Je contrôle ce qui m’arrive... Enfin, presque toujours!

 

Quand un athlète se tient dans le portillon de départ, tout en haut de la montagne, il visualise sa descente et sait que les prochaines minutes ne tiennent qu’à lui. Il exerce totalement son emprise sur son destin. C’est d’ailleurs le cas pour tous les athlètes, quelle que soit la discipline.

 

Quand il descend, quand il saute, quand il effectue ses vrilles, quand il patine, tout dépend de lui. Des années d’efforts, d’entrainement et de compétition l’ont amené ici, à ce moment précis. Il a les outils, le talent et la détermination qui lui donnent les clefs de sa performance. Car ce qu’il fera dans les minutes qui suivent ne tient qu’à lui.

 

Toutefois, en patinage artistique en couple, une situation inusitée et improbable a fissuré cette règle. Les Français Gabriella Papadakis et Gabriel Cizeron, peut-être déconcentrés par un problème vestimentaire, ont terminé deuxièmes pour le programme court derrière les Canadiens Virtue et Moir. Ici, ce ne sont ni le talent ni la préparation qui ont fait défaut. Simplement un petit bout de tissus. 

 

Or, le lendemain, ils devaient présenter le programme libre où tout se jouerait. En moins de 24 heures, il fallait se refaire une confiance, un moral. Et c’est là qu’intervient le support de ceux qui les encadrent. Ils doivent trouver les mots pour que les athlètes oublient l’incident, sautent par-dessus l’inconvénient, passent l’éponge sur les résultats et se concentrent sur la prochaine compétition qui prend encore plus d’importance.

 

Les Français n’ont pas été les seuls à être confrontés à l’adversité. Je pourrais vous parler de Megan Duhamel et Eric Radford qui ont dû traverser des périodes excessivement difficiles pour arriver à décrocher le bronze à PyeongChang. À titre de docteur en psychologie sportive, je les connais bien parce que je travaille avec eux depuis des années. Je pourrais vous raconter comment ils sont passés près de tout abandonner, comment l’angoisse et l’anxiété les ont parfois paralysés.

 

J’ai eu la chance de les suivre et de les épauler. Eux aussi ont fait preuve de résilience et d’une force de caractère exceptionnelle. Ils ont réussi à vaincre leurs démons et à conquérir une médaille de bronze à Gangneung. Ils étaient en mission et ils ont gagné. Eux aussi, ils ont puisé l’énergie de leur entourage, de leurs entraîneurs et de leur psychologue sportif. Ultimement toutefois, c’est en eux qu’ils ont trouvé les ressources. La couleur de la médaille a soudain moins d’importance quand on sait ce que leur performance signifie. De plus, ils sortent leur dernière participation olympique en tenant aussi la médaille d’or en patinage artistique par équipe.

 

Le duo Papadakis-Cizeron a repris le contrôle de son avenir, gagnant le programme libre. Au total cependant, les Canadiens Tessa Virtue et Scott Moir, qui ont aussi réalisé une présentation hors du commun, sont sortis vainqueurs, décrochant la médaille d’or, leur deuxième de ces Jeux, ce qui est un exploit rarissime.

 

Je ne veux surtout pas insinuer que les Canadiens ont volé leur médaille. Ils avaient d’ailleurs réalisé un programme court exceptionnel, établissant un nouveau record du monde. En Corée, Virtue et Moir ont décidé qu’ils tenaient leur destin entre leur main. Ils ont tout donné et ont gagné!

 

Cette force de caractère, ce contrôle sur eux-mêmes et sur leur performance, l’immense majorité de ceux et celles qui participent aux Olympiques la possèdent. C’est pourquoi ils réussissent à nous bouleverser par leurs prouesses. 

 

Dommage qu’on ne s’y intéresse qu’aux quatre ans...