MONTRÉAL – Djordje Mihailovic s’est élevé parmi l’élite de la MLS à sa première saison au CF Montréal. Avec ses 16 passes décisives, le jeune milieu de terrain s’est établi comme l’un des meilleurs fabricants de jeu du circuit Garber.

Cette grande éclosion, après quatre saisons sans histoire passées avec le Fire de Chicago, en a fait le digne successeur d’Ignacio Piatti comme nouvelle grande vedette du club montréalais, mais elle ne l’a pas complètement sorti de l’ombre. Mihailovic n’a été sélectionné ni pour le match des étoiles en août, ni sur le XI type de la ligue au terme de la saison. Sur la scène internationale, il a bien été invité à un camp de l’équipe américaine en janvier, mais c’est sans lui que ses compatriotes se sont qualifiés pour la Coupe du monde de la FIFA qui aura lieu au Qatar à la fin de l’année.  

Conséquence? Depuis le début de la saison, l’Américain semble jouer avec une volonté encore plus grande de faire la barbe à ses détracteurs.

Samedi, alors que le CF Montréal disputait son premier match au stade Saputo, Mihailovic a offert une autre démonstration de son brio dans une victoire de 2-1 face aux Whitecaps de Vancouver. Il a égalé son total de buts de la saison dernière en marquant son quatrième à ses quatre derniers matchs, puis il a servi sa troisième passe décisive de la campagne sur le but gagnant de Romell Quioto.

Les chiffres ne mentent pas, mais ils ne suffisent pas. C’est en tout cas le constat qu’a fait Alistair Johnston, qui a pris les choses en main en s’appropriant le rôle de publiciste officiel de son talentueux coéquipier après la rencontre.

« Je serai le plus grand supporteur de sa candidature pour le titre de MVP, a clamé Johnston au début d’un long plaidoyer. C’est arrivé trop souvent que le fait de jouer pour un club canadien affecte les chances d’un gars d’être considéré pour des honneurs individuels. À moins que tu t’appelles Giovinco ou quelque chose comme ça, ça risque d’être très difficile. »

En réalité, Sebastian Giovinco est l’un des deux joueurs à avoir remporté le titre de joueur par excellence de la MLS alors qu’il s’alignait pour une formation canadienne. La Fourmi atomique a réalisé l’exploit en 2015 alors qu’il faisait la pluie et le beau temps avec Toronto FC. L’autre est Alejandro Pozuelo, lui aussi avec Toronto, en 2020.

Johnston voudrait maintenant attirer l’attention sur ce qui se passe un peu plus au nord.

« On pourrait seulement s’attarder aux chiffres, mais si vous regardez les matchs et que vous êtes un amateur de soccer, vous comprenez [que Mihailovic] joue présentement à un autre niveau. Personnellement, j’en suis au point où à chaque fois que j’ai une chance, je lève la tête et j’essaie de le trouver sur le terrain. Il est de cette trempe de joueur qui peut changer un match à lui seul. »

« Il fait partie de la crème et il est en feu en ce moment, approuvait Victor Wanyama quelques minutes plus tôt. S’il continue comme ça, je le vois jouer dans de plus gros championnats. Honnêtement, il ne restera pas ici longtemps. »

Mihailovic a plusieurs fois, et ce jusqu’à tout récemment, réitéré son bonheur de vivre et évoluer à Montréal, mais il n’a jamais caché ses ambitions d’être recruté par un grand club européen. Il a aussi toujours exprimé ouvertement sa frustration face à son incapacité d’obtenir une réelle audition au sein du programme américain.

« J’ai joué contre les États-Unis et je connais quelque gars dans cette équipe, a poursuivi Johnston. Je sais qu’il frappe à la porte. Ce n’est pas facile de percer cette formation qui a beaucoup de profondeur. Mais je sais qu’il a le talent pour le faire. En tout cas en tant que membre de l’équipe canadienne, je peux dire que je n’aimerais pas avoir à l’affronter. »

Johnston est honnête quant à ses réelles intentions en lançant ainsi le nom de son coéquipier dans l’espace public. Il souhaite tourner la clé dans la grosse machine médiatique, un organe qui, croit-il, a le pouvoir d’altérer les perceptions et de provoquer le changement.

« Les statistiques sont importantes, mais s’il n’y a pas une histoire qui se crée autour de vous, c’est vraiment difficile [d’être considéré pour le titre de joueur par excellence]. Alors il faut commencer à pousser pour faire sortir son nom, parce qu’il le mérite. Il mérite au moins d’être considéré parmi le top-5 de la ligue. »

En début de soirée, quelques minutes après le discours de Johnston, la photo d’un Mihailovic conquérant ornait la Une du site officiel de la MLS. Juste en haut, un titre composé de six lettres qui disent tout : « MLS MVP? ».

La roue a commencé à tourner. Le plus intéressant pourrait être à venir.