Un grand vide à combler au sein de la boxe québécoise
Les temps sont durs pour la boxe québécoise, tant pour les athlètes que les deux grands groupes de promotion de la province qui peinent à susciter un réel engouement autour de leurs activités.
L'avenir de Groupe Yvon Michel semble plus que jamais incertain depuis la défaite controversée de Kim Clavel le 7 octobre dernier, tandis qu'Eye of the Tiger Management cherche tant bien mal à avoir un premier champion du monde depuis David Lemieux en 2015. Mary Spencer a échoué à sa plus récente tentative le 11 octobre, alors qu'Arslanbek Makhmudov, Christian Mbilli et Erik Bazinyan sont bien classés, mais ils n'ont pas encore eu leur chance en championnat du monde.
Le marasme dans lequel est plongée l'industrie locale provoque inévitablement des dommages collatéraux et les premières victimes sont ces boxeurs de l'ombre qui meublaient les sous-cartes des événements à grand déploiement qui mettaient en vedette Lucian Bute et Jean Pascal il n'y a pas si longtemps. Les galas se faisant de plus en plus rares, ces joueurs autonomes n'ont nulle part où aller, parce que les promoteurs favoriseront toujours les athlètes qu'ils ont sous contrat.
Pourtant, l'histoire regorge d'exemples d'athlètes qui ne demandent qu'une occasion de se faire voir pour prouver qu'ils ont leur place dans l'échiquier. Et c'est justement pour aider cette frange de laissés pour compte que Douggy Bernèche a décidé de remettre son chapeau de promoteur et qu'il tiendra son premier événement le 14 décembre prochain aux Bains Mathieu, à Montréal.
Au début des années 2010, l'homme aujourd'hui à la tête de Canada Fighting avait organisé une douzaine de cartes à Montréal, Vaudreuil-Dorion et Gatineau qui ont notamment permis à Arash Usmanee de s'émanciper. Sans encadrement digne de ce nom, le poids super-plume montréalais a néanmoins réussi à disputer un combat éliminatoire, puis de championnat du monde en 2013.
« J'avais redemandé mon permis l'année dernière pour aider Martine [Valières-Bisson] mais elle est malheureusement aux prises avec un cancer. J'ai quand même décidé d'aller de l'avant parce qu'il y a de la très bonne boxe à présenter avec tous ces athlètes qui ne sont présentement pas sous contrat avec un promoteur », a expliqué Bernèche en entrevue téléphonique avec RDS.ca.
Il cite notamment Jean Gardy François, qui est inactif depuis plus d'un an et qui devait être la tête d'affiche de l'événement du 14 décembre avant de devoir déclarer forfait en raison d'une blessure. Sept ou huit duels devraient être présentés et permettront ainsi à Mathilde Barailler et Zacharie Loiseau de se battre une première fois devant les leurs. Sophie Legrand et deux ou trois autres pugilistes auront quant à eux l'occasion d'effectuer leurs débuts chez les professionnels.
Pour le moment, le promoteur refuse de voir à trop long terme et espère essentiellement ne pas perdre d'argent avec ce gala présenté dans une ambiance particulièrement intime. Au final, il ne veut pas conquérir le marché, mais simplement donner ce coup de pouce que certains espèrent.
« Vu que ce n'est pas mon occupation première, je vais y aller avec le flow, précise Bernèche. À l'époque, j'avais complètement arrêté parce que Camille Estephan était arrivé dans le marché et il avait mis beaucoup de boxeurs sous contrat. Les indépendants n'avaient plus besoin de moi.
« Pour la sécurité financière, c'est toujours préférable d'avoir un promoteur derrière. Camille a été particulièrement créatif pendant la pandémie en organisant des galas au Mexique, mais pour tous les autres qui n'étaient pas sous contrat avec lui, ce n'était pas super évident de trouver des combats. Il faut avoir des contacts et c'est ce que j'offre. Je suis vraiment là pour les soutenir. »
Mais pourquoi se donner tout ce trouble? Fondamentalement parce que Bernèche est d'avis qu'il ne manque grand-chose pour que l'industrie qu'il chérit tant revive ses plus beaux jours. « Il faut juste se donner la peine de trouver cet ou cette athlète qui fera courir les foules, conclut-il. Il y a trop de monde qui aime la boxe au Québec pour que le marché tombe complètement à plat.
« Un gars comme Steven Butler est parvenu à attirer entre 4000 et 5000 personnes au Centre Bell pour son combat contre Brandon Cook et cela ne fait pas 100 ans. Simon Kean a aussi son public. Les gens aiment les gagnants, ce n'est pas pour rien qu'ils avaient adopté Lucian Bute. »