Texte tiré du site Bulletin sportif, blogue spécialisé dans le sport étudiant

Le hockey est ce qu’il aime le plus faire dans la vie. Il est persuadé qu’il pourra encore évoluer au niveau professionnel. Mais pour le moment, il termine son baccalauréat en économie à l’Université McGill. Portrait d’un joueur de hockey très talentueux qui a choisi de passer par McGill avant de poursuivre sa carrière, Nikolas Brouillard.

Nommé défenseur par excellence au hockey universitaire canadien après la dernière saison, le #16 de l’équipe de McGill pourrait très bien évoluer chez les pros quelque part en Amérique du Nord. Toutefois, parce qu’il voulait jouer en sachant qu’un diplôme universitaire lui servirait de coussin, il a passé les trois dernières années sur les bancs de l’Université McGill.

Comme bien des jeunes d’ici, Nikolas a grandi avec des patins dans les pieds. Dès l’âge de 3-4 ans, il a voulu imiter son frère aîné Marc-Olivier et jouer au hockey. Il a amorcé son cheminement dans sa ville natale, Saint-Hilaire en Montérégie. Évoluant pour les Éclaireurs du Richelieu jusqu’à l’âge de 12 ans, il a ensuite été inscrit au programme de sports-études du collège Antoine-Girouard située à Saint-Hyacinthe de secondaire 1 à secondaire 4. Cette dernière année, à l’âge de 15 ans seulement, il a percé la formation de l’équipe midget AAA des Gaulois et a complété la saison avec 22 points en 42 matchs pour le premier rang des défenseurs de son équipe.

Tout au long de ce parcours, l’école était une priorité. « Mes parents étaient tous les deux directeurs d’école. Inutile de dire que l’école était importante. En même temps, j’avais beaucoup de facilité alors ce n’était pas un problème », se remémore Nikolas.

À la fin de sa première saison midget, Nikolas est repêché par les Voltigeurs de Drummondville de la LHJMQ en 4e ronde. Après un bon camp d’entraînement et profitant notamment d’une blessure à un joueur de 20 ans, Nikolas déjoue les pronostics en gagnant la confiance de l’entraîneur Mario Duhamel. Comble du bonheur, Nikolas y rejoint son frère qui porte lui aussi les couleurs des Voltigeurs.

À sa première saison junior à l’âge de 16 ans, il est encore au secondaire. Inscrit au collège St-Bernard et avec l’aide de professeurs privés, il a obtenu son diplôme. Côté hockey, les choses se passent plutôt bien pour Nikolas qui termine premier chez les défenseurs de son équipe avec 25 points. Son travail lui vaut d’être nommé sur l’équipe d’étoiles des recrues du circuit Courteau en compagnie de Zachary Fucale, Samuel Morin, Anthony Duclair, Mikhaïl Grigorenko et Sven Andrighetto. Toutefois, les Voltigeurs cumulent 65 points au classement pour le 12e rang sur 17 équipes. Ils sont éliminés en 4 matchs par les Remparts de Québec.

La deuxième année avec les Voltigeurs fut particulière. « C’était mon année de repêchage pour la LNH. J’ai mis beaucoup d’emphase là-dessus. Si mes résultats sur la patinoire étaient bons, à l’école ça a été un peu différent. J’ai coulé 3 cours sur 4 à ma première session au cégep de Drummondville. Mes parents ont eu une très bonne discussion avec moi et ça s’est replacé par la suite. À partir de là, j’ai toujours mis le temps nécessaire pour passer mes cours », nous explique-t-il.

D’ailleurs, parlant de l’encadrement scolaire durant sa carrière junior, Nikolas mentionne : « J’ai joué au sein de trois équipes où il y avait des gens dédiés à aider encadrer les étudiants. Je ne sais pas comment ça marche ailleurs, mais ça prend tout de même de la motivation personnelle. L’aide est là, mais personne ne te force. »

Après avoir amassé 57 points en 68 matchs, Brouillard était classé au 99e rang des patineurs nord-américains par la Centrale de recrutement de la LNH à la veille de la séance de repêchage 2013. Ses espoirs d’être sélectionnés étaient plus que légitimes. « J’avais autant de points que Seth Jones et Tony DeAngelo qui sont sortis en 1re ronde, donc je savais que j’avais mes chances. » Toutefois, ses lacunes en défensive et sa charpente (5’11, 170 lbs) ont semblé refroidir les recruteurs. Dès la séance terminée, il a reçu une invitation pour le camp des Sharks de San Jose. De plus, il a participé au camp de développement des Canadiens de Montréal. Tout n’était donc pas perdu. Nikolas savait qu’il aurait sa chance de jouer au niveau professionnel.

