Connor McDavid : déjà une main sur le Conn-Smythe
EDMONTON - Aux yeux de nombreux amateurs de hockey qui ne sont pas nécessairement tous des partisans des Oilers d'Edmonton, le nom de Connor McDavid devrait déjà être gravé sur le trophée Conn-Smythe.
Même que ce trophée remis au joueur le plus utile des séries aurait dû lui être remis, dès mardi, en Floride, si les Panthers avaient conclu la grande finale devant leurs partisans au lieu de laisser la série se prolonger. Avec les risques qui en découlent.
Pas si vite!
Les sorties sensationnelles d'un but et trois passes dans la victoire de 8-1 qui a permis aux Oilers d'éviter le balayage et de deux buts et quatre points dans la victoire qui a forcé la tenue d'une sixième partie qui sera disputée vendredi, à Edmonton, ramènent McDavid au plus fort de la course au trophée Conn-Smythe.
C'est tout à fait exact.
Mais si les Panthers avaient résisté aux exploits de McDavid mardi et qu'ils avaient gagné la grande finale, il est loin d'être acquis que McDavid aurait gagné. Où qu'il aurait même dû gagner.
J'ai l'honneur et le privilège d'avoir été sélectionné encore cette année au sein du groupe des 16 journalistes qui participent au scrutin.
Sur le bulletin de vote que j'ai soumis mardi – nous devons soumettre nos bulletins avec les noms de nos trois candidats avant la mi-chemin en troisième période dans chaque match potentiellement décisif, peu importe le score de cette partie – McDavid n'était pas au premier rang.
En raison des paris sportifs qui sont devenus une dangereuse plaie dans le sport en général et pas seulement dans la LNH, nous ne pouvons dévoiler l'allure du scrutin.
C'est normal. Je ne peux donc vous dire quels étaient les trois noms sur mon bulletin et l'ordre dans lequel ils étaient inscrits. Notez qu'un vote de première place vaut cinq points, un vote de deuxième place en vaut trois et qu'un point est accordé pour une troisième position. Celui qui obtient le plus de points remporte les grands honneurs.
Il est clair que les noms du capitaine Aleksander Barkov, de Matthew Tkachuk, du gardien Sergeï Bobrovsky, de Carter Verhaeghe et peut-être des excellents défenseurs Gustav Forsling ou Aaron Ekblad devaient se retrouver sur plusieurs bulletins de vote. Comme celui de McDavid cela dit.
Mais dans le cadre d'une victoire si rapide en finale de la coupe Stanley, il était impératif à mes yeux de favoriser un membre de l'équipe gagnante.
Même si McDavid affiche une récolte de 42 points? Vingt de plus que Tkachuk et 21 de plus que Barkov?
Même les si les Oilers ont une fiche de 1-4 dans les matchs ou McDavid a été blanchi, de 3-2-1 dans ceux au cours desquels il a été limité à un point, de 3-2 dans ceux de deux points et de 7-0 dans ceux où il a amassé trois points et plus?
Même si Bobrovsky lui a fait un cadeau lors du dernier match et qu'il a accordé neuf buts à ses deux dernières sorties en plus d'avoir été rappelé au banc pour y retrouver ses esprits?
Après cinq matchs : oui!
Surtout que la contribution de Sacha Barkov aux succès des Panthers est loin de s'évaluer seulement en matière de buts marqués et de points récoltés. De fait, les buts et les points dont Barkov prive ses rivaux sont même plus importants que ceux qu'il obtient.
Depuis le début des séries, il n'y a pas de joueur plus important à la cause des Panthers que leur capitaine. Malgré sa générosité des deux derniers matchs, Bobrovsky n'est pas loin derrière.
Sainte Trinité des séries
McDavid est le meilleur joueur de hockey au monde. Il est le joueur par excellence de la LNH. Un titre qu'il a confirmé lors des deux dernières parties. Et depuis le début des séries.
Le fait que le capitaine des Oilers ait déjà éclipsé le record de mentions d'aide en séries qui appartenait à Wayne Gretzky depuis 1988 – La Merveille en avait obtenu 31 alors que McDavid est rendu à 34 – et que McJesus ait assuré sa place dans la Sainte Trinité des séries alors qu'il a rejoint Wayne Gretzky et Mario Lemieux au sein du groupe des seuls joueurs ayant fracassé la barre des 40 points récoltés au cours de la « vraie saison » donnent beaucoup de poids à sa candidature.
