QUÉBEC – Adonis Stevenson ne s’en cache pas : la dernière défense de sa ceinture des mi-lourds du WBC, en mai dernier à Toronto, lui a laissé un goût particulièrement amer dans la bouche.

 

Affaibli par le virus de la grippe et n’ayant profité que d’une période d’entraînement très limitée avec son entraîneur Javan « Sugar » Hill, le Québécois âgé de 41 ans a dû puiser au fond de ses ressources pour arracher un verdict nul majoritaire (114-114, 114-114 et 113-115) à Badou Jack.

 

Moins de six mois plus tard, Stevenson (29-1-1, 24 K.-O.) est de retour dans le ring pour croiser le fer avec le champion intérimaire Oleksandr Gvozdyk, que plusieurs jugent comme étant son meilleur adversaire depuis le commencement de son règne. Même les preneurs aux livres favorisent à plus de 2-contre-1 le médaillé de bronze des Jeux olympiques de Londres en 2012.

 

« C’est certain que j’ai envie [de me racheter] et lancer un message à l’ensemble de la division, a reconnu Stevenson, jeudi, en marge de la dernière conférence de presse faisant la promotion du gala « Obligatoire » de Groupe Yvon Michel qui sera présenté samedi soir au Centre Vidéotron.

 

« Mais je ne regarde pas ce que les gens ou les [preneurs aux livres] disent, parce que si c’était le cas, je ne serais plus champion aujourd’hui. Je ne serais pas rendu à la dixième défense de ma ceinture. Ce que les gens disent, ça me rentre par une oreille et ça sort aussitôt par l’autre. »

 

Plus que jamais, Stevenson a créé un vide dans son entourage. Hormis ses deux gardes du corps Ted Paris et Éric Deshaies – dont il était impossible de ne pas remarquer la présence en raison de leur habillement –, il n’y avait que sa conjoite « Sisi » God, sa fille Adonia et Hill à ses côtés. L’époque pas si lointaine où le gaucher était entouré de sbires est irrémédiablement révolue.

 

« J’ai fait un reset, a expliqué Stevenson en utilisant une formule remise au goût du jour par le directeur général d’un club de hockey montréalais l’été dernier. Il y a beaucoup de champions qui dorment littéralement sur leur ceinture. Ils n’ont jamais la mentalité de se dire qu’ils laissent leur ceinture de côté pour recommencer à zéro chaque fois et redevenir champion du monde...

 

« J’ai toujours pensé que c’était facile de devenir champion du monde, mais que c’était une autre paire de manches de le rester. Comme à mes débuts, j’ai faim et j’ai de la hargne. Chaque fois, je me dis que c’est peut-être la dernière fois que j’ai la chance de disputer un tel combat. »

 

Stevenson et Hill réunis « un peu plus d’un mois »

 

Le fait que Stevenson et Hill n’avaient passé que trois semaines ensemble avant le duel contre Jack avait amené plusieurs observateurs à se demander si la préparation du champion avait été optimale. Cette fois, les deux hommes ont été réunis pendant « un peu plus d’un mois ».

 

Les choses se mettent en place pour Stevenson/Gvozdyk

« Les gens disent souvent qu’un camp devrait être de huit semaines, mais avec Adonis, nous n’avons pas besoin d’autant de temps parce qu’il s’entraîne à l’année avec Tiger Paul, a répondu Hill. Pour bien des boxeurs, les premières semaines servent souvent à se remettre en forme. »

 

Son ancien adversaire Aaron Pryor fils lui a encore une fois servi de partenaire d’entraînement, mais impossible d’en savoir davantage. « Nous avons changé notre mentalité. Nous voulions éviter les fuites, a dit Deshaies. Personne ne connaissait les partenaires de Floyd Mayweather. »

 

« Je suis très chanceux d’être tombé sur des gens comme Emanuel [Steward], “Sugar” et Tiger, a immédiatement ajouté Stevenson. C’est bien beau que je sois le champion du monde, mais c’est parce que je suis bien entouré aussi. J’ai une équipe qui travaille fort. Je ne suis pas tout seul. »

 

Un entraîneur réputé

 

Précédemment, Stevenson avait été fidèle à son habitude en ayant de bons mots pour Gvozdyk (15-0, 12 K.-O.) en le qualifiant d’« excellent boxeur qui a faim ». Il a cependant rappelé qu’ils avaient été plusieurs à vouloir le détrôner dans le passé, sauf que personne n’y était parvenu.

 

« C’est une grosse marche pour moi. C’est certain que Stevenson est un gros adversaire et un gros cogneur. C’est assurément mon plus grand défi en carrière, a concédé Gvozdyk. Mais je suis prêt. J’ai connu un très bon camp en compagnie de l’un des meilleurs entraîneurs de l’histoire. »

 

Vers un nouveau couronnement

L’Ukrainien s’est en effet offert les services du réputé Teddy Atlas, qui a repris du service après avoir entraîné Timothy Bradley fils dans les derniers moments de la carrière de l’ex-champion des super-légers et des mi-moyens. Il s’agirait déjà de son troisième entraîneur chez les pros.

 

Devenu champion intérimaire à sa dernière sortie face à l’obscur Mehdi Amar, Gvozdyk a néanmoins enregistré des victoires sur Tommy Karpency, Isaac Chilemba et Yuniesky Gonzalez. Contre Karpency, que Stevenson a battu par arrêt de l’arbitre au troisième round en septembre 2015 à Toronto, Gvozdyk a visité le plancher au premier round avant de l’emporter au sixième.

 

« Ce sont des choses qui arrivent parfois dans le monde de la boxe, a minimisé le pugiliste âgé de 31 ans. Je n’étais pas assez concentré et Karpency m’a atteint directement sur le menton. Je vais m’assurer que ça n’arrive pas samedi. Je ne m’attendais pas à ça de la part de Karpency! »