Sa belle saison 2012-2013 lui a valu une invitation au camp de développement des Canadiens de Montréal

La troisième saison de Nikolas à Drummondville a démontré sa progression. Avec 61 points en 68 matchs, il a terminé au 2e rang des compteurs des Voltigeurs qui passaient la 1re ronde des séries pour la première fois depuis son arrivée. Durant la saison, les Voltigeurs avaient conclu une transaction avec les Remparts de Québec qui incluait un choix de première ronde. Nikolas a appris durant la saison que ce choix serait remplacé par lui. Ainsi, après la campagne, il est devenu officiellement un membre des Remparts de Québec, eux qui allaient accueillir la coupe Memorial.

Durant l’été, Nikolas a été invité au camp des Jets de Winnipeg. N’ayant pas réussi à obtenir un contrat, il s’est donc installé à Québec et s’est inscrit au cégep de Limoilou pour continuer son parcours scolaire en plus d’avoir quelques cours via Cégep à distance. « C’est très pratique le cégep à distance parce que mes professeurs ne comprenaient pas toujours ma réalité. Lorsqu’il y avait des conflits d’horaire pour les examens, certains me disaient de ne pas aller jouer mes matchs. Je ne pouvais évidemment pas faire ça. »

Au camp des Jets de Winnipeg, il a l’occasion d’affronter Johnny Gaudreau des Flames de Calgary

La saison 2014-2015 à Québec a été à la hauteur des attentes. Les Remparts ont pris le 4e rang du circuit en saison régulière et Nikolas, fort d’une production de 57 points en 61 matchs, a été élu sur la 2e équipe d’étoiles de la LHJMQ. Les Remparts se sont rendus en grande finale face à l’Océanic de Rimouski. « On avait une très bonne équipe avec les Erne, Timashov, Graves et Duclair. Ça a été la meilleure série à laquelle j’ai participé dans ma vie. Malheureusement, on a perdu en 3e prolongation du 7e match », nous raconte Nikolas.

À la Coupe Memorial, les Remparts, tout comme l’Océanic et les Rockets de Kelowna, ont terminé avec une fiche de 1-2. les deux représentants de la LHJMQ ont dû s’affronter dans un match de bris d’égalité et les Remparts ont eu le dessus 5-2. Le match suivant fut une toute autre histoire alors que les Rockets de Kelowna, menés par Leon Draisaitl et Josh Morrissey, les ont rossés 9-3. Kelowna s'est ensuite incliné face à Oshawa en finale qui a ainsi remporté le titre de meilleure équipe junior au Canada en 2015.

Nikolas Brouillard s'amène à Rouyn-Noranda – Huskies de Rouyn-Noranda

Après cette saison haute en émotions, Nikolas a reçu une invitation pour participer au camp des Maple Leafs de Toronto. Au journaliste Guillaume Piedboeuf du Soleil, il avait alors mentionné : «C’est sûr que j’aimerais rester dans la Ligue américaine. Je préférerais un contrat d’entrée dans la LNH, mais je signerais volontiers un pacte avec les Marlies. » Il n’a toutefois pas obtenu de contrat et il est revenu pour une dernière saison dans le circuit Courteau. Et il lui restait 10 cours à passer pour obtenir son DEC.

Les Remparts venaient de mettre fin à un cycle et l’équipe n’était plus la même en ce début de saison 2015-2016. Des rumeurs circulaient à propos de Nikolas. Les équipes favorites allaient vouloir mettre la main sur un des meilleurs défenseurs offensifs de la ligue. À la fin du mois de décembre, la rumeur s’est avérée et Nikolas a été échangé aux puissants Huskies de Rouyn-Noranda. Après avoir obtenu 32 points en 23 matchs à Québec, il en a amassé 27 autres en 31 matchs avec l’équipe abitibienne. Il les a ainsi aidés à terminer au premier rang du circuit et à remporter la coupe du Président, en route vers une autre participation à la Coupe Memorial.

À sa 5e année dans la LHJMQ, Nikolas soulève la coupe du Président

Lors du tournoi disputé à Red Deer, les Huskies ont connu un départ couci-couça avec une victoire et deux défaites en ronde préliminaire. C’était malgré tout suffisant pour se qualifier pour la demi-finale face à l’équipe hôtesse, les Rebels, qu’ils ont vaincus 3-1. Pour son dernier match junior en carrière, Nikolas allait affronter la grosse machine des Knights de London menée par Mitch Marner, Matthew Tkachuk, Christian Dvorak et Olli Juolevi en grande finale.

