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RÉSULTATS

Après 23 ans dans le monde de la boxe, Mathieu Germain a toujours le feu sacré

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De tous les boxeurs québécois qui ont été médiatisés au cours des dernières années, Mathieu Germain est certainement l'un des plus lucides. Même s'il a toujours eu une grande confiance en ses moyens, il n'a jamais osé s'enorgueillir après une victoire ou se défiler à la suite d'un revers.

C'est donc pas surprenant que Germain refuse de voir son combat contre Steven Wilcox, qui sera présenté jeudi soir à la Place Bell en demi-finale du gala mettant en vedette Jean Pascal, comme celui de la « dernière chance » comme l'a stipulé le promoteur Yvon Michel, mercredi après-midi.

« C'est trop tôt [pour parler de combat de la dernière chance], a relativisé Germain à la poignée de journalistes venus assister à la conférence de presse faisant la promotion de la sous-carte. Ce combat [contre Wilcox] a lieu parce que j'ai une bonne feuille de route. J'ai affronté de super adversaires depuis le début de ma carrière. C'est ce que je veux. Je me bats pour aller plus loin.

« Cela fait maintenant 23 ans que je boxe et que je vais au gymnase tous les jours. Je me trouve un peu nono, des fois, de faire la même chose depuis 23 ans. Mais j'aime cela! »

« Une défaite, c'est rarement aussi dramatique qu'on pense, a nuancé son entraîneur Stéphan Larouche. Une défaite, tu l'évalues toujours selon les circonstances. C'est vrai que le gagnant du combat va avoir un chemin intéressant, mais il sera difficile. Quant au perdant, son téléphone pourrait sonner, car les deux boxeurs possèdent de belles fiches. Il ne faut pas oublier qu'il y a deux buts à cela : devenir champion du monde et faire de l'argent. Si tu ne réussis pas le premier, il faut que tu essaies le deuxième. Et si tu ne réussis pas le deuxième, trouve-toi un autre job! »

Ex-champion junior canadien dans les rangs amateurs, Germain aurait effectivement pu décider de passer à autre chose après sa défaite contre Yves Ulysse fils en novembre 2020 à Rimouski. Il s'agissait alors de son deuxième revers avant la limite en un peu plus d'un an après celui encaissé face à Uriel Perez en septembre 2019 à Montréal. Pour un boxeur qui aspire à devenir champion du monde, échapper un affrontement à saveur locale met assurément un frein sur les ambitions.

Mais comme il l'avait fait après sa défaite contre Perez, Germain s'est relevé en battant Steve Claggett par décision partagée des juges avant de passer dans le giron de Groupe Yvon Michel et de s'adjoindre les services d'un nouvel entraîneur, Stéphan Larouche. Le combat contre Wilcox sera le troisième du duo après des victoires contre Erick Inzunza Angulo et Misael Cabrera Urias.

Aux côtés de Larouche – qui avait précédemment relancé la carrière de Pascal en lui permettant de redevenir champion du monde – Germain reconnaît être devenu un athlète beaucoup plus en contrôle de ses émotions. « J'ai appris à me calmer au gymnase et dans le ring, a-t-il mentionné.

« Je suis un gars généreux, j'aime lancer [des coups], j'aime l'action et j'aime cela me battre un peu trop, des fois! Stéphan m'apporte la finition pour devenir un boxeur expérimenté, pour utiliser mon talent et surtout le doser. Mon dernier combat (contre Cabrera Urias, NDLR) est passé dans le beurre, mais c'était un rival invaincu qui a ensuite gagné une ceinture [mineure] du WBC à son combat suivant. Je l'ai découpé par petits bouts avant de l'emporter. »

« Ce que Mathieu avait, c'était très bon et il ne fallait surtout pas le perdre, a continué Larouche. Nous avons juste ajouté de la roughness et de l'efficacité par rapport à la production. Il dépensait beaucoup, beaucoup d'énergie juste en bougeant. Je lui ai fait comprendre qu'il n'avait pas tout le temps besoin d'être en mouvement. Juste marcher, c'est correct. Juste reculer, c'est correct. Juste respirer, c'est correct. Et juste reculer la tête, c'est correct. Des fois, des boxeurs font faire toutes sortes de mouvements, mais ils vont finalement demeurer exactement à la même place.

« L'idée, c'était de regarder beaucoup de boxe avec lui et de lui apprendre à devenir un vrai pro. Mathieu était déjà un boxeur aguerri, confiant, rough... c'était juste de travailler les subtilités. Et cela n'a pas été difficile, car c'est un passionné qui répète continuellement des mouvements. De la boxe, il en regarde et il en mange. C'est devenu très rapidement un véritable professionnel. »

Larouche insiste cependant sur le fait que Germain a probablement été formé à la meilleure école possible avec son entraîneur précédent Mike Moffa. « Quand j'ai commencé à travailler avec Stéphane Ouellet, mon modèle, c'était Mike, qui était encore boxeur à ce moment-là, a rappelé Larouche. Je le trouvais tellement bon. Travailler avec Mathieu et de revoir les moves de Mike Moffa, j'adore cela. Cela me rappelle le Plaza olympique, le meilleur gymnase de l'époque!

« Les [Arturo] Gatti, [Mike] Moffa, [Vittorio] Salvatore, [Pasquale] Procopio… ils étaient forts! C'était une bonne école. Une école de vitesse et de finesse. Alors si je peux apporter quelque chose de plus à Mathieu, en combinant tout cela, on se retrouve avec de bonnes fondations. »

Cela dit, Larouche est conscient que la route ne sera pas facile pour Germain dans sa quête d'un combat de championnat du monde. D'abord, parce que la division des super-légers est très, très compétitive, puis parce que les boxeurs québécois n'évoluent plus dans un contexte favorable.

« Il y a tout le temps un nouveau jeune qui arrive, a expliqué Larouche. Personne n'en parle, mais le champion [du dernier tournoi des légers] des Jeux olympiques [Andy Cruz] est passé chez les professionnels il n'y a pas longtemps. Il a gagné [la médaille d'or] sans trop se forcer. Et il ne faut surtout pas oublier tous les autres boxeurs qui passent des poids légers aux super-légers.

« C'est vraiment tough. Encore plus depuis que l'argent de HBO a disparu. C'étaient des millions de dollars qui étaient partagés entre les différents promoteurs. HBO arrivait avec des contrats pour trois ou même six combats. Maintenant, il n'y en a que pour Floyd Mayweather fils (Premier Boxing Champions), Eddie Hearn (DAZN) et Bob Arum (ESPN). Des fois, il y a une merveille comme [Naoya] Inoue qui sort, mais sinon, tu es condamné à être perçu [comme le négligé] comme Jean Pascal l'a été. »