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RÉSULTATS

La nouvelle normalité de Moïse Bombito

Moïse Bombito Moïse Bombito. - Getty
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MONTRÉAL – Le souvenir est surréaliste. En février 2023, Moïse Bombito donne l'une de ses premières entrevues depuis qu'il a été repêché, à sa grande surprise, par les Rapids du Colorado. « Je ne le réalise pas encore », s'exclame-t-il dans toute sa candeur.

En rétrospective, cette incrédulité peut sembler artificielle tellement elle ne colle pas à tout ce qui a déboulé depuis dans la vie du défenseur québécois. Après cette conversation avec RDS, Bombito est devenu titulaire avec les Rapids, a été recruté par l'équipe nationale canadienne, a tiré son épingle du jeu à la Copa América, a été courtisé par des clubs européens et a été invité au match des étoiles de la MLS.

Le panache avec lequel il est sorti de l'anonymat n'a d'égal que la vitesse à laquelle il est réputé pour se lancer à la poursuite des attaquants adverses.  

Le succès n'a pas complètement corrompu la capacité d'émerveillement de Bombito. Il parle par exemple avec nostalgie de la demi-finale de la Copa América, un match qu'il a joué devant 80 000 spectateurs et qui lui a donné la chance « d'expérimenter Messi » pour la troisième fois. « Je vais être honnête avec toi, c'est un moment où j'ai été gravement choqué », avouera-t-il avec la bonhommie qu'on lui connaît.

Mais inévitablement, la succession d'accomplissements et de récompenses lui a planté les deux pieds sur terre et l'a dépouillé de la belle naïveté qu'il avait transportée avec lui dans le monde du soccer professionnel.

Plus personne n'est surpris de voir le nom de Moïse Bombito apparaître dans les plus grands événements. Et lui aussi a fini par s'y habituer.

« C'est pas pour être cocky, mais là je me suis vraiment posé, j'ai respiré, relativise le volubile Montréalais. J'ai vraiment pris conscience que ça va être mon quotidien jusqu'à peut-être mes 35, 36 ans. Je dois faire avec! Si je veux être au top à mon âge, c'est ce genre de truc-là qui va se passer. »

L'accession à un nouveau statut a nécessité des ajustements pour celui qui, il y a à peine quatre ans, jouait encore dans une ligue semi-professionnelle au Québec. Certains ont déjà été bien assimilés. Au quotidien, Bombito a adhéré aux grands classiques souvent négligés par les recrues : nutrition, hydratation, sommeil. La base, quoi.

Sur le terrain, son ascension l'a fait passer du petit jeune qu'on croit pouvoir facilement exploiter au pilier indiscutable pour lequel on arrive doublement préparé. Sa confiance en ses moyens a dû gonfler au même rythme que sa marge d'erreur flétrissait.

« Ouais, je suis conscient que maintenant, j'ai quand même un petit nom dans cette ligue et les attaquants ne me prennent plus à la légère, acquiesce-t-il. Tous les matchs sont différents, je vois différents types d'adversaires. Il y en a qui viennent chercher un peu plus le ballon au milieu du terrain où je dois peut-être faire attention et couvrir derrière s'il y en a qui sont un peu plus rapides.

Même si je suis quelqu'un qui est athlétique et qui peut courir derrière, c'est pas pour autant qu'ils vont arrêter de me challenger sur ça. »

Se dépêcher à prendre son temps

Gagner ses épaulettes en MLS, c'est une chose. À la Copa América, Bombito a goûté à la reconnaissance globale. La défense centrale canadienne, identifiée comme l'une des valeurs incertaines de l'équipe dans les bilans qui avaient émergé de la dernière Coupe du monde, a rassuré grâce au duo qu'il complétait avec Derek Cornelius.  

« Personnellement, je pense que j'ai fait un beau tournoi, dit celui qui a atteint la douzaine de mandats internationaux. C'est sûr qu'il y a des choses que je dois clairement améliorer, mais j'ai l'impression que ça va se faire avec le temps, avec l'expérience, avec plus de matchs. Donc je ne suis pas vraiment inquiet. En terme de répondant, je pense que j'ai répondu présent. »

Les prochaines étapes arriveront rapidement. Dans deux ans, à moins d'une malchance, Bombito chantera l'hymne national de son pays à la Coupe du monde. Mais avant d'en arriver là, sa vie en club risque d'avoir changé drastiquement.

Dans les dernières semaines, son nom a été associé à des rumeurs de transfert en Europe. L'Olympique de Lyon est le club qui semble s'être le plus amouraché de son potentiel. Une première offre aurait été faite aux Rapids, qui désirerait toutefois faire monter les enchères avant de sacrifier sa pépite.

En entrevue, Bombito ne confirme rien, mais ne fait certainement rien pour étouffer les rumeurs.

« Je ne peux pas vraiment rentrer dans les détails, lâche-t-il en souriant, mais c'est certainement quelque chose qu'il faut envisager. À ce stade de ma carrière, c'est un bond que j'ai envie de faire, que j'envisage de faire. Bien évidemment, il n'en tient pas qu'à moi. Il y a les dirigeants au Colorado, les dirigeants des clubs en France qui me veulent. Il y a Lyon qui a beaucoup d'intérêt, bien évidemment. Il faut que les clubs arrivent à trouver un terrain d'entente, comme je l'ai dit. Après, ouais, si ça marche ça marche, moi je suis partant. »

Même s'il n'a qu'une saison et demie d'expérience dans les rangs professionnels, le charismatique gentilhomme assure être prêt à faire le saut. D'autres, comme Ismaël Koné, l'ont fait avant lui avec brio. Et à 24 ans, il se dit que le train pourrait ne pas repasser une seconde fois s'il hésite à y embarquer.  

« Après, il faut juste se dire que c'est avec l'expérience que ça va arriver. Que je sois en MLS, que je sois en Ligue 1, que je sois en Premier League, tout ce qui va faire en sorte que je vais performer, c'est le temps d'adaptation. Et ça je pense que c'est quelque chose que j'arrive à faire vraiment rapidement, comme je l'ai déjà montré. C'est sûr qu'il va y avoir des erreurs dans le parcours, il y aura des moments où tu vas sentir que ça ne va pas. Mais pour moi le plus important, c'est de continuer à travailler, continuer à croire que si t'es là, c'est pour une raison. C'est pas parce que ça ne se passe pas bien dans les premières semaines, dans les premiers mois que c'est la fin du monde. Il faut se dire que c'est le temps que ça va prendre et après, quand tu vas être prêt, tu vas partir », dit-il en mimant un avion qui décolle.

Le sentiment d'imposteur n'est plus perceptible dans le vocabulaire de Moïse Bombito. Dix-huit mois après son premier camp pro, il n'est toujours pas convaincu qu'il se trouve au bon endroit. Mais cette fois, c'est parce qu'il sait qu'il peut viser encore plus haut.