Passer au contenu principal

RÉSULTATS

Le chemin inspirant de Jean-Marc Edmé à partir Montréal-Nord

Publié
Mise à jour

MONTRÉAL – Passer des parcs de son enfance à Montréal-Nord aux prestigieux terrains de la NCAA et de la NFL, voilà le chemin parcouru par Jean-Marc Edmé qui a convaincu ses parents que le football pouvait mener loin. 

Edmé le dit en riant, il a été élevé par « des parents typiquement haïtiens qui voulaient que je devienne médecin ou ingénieur. Quand je leur parlais de football, ça ne leur disait pas grand-chose ». 

Mais ses parents ont senti sa passion et ils ont adhéré à son rêve qui semblait impossible. Ils ont notamment contracté un prêt supplémentaire pour l'aider à étudier, en administration sportive, à l'Université Laurentienne à Sudbury en Ontario. 

En remportant la coupe Grey, en novembre dernier, Edmé ne pouvait guère s'empêcher de repenser à ses débuts dans ce milieu sportif professionnel où peu d'élus se faufilent dans une carrière fructueuse. 

« C'est une grande fierté, ça restera toujours dans mon cœur. Je suis un gars de Montréal-Nord, j'ai grandi en regardant les Alouettes. Je suis un peu émotif en y pensant... », a confié Edmé, le directeur exécutif du personnel des joueurs des Alouettes. 

Des émotions heureuses qu'il n'aurait jamais vécues sans se tenir loin des pièges qui se multipliaient autour de lui. 

« J'ai grandi avec des jeunes qui ont choisi le milieu de la drogue et des gangs de rue. J'aurais pu facilement faire comme eux. J'en ai croisé certains, ils me disaient que je suis chanceux. Mais j'ai fait un choix, celui de l'école et du sport. J'encourageais des amis à ne pas faire ceci ou cela », a-t-il exposé en remerciant ses parents qui étaient présents pour lui et ses deux frères.  

« J'ai grandi dans un quartier rough, mais j'ai eu mieux que plusieurs de mes amis. Il manque de ressources pour aider ces jeunes qui se font influencer à faire de mauvaises choses », a cerné notre inspiration pour le Mois de l'histoire des Noirs. 

Le rôle déterminant de Marcel Desjardins

Jean-Marc EdméMême lorsqu'il rêvait lui-même d'une carrière de joueur durant sa jeunesse, il se promettait « de travailler un jour pour bâtir une équipe via le recrutement et les repêchages ». 

Ce plan a commencé à prendre forme, en 2007, dans le cadre de son baccalauréat. Edmé devait trouver un stage dans une organisation sportive. Déterminé, il avait envoyé son curriculum vitae, qui incluait son passé de joueur de football, à toutes les équipes de la NFL et de la LCF. 

Edmé a reçu quelques réponses du style « merci de nous avoir contactés, mais... » et Marcel Desjardins, qui était alors le directeur général des Tiger-Cats de Hamilton, a été le seul à le rappeler. 

« C'est là que la porte s'est ouverte pour moi. C'est pour ça que je dis toujours aux jeunes de cogner à des portes. Ce n'est pas facile, surtout dans ce milieu », lance-t-il comme conseil celui qui est fier d'avoir contribué à dénicher plusieurs perles dont DeVonte Dedmon, Tyler Snead, Avery Williams, Avery Ellis et Jamar McGloster. 

Sans le savoir, Edmé n'aurait pas pu tomber sur un meilleur dirigeant pour l'initier à cet univers. Desjardins lui a montré à évaluer les joueurs, lui a confié des tâches pour aider l'entraîneur Charlie Taaffe et l'a même fait assister aux réunions pour retrancher des joueurs. 

« Ce que j'ai aimé de Marcel, c'est qu'il a maximisé mon stage. J'ai pris beaucoup de notes, j'étais comme une éponge qui voulait tout absorber », a-t-il comparé.  

L'histoire devient encore plus belle quand on apprend que c'est encore Desjardins qui a ouvert la porte à Edmé chez les Alouettes. Desjardins avait perdu son emploi à Hamilton et il avait effectué un retour à Montréal, en 2008, comme assistant au directeur général Jim Popp. 

