Le nouveau défi de Vincent Auclair
Quand Vincent Auclair a songé à la possibilité de poser sa candidature pour devenir le prochain entraîneur-chef de l'équipe canadienne de boxe amateur, le jeune trentenaire était tenaillé par l'idée de laisser derrière lui tout ce qu'il était parvenu à ériger en quelques années seulement.
Entraîneur de boxeurs professionnels (Simon Kean, Thomas Chabot et Luis Santana notamment), Auclair était également à la tête du club de boxe Pound 4 pound, qui a été choisi « meilleur club » par la Fédération québécoise de boxe olympique pour une deuxième année de suite en 2023.
« J'étais 100 pour cent déchiré. J'avais travaillé des heures et des heures pour me bâtir un nom et en arriver à un point où je misais sur une belle équipe amateur et professionnelle, a expliqué Auclair pendant un long et généreux entretien téléphonique avec RDS.ca. C'était assez stressant.
« Mais j'ai consulté beaucoup de monde : [les entraîneurs] Marc Ramsay et Rénald Boisvert, etc. Ils m'ont aidé à voir toutes les opportunités qui s'offraient à moi. Marc m'a vanté la possibilité d'avoir quelque chose de stable financièrement, ne plus avoir à courir après les petits chèques. »
« De toutes mes années dans le monde de la boxe, c'est avec l'équipe nationale que j'ai le plus appris », avait précédemment confié Ramsay à RDS.ca en marge d'un gala tenu dernièrement à Montréal. Venant de celui qui a mené Jean Pascal, David Lemieux, Artur Beterbiev, Eleider Alvarez et Oscar Rivas à la conquête de titres mondiaux chez les pros, il y a matière à réflexion...
Ainsi, au terme d'un processus d'embauche mené après une profonde réorganisation à Boxe Canada, Auclair a été nommé coentraîneur-chef l'automne dernier. L'ancien Olympien Samir El Mais a aussi hérité du même titre, alors que Kraig Devlin est quant à lui devenu directeur de la haute performance, après avoir occupé les mêmes fonctions à Karaté Canada pendant trois ans.
Le trio s'est donné comme mission de redonner ses lettres de noblesse à une organisation qui a été mise à mal en raison d'allégations de culture toxique, de favoritisme et de climat de peur qui ont mené à la démission de l'ancien directeur de la haute performance Daniel Trépanier en mai 2022. Évidemment, il ne s'agit pas d'une mince tâche et le travail s'annonce ardu, mais stimulant.
« Ça serait illusoire de penser que les changements seront perceptibles dès [les Jeux olympiques de Paris en] 2024, a prévenu Auclair. Et ça ne viendra pas juste du coaching. Il faut générer une compétition interne : que les Championnats canadiens deviennent plus difficiles à gagner que présentement et ensuite être capable de convertir ça en résultats sur la scène internationale.
« Cela dit, il s'agit d'une occasion unique de non seulement préparer des boxeurs pour de gros combats, mais de créer une structure qui permettra de développer plus de boxeurs au Canada. Oui, je vais entraîner des boxeurs résidents, mais je vais avoir mon mot à dire sur leur sélection et leur développement. C'est un défi que je désire relever pendant de nombreuses années. »
C'est pour cette raison qu'Auclair n'était pas dans le coin de Kean quand le Trifluvien a affronté Eric Molina le 23 mars dernier au Cabaret du Casino de Montréal. Auclair aurait pu continuer d'entraîner tous ses boxeurs professionnels, sauf qu'il aurait été partout et nulle part à la fois.
« J'ai confié mes boxeurs à mon assistant Jordan Mathieu (Kean s'est cependant tourné vers Jessy Ross Thompson, NDLR) et je n'ai gardé que Santana, a révélé Auclair. [Avec mes fonctions à Boxe Canada] je ne me sentais pas en mesure d'offrir le même temps de qualité à mes boxeurs.
« Mais cela ne signifie pas que je tourne le dos à la boxe professionnelle. Je suis seulement âgé de 31 ans. Si je consacre 10 ans à ce projet, je serai encore très jeune si je décide de revenir. »
Au moment de l'entrevue, Auclair préparait ses protégés en vue d'un tournoi qui aura lieu en Finlande à compter du 13 avril, d'un camp d'entraînement en France et des qualifications pour le tournoi de boxe des Jeux panaméricains qui sera présenté du 21 au 27 octobre prochain au Chili. Marc Ramsay n'avait donc pas tort : Vincent Auclair ne manquera pas d'occasions d'apprendre.