Les Jeux olympiques viennent tout juste de se terminer. Nous en ressentons encore les effets de l’adrénaline dans nos veines, que déjà s’amorce un des tournois les plus prestigieux dans le monde du curling : le Brier.

 

Le championnat canadien de curling masculin demeure encore un des titres les plus convoités par les meilleures équipes au pays et restera pour quelques années encore un symbole de suprématie en curling masculin.

 

Il va de soi que de remporter un titre olympique, un Championnat du monde en curling ou même encore les essais olympiques, qui eux déterminent nos représentants aux différentes olympiades, sont devenus au fil des ans des enjeux majeurs pour tous joueurs de curling canadiens de haut niveau, il n’en demeure pas moins que le Brier a encore une saveur bien spéciale.

 

Certes, la formule sera grandement modifiée cette année. Tout comme au Scotties dernièrement, championnat canadien de curling féminin, il y aura à Regina 16 équipes qui se disputeront les grands honneurs. Le tournoi se disputera en trois étapes, soit un tournoi à la ronde, une ronde de championnat et un système Page pour la ronde éliminatoire. Contrairement à la tradition qui a perduré durant de nombreuses années, toutes les provinces ne s'affronteront pas entre elles. Et oui, il y aura même une équipe repêchée, qui dans les faits ne représentera aucune province.

 

Mais comme mentionné précédemment, cette formule utilisée il y a quelques semaines lors du Scotties a démontré des choses fort intéressantes. Parmi les points fortsde cette nouvelle formule,  disons que celle-ci rend les matchs du tournoi à la ronde beaucoup plus importants et assure une ronde de championnat entre des équipes de haut niveau ou qui connaissent un excellent tournoi.

 

Bien entendu, certains observateurs et amateurs ont trouvé à critiquer cette nouvelle formule mise de l’avant par Curling Canada. La présence de territoires relativement faibles en termes de performances sur les glaces, tels que le Nunavut et le Yukon, le fait que le tournoi à la ronde ne dure que sept parties pour quelques équipes et qu'il ne permet pas aux joueurs des différents territoires ou provinces d’affronter toutes les autres formations impliquées dans le Championnat, font partie des commentaires négatifs les plus souvent amenés.

 

Les critiques, ou disons plutôt les opinions différentes, font partie intrinsèque du curling. Le curling est un sport de « second guessing », c’est-à-dire un sport où l’opinion de votre voisin est aussi valable que la vôtre! Il suffit de s’asseoir dans les gradins, derrière la vitre dans un club de curling ou devant votre téléviseur avec quelques amis pour vous rendre compte de cette affirmation. Tout le monde qui s’intéresse à la stratégie a son opinion sur le prochain coup à faire ou encore davantage sur ce qui aurait dû être tenté sur le lancer précédent.

 

Difficile alors, vous l’admettrez, de développer une telle culture et de penser que tous les amateurs ou observateurs seront d’accord avec chacune des décisions prises par les autorités en place.

 

Regardons si vous voulez bien ce qui se passe dans le monde du curling canadien depuis l’échec des équipes canadiennes, autant chez les messieurs que chez les dames lors des JO. Pour la première fois depuis 1998, année du retour du curling comme sport officiel aux Jeux, les deux équipes canadiennes  n’ont remporté aucune médaille. Au scandale!

 

Il n’en fallait pas plus pour ouvrir le débat sur la façon de qualifier les équipes canadiennes en fonction des olympiques... « Nous devrions changer notre méthode de sélection, abandonner les essais olympiques, changer les dates de ces essais, nommer une équipe nationale comme le font plusieurs pays! » Les suggestions, les opinions et les critiques vont bon train!

 

Les amateurs soudainement semblent oublier que le curling est un sport! Et comme dans tous les sports, les meilleurs ne gagnent pas tout le temps. Et c’est tant mieux!  Si c’était le cas, il y a belle lurette que nous nous intéresserions à d’autres activités que de suivre si ardemment nos équipes favorites dans chacun de nos sports favoris.

 

Si le Canada n’a pas gagné de médailles, ce n'est pas parce que notre système de sélection n’est pas bon. Le Canada n’a pas gagné de médailles parce que les deux équipes en présence n’ont pas joué aussi bien qu’elles en sont capables. C’est terminé l’époque où le Canada n’avait qu’à se présenter au Championnat du monde pour en repartir avec la médaille d’or au cou trois fois sur quatre. L’opposition est de plus en plus solide et ça, ultimement, c’est une excellente nouvelle pour notre sport.

 

Des équipes nationales nommées? Non merci!

 

Parmi les suggestions les plus décevantes que l’on entend, il y a celle voulant que le Canada nomme des équipes nationales pour les représenter aux JO, championnats du monde, etc. Il s'agit là d'une opinion qui existait depuis quelques années et qui prend de l’ampleur à la suite des insuccès des Canadiens en curling à PyeongChang.

 

De grâce, ne mettez pas dans mes mots de mauvaises intentions : j’adore les Olympiques. La pression que les joueurs doivent subir lors de cette compétition est immensément plus grande que dans toute autre compétition, mis à part  les essais olympiques canadiens peut-être. Mais si pour augmenter un tant soit peu nos chances de médailles aux Olympiques, on doit sacrifier tous les autres tournois majeurs aux pays, je m’objecterai aussi haut et fort que mon statut d’amateur me le permettra.

 

La journée où Curling Canada désignera ses équipes qui participeront aux JO plutôt que de voir des équipes qui auront gagné les essais olympiques se mériter un droit de passage, ce sera tout le curling qui en souffrira, et cela dans ses racines les plus profondes, du milieu de la Saskatchewan à l’Île-du-Prince-Edouard.

 

Le Canada est une suprématie en curling international parce que nous possédons un million de joueurs de curling au pays et non parce que nous remportons une médaille d’or aux Olympiques. Un million dont quelques-uns d’entre eux tenteront de jouer un de ces quatre dans un championnat provincial. Un million dont certains rêveront de participer aux Brier ou Scotties un jour. Un million dont un groupe d’élites ambitionnera de porter la feuille d’érable lors d’un championnat du monde. 

 

Le curling au Canada, c’est tout ça. C’est aussi des tournois dans tous les clubs du pays, c’est des tournois des colts, c’est des championnats provinciaux, hommes, femmes, juniors, séniors, mixtes, etc. Le curling au Canada, c’est aussi les championnats canadiens, c’est le Brier, c’est le Scotties, c’est la Coupe Canada, ce sont les essais olympiques. Le Curling au Canada, c’est bien plus qu’une médaille d’or aux JO.

 

J’ose espérer que Curling Canada ne l’oubliera et pas et ne cédera pas aux diverses pressions des amateurs, observateurs ou même aux pressions politiques, qui l’instant de quelques jours, quelques semaines se sentent frustrés ou déçus par les derniers résultats olympiques.

 

Mais comme mentionné ci-dessus, je ne suis qu’un amateur de curling, et le seul privilège que cette situation m’octroie est celui d’avoir une opinion, qui en aucun cas, n’est plus valable que celle de mon voisin qui aime le curling tout autant que moi.

 

Alors, je laisserai donc aux autres le droit de décider de l’avenir du curling au pays. Comme amateur de curling, j’ai beaucoup d’autres préoccupations, comme celle, entre autres, de regarder jouer mon équipe favorite lors d’un des plus grands tournois de curling au monde, le Brier, qui justement commence dans quelques heures!