MONTRÉA L-  En ce week-end de la mi-juin, l'AS Blainville aurait possiblement posé le premier jalon vers la réalisation d'un rêve qu'entretiennent les dirigeants de ce club de soccer semi-professionnel depuis maintenant trois ans. Un rêve pour lequel les joueurs ont vigoureusement travaillé tout l'hiver parce qu'ils sentaient qu'ils n'en étaient peut-être pas si éloignés que ça.

Ce rêve, c'était de se retrouver sur le même terrain que l'Impact de Montréal dans le cadre du Championnat canadien, en juillet. Pour ce faire, Blainville devait vaincre les HFX Wanderers, une formation professionnelle de Halifax qui joue en Première ligue canadienne, dans une série aller-retour qui devait avoir lieu du 16 au 25 juin.

Tout ça est tombé à l'eau au début de la semaine quand Soccer Canada a annoncé que la participation de l'AS Blainville et du Master's FA de Toronto avait été reportée à 2021. Quant au Championnat canadien lui-même, il n'a pas encore été annulé mais aucune date n'a été annoncée, ni un format de compétition.

Bien que décevante, la décision a été fort bien acceptée par tout le monde, joueurs et dirigeants, au sein du AS Blainville. Car la pandémie de la COVID-19 allait rendre une lutte déjà difficile contre Halifax totalement inégale.

« Je vous dirais que c'est un mal pour un bien », analyse Wandrille Lefèvre, un ancien joueur de l'Impact et actuel membre de l'AS Blainville.

« On passe à côté d'une opportunité durant l'année 2020, mais en même temps, elle n'est pas jetée à la poubelle. Elle est reportée à l'année d'après, dans une dynamique où on aura été en mesure, éventuellement, d'avoir rebâti une logique d'équipe, une chimie et être préparé convenablement physiquement et tactiquement à affronter de la compétition, chose qui n'est pas le cas cette année. Si on nous demandait de jouer dans un mois ce serait compliqué. C'aurait été injuste même », ajoute Lefèvre.

À titre de champion de la PLSQ, Blainville en aurait été à une troisième participation consécutive au Championnat canadien. Lors des deux premières occasions, la formation québécoise devait gagner au moins deux séries aller-retour avant de retrouver l'Impact. Toutefois, un format différent en 2020 faisait en sorte que la route jusqu'à l'Impact ne nécessitait qu'une seule ronde préalable.

« Je vous dirais que ç'a été une bougie d'allumage auprès des joueurs quand on a annoncé ça. Durant l'hiver, avant que la COVID n'arrive, nos joueurs étaient déjà prêts. Ça s'entraînait plus qu'avant », raconte le président de l'équipe, Sylvain Pereira.

« Nous avons des leaders comme Wandrille, qui a dit 'je prends le devant, je pousse mon équipe à s'entraîner'. Déjà, hors-saison on voulait, et avec l'arrivée de la COVID, les joueurs n'ont pas arrêté de s'entraîner, ils ont poussé quotidiennement. Notre préparateur physique a monté des programmes, il faisait des suivis virtuels avec nos joueurs. C'est sûr qu'on ne s'entraînait pas comme avant, mais les joueurs ont gardé leur forme. Notre physio était toujours disponible pour répondre aux questions des joueurs s'il y avait un petit pépin, un bobo à gauche, à droite. »

De son côté, Pereira lui-même travaillait dans les coulisses et avait même entamé des démarches auprès de l'Impact pour étudier la possibilité de jouer les deux matchs au stade Saputo.

« Si on allait affronter l'Impact, on savait que c'est un match qu'on devait faire ailleurs qu'à Blainville, et j'avais commencé mes discussions avec l'Impact. Au niveau du club de Blainville, nous étions prêts à faire le match aller-retour au stade Saputo. J'en ai parlé à des gens de l'Impact une semaine avant la COVID. On était au début mars. La semaine suivante, la COVID débarquait à nos portes. »

Cela dit, personne au sein de l'AS Blainville n'ose prétendre que le duel contre Halifax n'aurait été qu'une formalité. Surtout pas l'entraîneur-chef Emmanuel Macagno. Toutefois, celui-ci comprend très bien le réflexe de regarder au-delà de cette ronde initiale, à cause de l'ampleur d'un rendez-vous contre une équipe de la MLS pour une formation comme l'AS Blainville.

« Pour notre organisation, pour Blainville, c'est vraiment énorme. Et pour plusieurs des joueurs, c'est le match d'une vie. Il ne faut quand même pas se le cacher », note Macagno en parlant de la perspective d'affronter l'Impact.

« En plus, ajoute Macagno, un Français, ç'aurait été un grand honneur parce qu'en face, le banc technique de l'Impact, ce sont soit de mes anciens coéquipiers comme Wilfried Nancy ou Jules Gueguen, ou alors, c'est Thierry Henry. Pour mon propre compte, c'est plus d'être assis sur le banc d'à-côté de ces gens que je respecte et que j'admire que de jouer ce match du championnat canadien. »

Lefèvre aurait également vu d'un bon oeil la possibilité de jouer contre l'Impact. Entre autres, il aurait eu l'occasion de renouer avec le stade Saputo, un endroit qu'il appelle "sa maison" et où il a joué entre 2011 et 2017. Il parle de l'Impact comme de son club et confie que son passage avec l'équipe lui a ouvert des portes.

« Ma vie professionnelle à l'Impact m'a donné une visibilité. J'ai bâti un réseau de par la visibilité que j'avais, qui me suit encore aujourd'hui », dit-il.

« Il y avait Patrice Bernier, Laurent Ciman, Hassoun Camara, il y avait quelques figures de proue francophones que l'Impact utilisait à bon escient pour parler à la communauté, et j'étais l'une d'entre elles. J'ai été très souvent amené a être en contact avec la communauté, autant les fans que les médias et l'environnement corporatif. J'étais beaucoup amené à interagir avec ces gens-là. Donc, je me suis bâti un réseau d'affaires en même temps que j'exerçais mon métier de joueur professionnel à ce moment-là. »