il réagit dans un niveau supérieur, contre des gars plus forts physiquement. On va l’évaluer et on verra ce qui en est. Mais c’est le fun de voir un jeune Québécois qui a eu beaucoup de succès dans les autres niveaux obtenir sa chance. »

« Je suis ici pour jouer le plus de matchs possible, être dans la formation le plus possible, vise celui qui sera flanqué de Jeremiah Addison et Nikita Korostelev contre les Checkers de Charlotte. Je vais tout faire pour passer le reste de l’année ici et peut-être mériter un petit contrat pour l’année prochaine. Mon objectif numéro un, c’est de faire une bonne impression et décrocher quelque chose avec le Canadien. »