Le poste disponible, parmi le personnel d'entraîneurs, était au bas de la pyramide. En fait, probablement sous la pyramide. 

C'est arrivé tandis qu'Edmé rêvait d'une carrière de recruteur aux États-Unis, il venait d'être accepté pour une maîtrise en administration sportive à l'Université West Virginia. 

« Mais Marcel me parlait la réputation de Marc Trestman, un ancien de la NFL, et de celle de Jim Popp. J'ai fait l'entrevue, qui a duré des heures, et j'ai eu des papillons quand je voyais que ça cliquait avec Trestman et Scott Milanovich », a expliqué Edmé. 

Le bonheur de revenir à Montréal après un coup dur

Cette décision a rapidement fait vivre l'euphorie à Edmé qui a savouré ses deux premières conquêtes de la coupe Grey en 2009 et 2010. 

Quelques années plus tard, il est allé rejoindre Desjardins à Ottawa où il avait obtenu le poste de DG du Rouge et Noir. De nouveau, ça se passait en 2016, Edmé a soulevé la coupe Grey avec Desjardins. 

La réalité sportive a fini par rattraper Desjardins et Edmé en 2021. Le Rouge et Noir a d'abord congédié Desjardins pour ensuite embaucher Shawn Burke ce qui a signifié le départ d'Edmé. 

« Je savais que ça arriverait un jour, même les plus grands traversent des nuages noirs dans ce milieu. Le Rouge et Noir, c'était comme une compagnie qui a avancé super vite et beaucoup d'égos ont gonflé », a-t-il constaté. 

Mais, comme le dit Edmé, « tout arrive pour une raison ». Il fait référence à l'appel de Danny Maciocia pour le ramener à Montréal en 2022 et il a plongé avec ce nouveau patron. 

« J'ai de l'admiration pour Danny, nos parcours se ressemblent. On a grandi pas très loin l'un de l'autre à Montréal et il a, lui aussi, travaillé comme bénévole au début. Je suis très reconnaissant qu'il m'ait donné cette autre chance. Je le respecte beaucoup pour tout ce qu'il a fait pour le football au Québec. » 

Comme Edmé le disait, la vie fait parfois bien les choses. Ainsi, on avait planifié notre entrevue avec Edmé avant que les Alouettes annoncent le retour de Marcel Desjardins avec l'organisation. Ce n'est pas tout, on a retardé la publication de l'article en raison du Super Bowl et ce délai a permis d'apprendre que deux de ses grands amis dans la NFL, Marc Trestman et Andy Bischoff, venaient d'être embauchés par Jim Harbaugh et les Chargers de Los Angeles

Danny Maciocia, Harold Nash, Pier-Yves Lavergne et Jean-Marc EdméEdmé racontait d'ailleurs ceci à propos de ses contacts dans la NFL. 

« Je suis vraiment en amour avec le football. Ce que j'aime dans cette industrie, c'est que tu crées des liens qui durent pour la vie. Des amis nous présentent des amis et j'ai pu bâtir un bon réseau », a statué Edmé qui apporte souvent du sirop d'érable lors de ses visites auprès d'équipes de la NFL. 

« Son niveau de connaissances est énorme! Chaque fois qu'il analyse un joueur, il se met en tête qu'il peut devenir un joueur vedette et il a un très grand réseau de contacts aux États-Unis. Pour le côté comique, c'est notre spécialiste des restaurants, il a toujours une bonne place où aller manger peu importe la ville où on se trouve », a vanté Pier-Yves Lavergne, son collègue de longue date

Éventuellement, Edmé se verrait devenir directeur général à son tour. La boucle se bouclerait à merveille au niveau professionnel et il entend faire de même dans sa vie personnelle. 

« J'aimerais faire des conférences dans des écoles de Montréal-Nord. Je trouve que je n'en ai pas fait assez pour mon quartier d'origine. C'était plaisant d'aller visiter les gens avec la coupe Grey, mais je ne veux pas seulement être présent quand on gagne, je veux redonner aux jeunes pour leur qu'ils sont capables de réussir malgré l'adversité. »