MONTRÉAL – Quelle aurait été la réaction de Mauro Biello s’il s’était tenu aux côtés de Rémi Garde lundi matin?

 

Un sourire en coin? Un lent hochement de tête? Une sincère étreinte de compassion? Il semble qu’elles auraient toutes été justifiées devant pareil déjà-vu.

 

Deux jours après la convaincante victoire de son équipe contre le Revolution de la Nouvelle-Angleterre, Garde a tiré les dernières conclusions d’un encourageant week-end avant de retourner à la préparation d’une semaine chargée au cours de laquelle il dirigera deux matchs en quatre jours. Il y avait du positif, bien évidemment. Il faudrait être un rabat-joie de classe mondiale pour ne pas en trouver après avoir vu ses joueurs remettre à sa place d’aussi belle façon un rival de section.

 

Mais on est encore à des lieux de la perfection, a délicatement voulu faire comprendre l’entraîneur.

« On a vu des choses intéressantes. En premier lieu la victoire, qui était importante et qui a fait du bien à tout le monde. Après, on n’a pas tout bien fait encore. On a toujours des sujets de progression », a bien mis au clair le perfectionniste professeur.

 

Garde n’était pas enchanté par les deux buts encaissés par son équipe, plus particulièrement par le moment et la façon dont ils l’ont été.

 

Le moment : l’Impact a cédé deux fois dans le dernier quart d’heure de jeu, une mauvaise habitude qu’il traîne comme un caillou dans ses crampons depuis le début de la saison. Déjà, dix ballons ont trouvé le fond du but d’Evan Bush dans ce segment du match. Garde a maintes fois répété qu’il s’attendait à une meilleure contribution des réservistes qu’il lance dans la mêlée en cours de match. Le match de samedi n’a probablement pas soulagé son agacement à ce chapitre.

 

La façon : l’Impact a gaffé une fois sur un coup de pied de coin et une autre sur coup franc, deux autres buts qui s’ajoutent à la longue liste de cadeaux offerts à l’adversaire sur phase de jeu arrêté. À Montréal, le problème est si redondant que l’accumulation des soupirs d’exaspération qu’il a provoqués suffirait à faire tanguer le mât du Stade olympique.

 

« On doit certainement être meilleurs sur coups de pied arrêtés, ça c’est sûr », approuvait peut-être pour la 86e fois Bush, qui endure cette défaillance depuis plus longtemps que quiconque au sein du vestiaire montréalais.

 

Reconnu autant pour son franc-parler que pour le ton pondéré de ses propos, le vétéran cerbère a surtout cherché à nuancer les teintes négatives de la conversation. Il a plaidé que l’Impact avait failli contre un adversaire qui n’avait plus rien à perdre et qui  a ajusté sa gestion du risque en conséquence. Il a aussi confessé que le transfert des responsabilités entre les partants rappelés au banc et leurs remplaçants n’avait probablement pas été idéal. « Il faut être meilleurs », a-t-il répété.

 

Puis Bush, comme un concurrent de Fort Boyard qui finit par comprendre qu’il ne trouvera jamais la clé s’il se contente de tourner autour du pot, a plongé la main jusqu’au coude dans la jarre à souris.

 

« La chose sur laquelle il faut vraiment s’attarder, c’est la gestion des deuxièmes ballons. On doit être un peu plus agressifs quand un ballon vient mourir dans notre surface. On l’a vu contre la Nouvelle-Angleterre : ils servaient au deuxième poteau et envoyaient des gars se ruer sur les ballons rabattus. Les équipes adverses sont conscientes de nos déficiences et de nos limites. Il nous faudra être plus combatifs et mieux préparés pour ces moments. »

 

Détermination et meilleures décisions

 

« On va faire pousser les joueurs de quelques centimètres, peut-être? » La blague, lancée par Rémi Garde, n’est pas mauvaise en soi. Si on ne la rit plus, c’est simplement qu'on l'a trop souvent entendue.

 

« Je comprends et je suis très ennuyé d’avoir pris deux buts sur coups de pied arrêtés, a éventuellement repris plus sérieusement l’entraîneur en soulevant les mêmes doléances que son gardien. La semaine dernière, j’ai vu deux joueurs adverses qui ont fait un amorti de poitrine dans notre surface de réparation. Je ne pense pas que ce soit ni un déficit de taille, ni un problème tactique. C’est un problème d’engagement et de détermination à empêcher l’adversaire, dans cette zone-là, de jouer. 

 

Garde croit possible que son équipe soit coincée dans un cercle vicieux où les échecs répétés engendrent un niveau de retenue qui, inévitablement, engendre la répétition des échecs.

 

« Bien sûr que si on n’en prend jamais, ça installe une sérénité. C’est comme dans le jeu. Mais je pense qu’il y a beaucoup d’équipes qui traversent ce genre de période dans une saison. Je ne dis pas ça pour qu’on attende qu’elle s’arrête. Il faut tout faire pour qu’elle s’arrête. Mais même une équipe avec de la taille peut encaisser tout d’un coup deux, trois, quatre buts sur coups de pied arrêtés et avoir ce syndrome chaque fois qu’il y en a un. »

 

« Peut-être aussi qu’on en concède beaucoup trop, des corners et des coups francs stupides, a enchaîné Garde. Donc aussi, si on peut éviter de provoquer ce genre de situation, ça sera déjà un bon axe de progrès. »

 

Lors de la présentation de son groupe d’adjoints, début janvier, Garde avait admis avoir été mis au courant de l’historique problématique de l’Impact en matière de coups de pied arrêtés.

 

« Pour moi, c’est aussi symptomatique du baromètre de la confiance d’une équipe, avait-il répondu à l’époque. Ce n’est pas seulement un travail tactique qu’on doit faire, mais c’est aussi l’engagement. L’engagement athlétique, mais aussi l’engagement mental, l’effort qu’on a envie de mettre offensivement ou défensivement sur ces phases-là. »

 

« Est-ce qu’il y a un spécialiste parmi [mes adjoints] sur qui vous pourrez taper ou à qui vous pourrez donner des lauriers? Il n’y en a pas. Je prends la responsabilité. »

 

Quatre mois plus tard, il ne s’agit évidemment pas de conclure à l’échec ou d’accuser Garde de prendre le problème à la légère – une telle suggestion serait loufoque et déplacée – mais seulement d’espérer que ses idées pour le régler soient plus à point que celles de ses prédécesseurs. Pour l’heure, les résultats se font toujours attendre.