MONTRÉAL – Le match de samedi dernier contre le Crew de Columbus a été un vrai cauchemar pour la défensive de l’Impact, mais personne ne l’a trouvé plus pénible qu’Ambroise Oyongo.

La veille de la rencontre, Oyongo a été terrassé par l’annonce du décès de Patrick Ekeng, un milieu de terrain camerounais qui a succombé à un apparent malaise cardiaque au beau milieu d’un match du championnat roumain.

« J’ai passé toute une nuit blanche à pleurer, racontait Oyongo jeudi. C’était mon ami, on était très proche. Pour moi, vraiment, ça a été très difficile. »

Oyongo était quelque part entre Montréal et l’Ohio quand Ekeng, un membre du Dinamo Bucarest, est entré dans la rencontre que son équipe disputait au Viitorul Constanta à la 62e minute. Sept minutes plus tard, il s’effondrait sur le terrain. Les manœuvres de réanimation effectuées à l’hôpital où il a été transporté en ambulance n’ont pu le sauver. Il était âgé de 26 ans.

Dans les jours suivants la tragédie, le ministre de l’intérieur roumain a suspendu le permis de la compagnie privée qui opérait les ambulances stationnées au stade ce soir-là. Certains véhicules étaient apparemment équipés de défibrillateurs dont les batteries étaient expirées et de médicaments périmés.

Atterré, Oyongo a néanmoins insisté pour garder sa place dans la formation de l’Impact le lendemain.

« Avant le match, j’avais des maux de tête parce que je n’avais pas dormi. Le médecin m’a donné des remontants pour que je puisse jouer. Quand je suis entré sur le terrain, Laurent [Ciman] m’a dit : ‘Vas-y pour ton ami, gagne ce match pour ton ami’. Quand nous sommes revenus à quatre buts partout pour faire match nul, moi je me suis dit que c’était une victoire et ça m’a fait plaisir. Ça m’a fait un peu oublier le décès de mon camarade. »

Oyongo raconte qu’il s’était lié d’amitié avec Patrick Ekeng il y a une dizaine d’années. Les deux garçons se connaissaient déjà lorsque Ekeng est devenu coéquipier du frère aîné d’Oyongo au FC Canon, au Cameroun, en 2008.

Les deux copains se sont vus pour la dernière fois en décembre dernier.

« C’était un gars bien, qui aimait son travail, qui aimait aussi les intrigues. Je me rappelle que souvent, quand on se retrouvait en sélection, j’essayais de faire des intrigues et il me disait à la blague : ‘Moi je suis l’ami de ton grand frère, je ne suis pas ton ami’. Quand je me rappelle de tout ça, ça me fait vraiment mal. »

À l’entraînement, jeudi, Oyongo affichait le même air taquin et le même sourire espiègle qui sont devenus sa marque de commerce depuis qu’il s’est joint à l’Impact la saison dernière. Joueur de tour à ses heures, il n’a pu quitter le terrain sans aller soutirer, en douce, un ballon sur lequel s’appuyait Victor Cabrera à la toute fin de la séance. Quelques minutes plus tard, il allait lui-même devenir la victime du sens de l’humour de Johan Venegas et Lucas Ontivero, trop heureux de pouvoir rendre la monnaie de sa pièce au Camerounais pendant que celui-ci était retenu par la caméra.

Cette semaine plus que jamais, le soccer est un baume nécessaire dans la vie d’Ambroise Oyongo.

« Le football, c’est un jeu, on s’amuse. Il y a souvent des choses qui arrivent, qui sont difficiles à supporter, mais voilà, c’est la vie. Il faut oublier ça et continuer à vivre comme on en a l’habitude. Mon ami est parti. Je ne suis pas au Cameroun pour pouvoir aller à ses obsèques, mais j’ai envoyé des gens me représenter. Je pense qu’ils le feront bien et ça pourra rendre un grand hommage à mon ami. »

« Un de nos meilleurs » à Columbus

On pourrait pardonner à Oyongo d’avoir eu la tête ailleurs à Columbus. Ça semblait d’ailleurs être le cas sur le premier but du Crew ainsi que sur la séquence qui a mené au fameux penalty tiré par Federico Higuain. Chaque fois, un mauvais positionnement du défenseur a placé Marco Donadel en position précaire sur le flanc droit.

Mais l’entraîneur-chef Mauro Biello s’est dit comblé par la tenue de son défenseur latéral.

« Au dernier match, je pense qu’il a été l’un de nos meilleurs joueurs dans les deux sens du terrain. Défensivement, il a bien fait, surtout en deuxième demie. C’est sûr qu’il a raté trois ou quatre matchs, mais tranquillement, il retrouve son rythme. Surtout que ce n’est pas toujours facile pour lui sur la droite, mais il fait quand même bien son travail. »

Oyongo, qui a débuté les quatre derniers matchs de l’Impact après avoir soigné une blessure à un genou, se dit satisfait de son rendement à sa deuxième saison à Montréal. Il admet toutefois que l’absence de stabilité en défensive – Hassoun Camara, Donny Toia et Victor Cabrera ont aussi passé du temps à l’infirmerie – rend difficile cette quête de cohésion près du filet d’Evan Bush.

« Prenez une ligne défensive que vous essayez d’utiliser pendant, disons, un mois. Tous les jours vous êtes ensemble, vous jouez ensemble… il y a des erreurs que vous n’allez plus commettre. Mais là avec les blessures, on essaie toujours de faire une rotation et c’est difficile. Bientôt, tout le monde sera là et on va essayer de former une équipe solide, autant défensivement qu’offensivement. »