Le retour à l’école fait jaser depuis plusieurs jours. Il représente un immense casse-tête pour les directions d’école et les professeurs. Mais pour certains enfants, l’école est un filet de sécurité. Un filet qu’ils n’ont plus depuis le début de la crise. Même si les signalements ont diminué à la DPJ ces dernières semaines, le rôle des intervenantes et intervenants n’a pas diminué pour autant. Au contraire, il s’est intensifié.

 

Léa Montmarquette est intervenante sociale au CIUSS Centre-Sud de Montréal, plus précisément agente en relation humaine pour la DPJ. Un rôle effacé, loin des spotlight mais plus que jamais nécessaire. Léa est aussi meneuse de claques pour les Alouettes. En ce moment, ses entraînements lui servent plus que jamais d’échappatoire. Parce que oui les cheerleaders pratiquent leurs chorégraphies en ce moment... chacun chez soi.

 

Chaque jour, malgré la situation, Léa intervient auprès de familles et d’enfants vulnérables; des enfants dont la situation, la sécurité et le développement a été compromis.

 

« Quand je me lève le matin, je sais qu’il y a des gens qui ont besoin d’aide et que c’est important que je le fasse », avoue Léa lors d’une discussion via une plateforme numérique. Les façons d’intervenir ont changé en raison de la pandémie de la COVID-19 mais parfois, elle doit « aller au front », comme elle dit, et cogner à la porte. « On est dans un contexte d’autorité dans notre travail. On doit trouver le motif de compromission, comme on appelle. On doit donc rentrer dans les maisons », précise-t-elle

 

Léa comme toute personne craint la contamination. Elle a évidemment l’équipement de protection nécessaire mais le stress est présent. « Je vous mentirais si je vous disais que mon dévouement pour mon travail a fait disparaitre mon stress, reconnaît Léa. Le stress est présent, on est inquiet. »

 

Mais le contexte de la pandémie fait en sorte que les écoles sont fermées depuis deux mois, et le sont toujours dans le Grand Montréal. Les enfants restent donc auprès de leur famille, des familles très vulnérables.

 

« On a besoin d’y aller. Notre rôle a été intensifié par la pandémie parce que les filets de sécurité comme l’école et les ordres professionnels ne sont plus accessibles. Plusieurs organismes communautaires donnent moins de services. Nous, étant service essentiel, on prend tous ces chapeaux et on va dans les familles pour répondre à tous ces besoins », précise Léa, qui fait ce travail depuis deux ans. « On a des enfants qui sont en difficulté, qui sont dans des milieux où ça ne va pas très bien. »

 

Esprit de soutien

 

Léa souligne que généralement, depuis le début de la crise, elle est bien reçue dans les familles où elle doit intervenir. « On arrive dans les maisons avec des biens pour eux, on arrive avec des nouveaux outils pour l’école. On est dans un esprit de soutien », relate-t-elle. « Ça nous ramène à pourquoi on fait ce métier. On le fait parce qu’on veut protéger les enfants mais aussi parce qu’on veut travailler avec les gens et les aider. »

 

Les interventions ont changées. Terminé l’époque où elle pouvait s’asseoir dans le salon avec un enfant. Maintenant, elle prend des marches avec eux. Tout en respectant les règles de distanciation, le plus possible, ce qui n’est pas toujours facile. « Les enfants aussi sont confinés. Ils ont besoin de voir des gens de l’extérieur. La plupart des enfants sont contents. On met un peu de lumière dans ce moment difficile. »

 

Évidemment, Léa est consciente que la logistique n’est pas simple mais elle se réjouit de l’éventuelle réouverture des écoles sur le territoire montréalais. « Je trouve ça rassurant. L’école est un filet de sécurité, un endroit où les enfants sont bien, explique-t-elle. Ce sont des adultes responsables qui ont parfois plus de moyens que leurs parents. » Le retour à l’école reste sur une base volontaire. Son rôle auprès des familles et de les sensibiliser à cette option. Et malheureusement, elle et ses collègues ne parviendront pas à convaincre et rassurer tout le monde.

 

Humainement impossible de faire le vide

 

La charge émotive d’un tel emploi est énorme, encore plus en temps de pandémie. Léa l’admet, c’est impossible de faire totalement le vide. « C’est dur de déplugger à 18h. Mon secret à moi, quand je reviens à la maison, après ma douche, je m’entraine. Il faut que je brûle mon énergie, il faut que je sorte ça physiquement. C’est ce qui me garde saine. Ça me permet de débrancher mais ce n’est pas parfait, je ne dors pas toujours sur mes deux oreilles. On voit des choses difficiles. Ça a un impact sur moi et avec mes deux ans d’expérience, je suis une jeune intervenante, c’est sûr que je vais devoir trouver d’autres trucs. »

 

Et son sport c’est le cheerleading. La situation actuelle n’est pas idéale à des pratiques de chorégraphies mais ça n’empêche pas les meneuses de claques des Alouettes de se réunir, virtuellement, une fois par semaine pour travailler les chorégraphies. « Nos rencontres sont en deux parties : la première heure on travaille les chorégraphies et ensuite, on discute », raconte Léa.

 

Des discussions qui permettent de socialiser mais aussi pour maintenir l’esprit d’équipe. Léa est du volet stunt, le volet acrobatique où la cohésion est primordiale. « Cheerlerading l’esprit d’équipe est important. On a besoin de se voir, apprendre à se connaitre pour développer la chimie d’équipe avant de sauter sur le terrain. »

 

Saison spéciale…si saison il y a

 

Une menace d’annulation de la saison plane sur la LCF. Rien pour décourager l’équipe de cheerleading. On l’oublie dans le contexte actuel mais les Alouettes avaient mis fin aux activités des cheerleaders, avant que les partisans ne réagissent. « Il ne faut pas oublier que c’est une saison spéciale pour nous. On n’était pas supposé être là. La réaction des fans pour demander notre retour ça nous motive énormément à donner le meilleur spectacle », rappelle Léa.

 

C’est pourquoi Léa chérit plus que jamais l’opportunité qu’elle a de revoir ses coéquipiers et coéquipières, même si c’est de façon virtuelle.