Le nom de Julie Sauvé est indissociable de celui de Sylvie Fréchette. Ensemble, elles ont conquis l’or aux Jeux de Barcelone en 1992. Ensemble, elles ont fait connaître et respecter leur sport : la natation artistique. Sylvie Fréchette a accepté de prendre quelques minutes pour nous parler de celle qui a été « bien plus qu’une entraîneur ».

 

La tristesse est grande pour Sylvie Fréchette. Julie et elle se connaissaient depuis 45 ans. « Quand tu as quelqu’un dans ta vie dès l’âge de sept ans jusqu’à l’âge de 29 ans et que tu vis tous les hauts, les bas, le stress, ça ne s’arrête pas après des Jeux olympiques », raconte-t-elle. « C’est un lien pour la vie. »

 

La relation entre les deux femmes s’est poursuivie bien au-delà de leur carrière respective. « Ça toujours été un lien bien au-delà d’être mon entraineur », explique Sylvie Fréchette. « Elle n’était jamais bien loin dans tout ce que je faisais. Julie, j’ai l’impression qu’elle est partie avec une partie de moi. »

 

« Elle nous aimait comme ses enfants »

 

Tout le monde se souvient de son sourire, de sa fougue. « Julie c’était une boule d’énergie mais elle n’était pas toujours facile, ceux qui l’ont cotoyée le savent », ajoute Fréchette, avec un petit rire. « Mais nous les athlètes, elle nous aimait comme ses enfants. »

 

Julie Sauvé est l’une des rares entraîneurs à avoir autant marqué son sport, qui plus est, un sport marginal comme celui de natation artistique (autrefois connu sous le nom de la nage synchronisée). « Pour avoir réussi à faire connaitre et reconnaitre la nage synchro dans les années 80 et 90, et le faire monter en estime comme elle a su le faire, non seulement au Québec mais au Canada, ça prend du caractère », reconnaît Fréchette. 

 

« Julie n’a jamais accepté non comme réponse. Jamais elle n’a accepté qu’on ne comprenne pas le travail que ses athlètes accomplissaient dans l’eau », poursuit-elle. Et Julie Sauvé s’est assurée de faire comprendre son sport et le faire respecter de tous. « Quand les journalistes, surtout masculins à l’époque des années 80, demandaient des entrevues avec nous, Julie leur disait non on ne fait pas ça par téléphone, vous allez venir à la piscine », se remémore-t-elle fièrement. « Et quand les journalistes arrivaient, elle leur en mettait plein la vue. Ils ne venaient pas voir des pitounes en maillot de bain dans la piscine, ils venaient nous voir dans le gym.  Julie nous faisait faire notre entraînement devant les journalistes. Elle voulait faire découvrir aux journalistes qui on était vraiment. »

 

Sylvie Fréchette poursuit : « Elle a résussi par sa tête dure, par sa vision, par sa conviction à faire connaître notre sport. Avec le temps les gens ont vu en elle une no bullshit, une femme qui n’avait pas de filtre. Julie disait ce qu’elle pensait et elle le disait très directement. Ce n’était pas toujours apprécié mais il n’y avait jamais de zone grise. Les gens ont appris à la connaitre, à la reconnaitre et à la respecter. »

 

Julie Sauvé a marqué bien au-delà de son sport et bien au-delà de son pays. « Julie c’est un monument. C’est ce que je réalise aujourd’hui, je l’ai toujours su mais j’ai pris le temps de lire les messages, et peu importe l’époque, le pays, tout le monde qui a croisé Julie a été marqué par son énergie, par sa passion, par l’amour qu’elle avait pour ses athlètes et son sport », admire Fréchette, émue par les témoignages qui fusent de partout.

 

À la fin de la discussion, on lui demande quel souvenir aimerait-elle qu’on garde de Julie Sauvé. La réponse est spontanée. « Ça serait un souvenir visuel et sonore : son fou rire épouvantable quand elle rentrait dans une pièce avec son grand sourire. Elle était fière, droite, avec un sourire impeccable et cet espère d’éclat de rire. Julie, c’est juste ça, mais tout ça aussi. »