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Marie-Pier Houle entre l'ombre et la lumière

Marie-Pier Houle Marie-Pier Houle - GYM
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Mise à jour

Depuis toujours, l'industrie de la boxe professionnelle est une perpétuelle histoire de cycles au terme desquels les étoiles d'aujourd'hui cèdent inévitablement leur place aux espoirs de demain

Ces jeunes talents sont généralement repêchés des rangs amateurs où ils se sont notamment illustrés aux Jeux olympiques ou encore aux Championnats du monde. Leurs trajectoires sont savamment tracées par des promoteurs qui connaissent la recette sur le bout de leurs doigts.

Mais il arrive parfois que des boxeurs sortent d'un peu nulle part et se hissent au firmament de leur sport contre vents et marrées. L'exemple le plus probant de l'histoire de la boxe québécoise est sans l'ombre d'un doute celui de l'ex-champion des poids super-moyens du WBC Éric Lucas.

Au tournant des années 2000, Lucas a porté l'industrie locale sur ses épaules, alors qu'il y avait fait son entrée par la porte de derrière à titre de simple partenaire d'entraînement de Stéphane Ouellet. Il était surtout là en raison de l'influence positive qu'il pouvait exercer sur « Le Poète ».

Est-ce que la boxe féminine connaîtra une histoire semblable? Présentée comme la partenaire d'entraînement de Marie-Ève Dicaire à qui on faisait une faveur, Marie-Pier Houle a depuis gravi les échelons et ne cache désormais plus ses ambitions de devenir aussi championne du monde.

L'athlète âgée de 32 ans disputera vendredi soir à la Place Bell de Laval son premier duel prévu pour huit rounds, en sous-carte du gala mettant en vedette Kim Clavel. Houle, qui affrontera la Mexicaine Marisol Moreno, décrit ce duel comme le début de la deuxième étape de sa carrière.

« Là, je rentre dans les combats les plus importants qui peuvent m'ouvrir des portes vers des ceintures de championnat du monde, se réjouissait la boxeuse de Terrebonne en entrevue à RDS.ca en novembre dernier. Mon seul objectif, c'est de me rendre au sommet et c'est vers là que je m'en vais. »

Comme Lucas, Houle n'a pas connu de grands triomphes chez les amateurs – elle a notamment été éliminée en demi-finale du tournoi des moins de 69 kilos des Championnats canadiens en 2017 –, mais cela ne l'a pas empêché de connaître du succès chez les professionnelles par la suite. En huit duels, elle n'a toujours pas connu la déception de la défaite (sept gains et un verdict nul).

« C'est certain que les gens qui disent que je suis rentrée juste à cause que j'étais la partenaire d'entraînement de Marie-Ève, j'avoue que des fois ça me dérange un peu, avouait Houle. C'est certain qu'elle m'a beaucoup aidé au chapitre de la boxe, mais si je suis là, c'est parce que je suis capable de boxer. Si j'avais été super mauvaise, Yvon [Michel] ne m'aurait pas mise sous contrat.

« Oui, j'ai réussi à faire ma place dans ce milieu-là parce que la boxe féminine commençait à prendre son envol, mais je ne suis pas restée uniquement pour ça. Je veux me démarquer des autres et ne pas être seulement l'ancienne partenaire d'entraînement de Marie-Ève. Je l'adore, elle a ouvert toutes grandes les portes de la boxe féminine, mais je suis une boxeuse en entier. »

Reste que d'évoluer dans l'ombre de Dicaire et maintenant de Clavel a permis à Houle de faire son petit bonhomme de chemin sans les pressions inhérentes à celles qui viennent avec le fait de retrouver son nom en tête d'affiche. Ses résultats n'influent qu'elle et personne d'autre.

« Je ne me sens pas dans l'ombre, nuançait cependant Houle. L'attention est beaucoup sur Kim étant donné que c'est un gros combat – c'est gros ce que nous allons vivre [vendredi] – mais je veux quand même faire mon chemin au travers de tout ça. Je veux prendre ma place, je veux que les gens voient ce que je suis capable de faire, que je progresse de plus en plus à chaque combat. »

Celle qui est également technologue en physiothérapie est présentement classée 6e à la WBA et 10e au WBC chez les mi-moyennes, mais comme elle l'avait annoncé après sa dernière victoire contre Timea Belik en juillet dernier, elle souhaite éventuellement passer chez les super-légères.

« [Vendredi] je me bats encore à 147 [livres] mais ça fait partie de nos plans de descendre à 140, car la division est un petit peu plus fournie, expliquait Houle. Il y a plus de filles, plus de challenge. »

Comme c'est le cas dans plusieurs divisions de poids en boxe féminine, les mi-moyennes et les super-légères sont l'affaire d'une seule championne : l'Américaine Jessica McCaskill pour la première catégorie et la Britannique Chantelle Cameron pour la deuxième. Cameron a d'ailleurs vaincu McCaskill le 5 novembre dans un choc où cinq titres des super-légères étaient à l'enjeu.

« Ce ne sont pas toutes les catégories de boxe féminine qui sont très, très relevées, analysait Houle. [Natasha] Jonas a peut-être justement fait le saut à 154 livres parce qu'elle savait qu'à ce poids, c'était un peu plus facile d'aller chercher les ceintures. En étant championne, tu vas te chercher une notoriété qui te permet ensuite de lancer des défis aux filles des autres catégories.

« Cela dit, quand ta catégorie est trop chargée, ça peut être difficile de faire ta place. Ça fait en sorte que ce n'est peut-être pas toi qui t'illustres et on sait à quel point ça peut être difficile d'organiser des combats en boxe professionnelle avec les associations et les réseaux de télé. »

D'ici à ce que Houle et son équipe décident dans quelle division elle brillera, elle continuera de faire son chemin sans qu'on lui tienne la main dans cette zone située entre l'ombre et la lumière.