ZURICH - La fin est venue abruptement pour Sepp Blatter, quelques jours seulement après qu'il eut semblé solidifier son emprise sur la FIFA.

L'homme de 79 ans avait défié l'animosité mondiale en étant reporté pour la cinquième fois à la présidence du sport le plus populaire de la planète la semaine dernière. Mais sa réélection n'a fait qu'accroître la pression venant de ses collègues, des commanditaires, des athlètes et des amateurs, pour que Blatter démissionne.

Au cours d'une conférence de presse organisée à la hâte, Blatter a annoncé qu'il quitterait son poste d'ici quelques mois et a promis de nouvelles élections pour lui choisir un successeur.

« La FIFA est ce que j'ai de plus précieux et tout ce que je veux c'est de faire ce qui est le mieux pour elle et pour le soccer », a déclaré Blatter, qui pourrait toujours être la cible des enquêteurs américains qui fouillent actuellement des décennies de fraudes et de corruption alléguées de la part de dirigeants de la fédération.

Après plusieurs générations passées sous Blatter et son mentor, Joao Havelange, cette annonce laisse la FIFA sans leader et sans direction claire. Elle annonce également une lutte à l'échelle planétaire pour le contrôle de l'organisation, tandis qu'elle fait toujours l'objet d'enquêtes criminelles.

Blatter, l'air fatigué et très sérieux, a lu une déclaration en français longue de six minutes avant de quitter sans répondre aux questions.

Dans la même salle, samedi, Blatter s'était montré défiant et combatif en répondant aux questions ayant trait à la réputation entachée de la FIFA et à la possibilité qu'il soit lui-même arrêté. Son humeur avait toutefois changé au cours des 24 dernières heures avant son allocution, a déclaré son attaché, Walter Gagg, à l'Associated Press.

« Nous savons qu'au cours des dernières 48 heures, il pensait à l'avenir. Peut-être ce qui s'est passé dans les dernières heures l'a convaincu, a dit Gagg en référence aux allégations de malversations à l'endroit de Jérôme Valcke, le secrétaire général de la FIFA. Nous avons dîné ensemble lundi. Il était clame. J'ai eu une rencontre avec lui en matinée, puis les informations en provenance des États-Unis sont survenues. »

L'étau s'est resserré sur Blatter

La saga sud-africaine risque de ternir toute la campagne, appuyée par Nelson Mandela, présent à Zurich pour le vote final en 2004. Cette Coupe du monde de 2010 avait renforcé la réputation de Blatter en Afrique, continent qui a voté tout d'un bloc pour lui, vendredi.

Toute la vigueur démontrée par Blatter à la suite de sa victoire de 133 voix contre 73 contre Ali ben al-Hussein, était disparue mardi.

« Ce mandat ne semble pas être soutenu par tout le monde dans le monde du soccer, a souligné Blatter. Je vais assumer mes fonctions jusqu'à la prochaine élection. [...] La FIFA a besoin d'une profonde restructuration. »

L'élection aura lieu entre les mois de décembre 2015 et de mars 2016s. Al-Hussein n'a pas voulu dire s'il allait se représenter.

Au Canada, le président de l'Association canadienne de soccer, Victor Montagliani, a salué la décision de Blatter, ajoutant que le changement était devenu nécessaire. Il ne croit pas que ce scandale jettera ombrage à la Coupe du monde féminine, qui sera lancée samedi au pays.

Michel Platini, président de l'UEFA, avait demandé la démission de Blatter avant l'élection, ce que ce dernier avait refusé de faire. Mardi, il a aussi applaudi la décision du Suisse de quitter.

« Il s'agit d'une décision difficile, brave et juste », a indiqué l'ancien protégé de Blatter, qui avait prévu une réunion de l'UEFA pour discuter de stratégies anti-Blatter plus tard cette semaine. Il pourrait maintenant songer à le remplacer.

Blatter s'est joint à la FIFA en 1975 à titre de directeur technique aux projets de développement avant d'être promu secrétaire général en 1981. Il a passé 17 ans à titre de bras droit à Havelange avant d'être élu à la présidence après le départ du Brésilien.

D'autres arrestations à prévoir

Les prochains mois pourraient donner lieu à de plus amples arrestations dans le cadre des enquêtes pour corruption.

Le Département de la Justice américain a accusé 14 personnes la semaine dernière, dont sept ont été arrêtées en Suisse. Le département a refusé de commenter la décision de Blatter. Le procureur général de la Suisse a quant à lui déclaré que Blatter ne faisait pas l'objet d'une enquête dans son pays. Les autorités ont cependant avoué la semaine dernière avoir lancé une enquête criminelle sur l'attribution des Coupes du monde de 2018 et 2022, à la Russie et au Qatar.