Une candidature qui s'impose beaucoup plus maintenant que la série s'approche de la limite.
Si les Oilers réalisent l'impossible, complètent la remontée historique amorcée après avoir perdu les trois premiers matchs de la finale et ravissent des mains de leurs adversaires des Panthers une coupe Stanley qu'ils se préparaient à faire danser au bout de leurs bras, McDavid recevra le Conn-Smythe.
Comme Wayne Gretzky en 1985.
Comme Mario Lemieux en 1991.
McDavid devrait d'ailleurs, du moins à mon avis, être un choix unanime en cas de victoire des Oilers.
S'il joue encore un rôle important vendredi et éventuellement dans le cadre d'une septième partie, mais que les Panthers résistent aux assauts du capitaine Oilers et de ses coéquipiers pour finalement gagner la coupe Stanley, je ne serais pas le moindrement surpris que McDavid reçoive le Conn-Smythe des mains de Gary Bettman avant que le commissaire ne donne la coupe Stanley à Aleksander Barkov.
Ce ne serait qu'une mince consolation pour McDavid et les partisans des Oilers. Mais ce serait tout de même une belle consolation.
Car McDavid deviendrait le sixième seulement dans l'histoire de la LNH à recevoir le Conn-Smythe dans une cause perdante. Même que derrière les gardiens Roger Crozier (Detroit en 1966), Glenn Hall (St.Louis en 1968), Ron Hextall (Philadelphie en 1987) et Jean-Sébastien Giguère (Anaheim en 2003), il deviendrait le deuxième patineur, après Reggie Leach en 1976 avec les Flyers de Philadelphie, à recevoir un tel honneur.
Et en passant, par souci de transparence, Leach a reçu le Conn-Smythe en 1976 malgré le fait que le Canadien avait balayé les Flyers. Ce qui donne moins de poids à ma prétention selon laquelle, McDavid aurait dû être écarté si les Panthers avaient gagné la finale de manière expéditive.
J'en conviens.
Barkov, Bobrovsky, Tkachuk?
Mais si Barkov arrive à freiner, voire à museler McDavid dans le cadre d'une victoire vendredi soir?
Si Bobrovsky rachète le mauvais but accordé à McDavid lundi soir et s'impose devant lui en échappée, qu'il lui vole un, deux, trois buts, ou qu'il blanchit les Oilers au terme d'une sortie de 35 arrêts dont 12 à 15 magistraux pas juste aux dépens de McDavid, mais aussi des autres tireurs élites d'Edmonton.
Si Tkachuk complète un tour du chapeau pour offrir aux Panthers la première conquête de la coupe Stanley de leur histoire?
Est-ce que l'un de ces noms pourrait venir se glisser devant celui de McDavid?
C'est possible.
L'an dernier, à Las Vegas, il n'y avait aucun suspense quant à l'identité du club qui allait soulever la coupe Stanley. Les Golden Knights étaient tout simplement trop forts pour que les Panthers – épuisés au terme d'une fin de saison et de séries très difficiles – puissent rivaliser.
Mais les débats étaient vifs quant à l'identité du joueur des Knights qui obtiendrait le Conn-Smythe. Plusieurs journalistes – je faisais partie du groupe – avaient attendu vraiment jusqu'à la dernière minute avant de soumettre leur vote – on peut aussi ajouter des scénarios susceptibles de se produire en fin de match pour ajuster nos votes en conséquence – tant la course entre Jonathan Marchessault et Jack Eichel était serrée.
Alors s'il est juste et justifié de considérer que Connor McDavid a déjà une main sur le Conn-Smythe, il faut quand même garder l'esprit ouvert et reconnaître qu'en cas de victoire de la Floride, un joueur des Panthers pourrait venir lui ravir.
Cela dit, le seul trophée qui intéresse McDavid est la coupe Stanley. Une coupe dont il n'a pas besoin pour assurer sa place de choix dans l'histoire de la LNH, mais une coupe qu'il mérite tout de même amplement.
Et si McDavid se rend à la coupe, le Conn-Smythe viendra en prime.