Au coeur d'un match mémorable

Il y a une dizaine de jours, j'étais à Toronto avec l'équipe nationale, où nous nous sommes qualifiées pour les Jeux olympiques de Paris à la suite de deux victoires contre la Jamaïque. Ce fut une trêve internationale mouvementée, notre camp de 10 jours commençant à Miami, pour ensuite nous amener en Jamaïque le temps d'un match et se terminer à Toronto. 

Trois jours après mon retour à Washington, c'était un des matchs les plus importants de notre saison NWSL qui m'attendait. Avec seulement 3 points récoltés au cours des 7 derniers matchs de saison régulière, notre match de samedi dernier était crucial. En sixième position (dernière position ayant accès aux séries) et à 1 point de la septième et huitième position, nous n'avions d'autre option que de gagner ce match pour rester en contrôle de nos chances de participer aux séries éliminatoires. En voici plus sur ce match qui a gardé les partisans au bout de leur chaise jusqu'à la dernière minute. 

Ce sont plus de 11 000 personnes qui se sont déplacées au Audi Field pour nous voir affronter le Kansas City Current. Fait intéressant, mais quelque peu déprimant, c'est la dernière équipe que nous avons battue en saison régulière. Une victoire remontant au mois de juin. Notre place en série étant en jeu, il serait normal que l'énergie dans le vestiaire soit tendue. Et pourtant, elle ne l'est pas du tout. Il y a une confiance collective, une détermination qui indique qu'en soirée, ce n'était pas le match qui symbolisait le clou dans notre cercueil. 

Le début du match se joue à un rythme élevé. Notre pression haute sur le terrain nous offre quelques très bonnes chances de marquer sur transition. De leur côté, les joueuses de Kansas City se montrent également dangereuses. Autour de la 20e minute, une attaquante de Kansas se fait trébucher dans notre zone de réparation.

Penalty. 
But. 

C'est un but difficile à avaler pour nous, le quatrième match de suite que nous encaissons en premier. Mais nous ne pouvons pas baisser les bras, c'est notre saison qui est en jeu. 

Il faudra attendre le début de la seconde mi-temps pour enfin trouver le fond du filet de Kansas. Un laser d'Ouleye sur corner. Nous sommes de retour dans la partie, mais une nulle ne suffira pas pour nous garder au-dessus de la ligne des séries éliminatoires. Il faut à tout prix gagner. Alors que la 90e minute approche, j'ai un bon sentiment face au dénouement du match. Je suis confiante que nous allons réussir à marquer avant la fin de la partie. 

Le quatrième officiel annonce 4 minutes de temps additionnel. Deux minutes plus tard, je reçois le ballon sur la ligne de touche. L'attaquante adverse approchant à une vitesse alarmante, je prends ma première touche vers notre but, puis, alors qu'elle pense pouvoir intercepter une passe en retrait, je prends ma seconde touche à 180 degrés avec mon extérieur de pied, me propulsant vers l'avant et la laissant derrière moi. Devant moi, je vois Trinity Rodman faire un appel en profondeur. Instinctivement, je lui envoie une balle enroulée entre deux défenseurs. « Trin » bat ses défenseurs et arrive première au ballon, en échappée. Son angle au but n'est pas idéal, mais sa finition impeccable lui permet de trouver le fond du filet. 

C'est l'euphorie totale dans le stade, les partisans se déchaînent dans les gradins, et nous accourons célébrer avec « Trin » à côté du but adverse. Trois minutes plus tard, l'arbitre siffle trois coups pour indiquer la fin du match. Une victoire de dernière minute qui nous fait énormément de bien, autant du côté du classement que pour le moral. 

Ce sont des moments comme celui-ci qui prouvent que les déceptions et les coups plus difficiles en valent la peine. Après une série de matchs nuls et de défaites, plusieurs d'entre nous avaient oublié le sentiment accompagnant une victoire, surtout une victoire importante comme celle-ci. 

Pouvoir partager cette joie avec les 11 000 fans présents, qui eux aussi ont dû ressentir la déception des derniers mois, fut une expérience mémorable pour nous.