Même si je n'ai pas brillé comme je le souhaitais, j'estime que je me suis bien défendu et je trace un bilan positif de ma participation au Championnat du monde à Deer Valley.

J'ai obtenu ma place en finale à la suite d'une cinquième place en qualification, mais les choses se sont moins bien passées en finale alors que j'ai coupé ma vitesse sur mon deuxième saut et les juges m'ont fait payer la note.

Quand les juges ont constaté que je ralentissais et que je n'allais pas monter sur le podium, ils ont rapidement classé mon dossier. Dans mon sport, l'important est de monter sur le podium, les autres positions au classement ne sont pas vraiment importantes.

Malheureusement, en parallèle, j'ai raté ma qualification parce que j'ai chuté. Je suis simplement tombé sur le dos après avoir raté mon amorce d'un saut. J'ai encore du mal à croire que je suis tombé, c'est arrivé tellement peu souvent au cours de ma carrière. C'est juste dommage que ce soit arrivé à ce moment parce que la piste était tellement belle.

Avec le recul, j'estime avoir fait le bon choix en faisant l'impasse sur l'épreuve de Calgary pour me préparer pour Deer Valley. J'étais plus prêt que jamais pour cette piste. Je crois que je n'aurais jamais été capable de me qualifier parmi les cinq premiers en qualifications si je n'avais pas pris cette décision. Même si je ne suis pas parvenu à monter sur le podium, je pense que ma stratégie était excellente. D'ailleurs, les premières journées d'entraînement ont été les meilleures que j'ai eues à cet endroit depuis le début de ma carrière. Inutile de dire que mes performances à l'entraînement m'ont gonflé à bloc.

Les autres membres de l'équipe ont pris la relève et ont offert un spectacle relevé. D'ailleurs, le duel entre Mikaël Kingsbury et Guilbaut Colas était quelque chose à voir. Habituellement Colas est nettement plus rapide, mais cette fois Mikaël s'est surpassé et je pense qu'il est maintenant parmi les grands. Quant à Alexandre Bilodeau, il a employé une tactique misant sur la vitesse et la stratégie. Lui et Mikaël ont balayé les deux premières places du podium. Je suis très fier d'eux.

Chez les filles, Jennifer Heil a fait le tour de tout ce qu'elle voulait gagner. Et que dire de Chloé Dufour-Lapointe qui a obtenu un podium en duel à son retour d'une blessure? C'est fantastique. C'était impressionnant de la voir se signaler de la sorte lors de l'épreuve la plus difficile de la saison.

La suite des choses

Je n'accompagnerai pas l'équipe nationale lors de la prochaine compétition en République tchèque à la fin du mois. Cette décision a été prise après discussion avec mon entraîneur. Considérant que je ne me bats pas pour les premières places du classement général et qu'il s'agit d'une épreuve principalement axée sur les sauts, ce qui de toute évidence ne me permettra pas de me démarquer et que les chances de blessures sont plus grandes, on a décidé qu'il était préférable pour moi de rester à la maison.

Je vais donc rester chez moi et m'entraîner ici pour me concentrer sur les trois dernières épreuves de la saison en Suède et en Norvège ainsi que pour les championnats canadiens.

Je sais que ma carrière achève. Je ne suis toutefois pas encore gagné par l'émotion, car tant et aussi longtemps que je vais sentir que je suis encore dans le coup et que je peux toujours viser un podium, je ne sentirai pas que ma carrière achève. Je dois avouer que je connais l'une de mes plus belles saisons des cinq dernières années.

À la fin de la saison, je vais finalement décider si je quitte la compétition pour de bon. Je suis en santé et toujours compétitif. D'un autre côté, mon rôle de grand frère me plaît beaucoup parce que je sens que j'apporte aux jeunes skieurs de l'équipe. Je leur donne ce que je peux et je leur parle beaucoup. Par exemple à Deer Valley, j'ai parlé à mes coéquipiers de ce qui les attendait à cet endroit. Comme l'équipe a obtenu d'excellents résultats, je trouve tout cela valorisant. Tout le monde savait qu'Alexandre allait se retrouver parmi les meilleurs au monde, mais de voir des skieurs de première année se faufiler parmi l'élite, ce n'est pas rien.

Mon souhait

J'aimerais tellement gagner une dernière course avant la fin de la saison et pourquoi ne pas balayer un podium avec Alexandre et Mikaël. Cette dernière victoire me tient vraiment à coeur. J'aimerais tellement monopoliser un podium avec mes amis. Je pense que c'est réaliste parce qu'à chacune nos courses, il y a toujours l'un d'entre nous qui se retrouve sur le podium. On sait que c'est réalisable et je pense que ça va arriver.

C'est étrange, mais des fois, j'ai l'impression de faire une tournée d'adieu. À chaque arrêt, d'anciens adversaires viennent me saluer et me féliciter.

À Deer Valley par exemple, il y a beaucoup d'anciens qui sont venus voir la course et qui sont venus me dire qu'ils trouvaient que c'était incroyable que je sois encore sur les pistes. L'animateur est Shawn Smith, un ancien rival qui m'a encore annoncé cette année et il n'en revenait pas. Il avait du mal à croire que je sois encore capable de tirer mon épingle du jeu contre les jeunes d'aujourd'hui.

Et la foule. Avec le temps, elle nous reconnaît. Chaque endroit est spécial parce que des gens me reconnaissent. On me dit souvent que je les impressionne d'avoir persévéré malgré une fracture au cou et de toujours être là en 2011. C'est toujours plaisant de voir qu'on impressionne les gens par nos performances et notre persévérance.

*propos recueillis par Robert Latendresse