Menant 2-1 avec un peu plus de 4 minutes à jouer en 3e période, Nikolas et les Huskies avaient raison de croire en leurs chances. Mais Dvorak a marqué en fin de 3e, puis Tkachuk en prolongation et ce fut la fin du rêve. « Quelle déception! Passer aussi proche après tant d’efforts. Elle a été dure à avaler celle-là », se souvient Nikolas.

Le lendemain de la finale perdue, le 30 mai 2016, le journaliste Mikaël Lalancette annonçait sur les réseaux sociaux que Nikolas Brouillard s’était entendu avec les Marlies de Toronto pour un contrat à un volet de la Ligue américaine. Il allait donc jouer pro la saison suivante.

Avec les Marlies dans la Ligue américaine de hockey

C’est finalement avec les Solar Bears d’Orlando dans la ECHL que Nikolas a amorcé sa carrière. Après un début plus qu’intéressant avec 21 points en 39 matchs, il a été rappelé par les Marlies. Il n’aura finalement joué qu’un seul match avant de subir une blessure qui l’a forcé à se poser des questions sur son avenir.

« J’avais plusieurs de mes coéquipiers avec les Solar Bears qui sortaient de la NCAA et qui avaient un diplôme universitaire en poche. La situation était moins stressante pour eux parce qu’ils savaient que si leur carrière devait se terminer, il avaient des options. »

Après avoir complété à distance les deux cours qui manquaient pour son DEC, Nikolas a envisagé la possibilité d’aller faire un bac. « La règle universitaire au Canada est que si on joue au niveau professionnel après le 31 décembre d’une année, il faut attendre une année complète de calendrier pour pouvoir jouer la saison suivante. Je me suis blessé le 29 janvier pour ne pas revenir du reste de la saison. En y réfléchissant, j’avais plusieurs amis qui jouaient pour McGill alors c’était le moment ou jamais d’y aller parce que retourner à l’école après avoir arrêté, je savais que ce serait difficile. »

Nikolas Brouillard a donc refusé de signer un contrat avec le club-école des Golden Knights de Vegas pour la saison 2017-2018 et s’est plutôt inscrit au baccalauréat en économie avec une mineure en management. Il a ainsi rejoint d’anciens coéquipiers de ses années junior dont Jérôme Verrier, Guillaume Gauthier, Alexandre Sills, Francis Lambert-Lemay et Louis-Philip Guindon.

Devant attendre au 29 janvier 2018 pour jouer, il n’a participé qu’à trois matchs de saison régulière, inscrivant trois buts et deux aides avant d’aider McGill à remporter le championnat de l’OUA, l’association du sport universitaire de l’Ontario (McGill, l’UQTR et Concordia étant les seules équipes masculines de hockey universitaire au Québec, elles font partie de l’OUA).

La saison suivante, Nikolas a été nommé sur la 2e équipe d’étoiles de l’OUA avec une fiche de 21 points, dont 12 buts en 26 parties. Puis, en 2019-2020, avec 23 points en 28 matchs, il a été élu défenseur de l’année au Canada et nommé sur la première équipe d’étoiles U Sports.

La pandémie a fait en sorte que les éliminatoires n’ont pas eu lieu. Et la saison 20-21 aurait été la dernière de Nikolas avec McGill puisqu’il termine son baccalauréat. « Le plan A est d’aller jouer pro après Noël. Pour le moment, on ne sait pas trop quand tout recommencera, mais j’ai confiance qu’une opportunité se présentera. Si ça ne fonctionne pas, je pourrais me trouver un emploi dans une banque, ou encore mieux dans le domaine du sport. »

En attendant, Nikolas garde la forme en s’entraînant de la maison. Et malgré qu’il ne contrôle pas la situation actuelle sur le plan du hockey, son diplôme lui assure un avenir. Il tenait aussi à ajouter en terminant : « La LHJMQ m’a donné de bonnes bourses pour mes études et ça a beaucoup aidé. Il faut le souligner. »

Voilà, un homme qui a pris une voie que plusieurs n’osent pas prendre de peur de ne pas réaliser leur rêve. Nikolas Brouillard démontre qu’au contraire, c’est l’occasion d’avoir un diplôme d’une des universités les plus prestigieuses qu’il ne fallait pas laisser passer.