Je suis bien heureux de vous retrouver avec mes chroniques pour discuter des Alouettes de Montréal alors que les camps d’entraînement reprennent dans la Ligue canadienne de football après une saison annulée en raison de la COVID-19.

Ce n’était pas une situation facile pour tous ceux qui gravitaient autour du football professionnel et je ne vise pas ici que les gens dans la LCF, mais j’ai aussi une pensée pour les rangs universitaires. J’espère que le retour à l'action dans le haut de la pyramide avec la Ligue canadienne aura un effet boule de neige aux autres niveaux par la suite.

Un calendrier qui peut encourager les Als

Pour ceux qui n’auraient pas vu la nouvelle, avec un début de saison retardé dans le circuit canadien, le nombre de matchs est passé de 18 à 14 et au lieu d’avoir trois semaines de congé, les équipes n’en auront que deux au cours du calendrier régulier. Il faut quand même noter qu’il n’y a plus de parties préparatoires contrairement à deux par les années passées.

Même s’il n’y a que 14 rencontres, les Alouettes vont au moins affronter chacune des formations à travers la Ligue en une occasion. Ce que je note en regardant le calendrier des Alouettes, c’est un départ dans l’Ouest avec Edmonton et Calgary. Il faudra voir si l’organisation montréalaise décidera de demeurer dans l’Ouest durant cette période, car parfois de se retrouver sur la route, c’est une bonne méthode pour rapidement créer un bon esprit d’équipe.

Après ce passage dans l’Ouest, il n’y a qu’un autre vol dans cette portion du pays, soit en octobre du côté de Winnipeg. C’est donc dire que les Alouettes ne disputeront pas de match en Saskatchewan et surtout en Colombie-Britannique. Je trouve que c’est une excellente nouvelle, car pour ceux qui suivent les Alouettes depuis longtemps, vous savez que c’est souvent un film d’horreur du côté de Vancouver.

Je me dois aussi de relever les quatre matchs à l’horaire devant le Rouge et Noir d’Ottawa. Il faut comprendre que la saison demeure particulière et il faut s’attendre à ce que les équipes perdent à nouveau de l’argent, ce qui fait en sorte que je ne suis pas surpris qu’il y ait plusieurs affrontements entre rivaux directs dans une association. Simplement côté logistique, c’est beaucoup moins coûteux d’organiser des rencontres contre Ottawa.

Toutefois, ce sera tout un défi pour les groupes d’entraîneurs de mettre sur pied des plans de match contre le même adversaire quatre fois dans une aussi courte saison. Surtout du côté de l’équipe gagnante, il faut sans cesse chercher à se réinventer, car ton rival a étudié ce qui a fait ton succès lors du match précédent. Ce sera donc tout un casse-tête de ce côté.

Je retiens également la série aller-retour en fin de saison contre les champions en titre de la Coupe Grey, les Blue Bombers de Winnipeg. C’est intéressant, car on risque d’y voir des matchs baromètres pour les Alouettes. Pour être les meilleurs, il faut battre les meilleurs, donc ce sera une belle vitrine en fin de campagne pour évaluer l’équipe.

En raison de la réalité avec la COVID-19 au Québec et le plan sanitaire, six des neuf premiers affrontements des Alouettes seront disputés sur la route. On souhaitait ainsi retarder le plus possible les matchs à domiciles afin d’espérer qu’il soit possible d’avoir plus de partisans dans les gradins.

Un tel format du calendrier veut donc dire qu’il y aura bien plus de rencontres à la maison en deuxième portion et justement, les Montréalais seront dans leur nid pour quatre des cinq derniers affrontements au calendrier. C’est donc dire qu’avec un bon début de saison sur la route, tous les ingrédients sont présents pour entrer en force dans les matchs éliminatoires. 

Les Alouettes disposent d’ailleurs d’une semaine de congé pour lancer la campagne alors que les autres équipes seront en action à la semaine no 1. C’est encore une fois pour tenter de repousser les premiers matchs au Stade Percival-Molson que la demande a été faite par l’organisation.

C’est particulier tout de même d’entamer la campagne avec une semaine supplémentaire de repos. J’y vois un avantage sur le plan stratégique, car Edmonton n’aura aucun vidéo à analyser pour ce premier affrontement contre les Alouettes lors de la 2e semaine d'activités dans le circuit. Ils peuvent bien analyser ce qui a été fait en 2019, mais beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et le plan de match des Alouettes n’y échappe pas.

C’est aussi un point positif à mon avis pour le nouveau coordonnateur défensif des Montréalais, Barron Miles, car il aura plus de temps pour implanter son nouveau système et l’adversaire sera dans l’inconnu sur le terrain.

Toutefois, l’envers de la médaille, surtout sans match préparatoire, il faudra surveiller le synchronisme des joueurs et même la condition physique, car même si tu es en bonne forme, ce n’est pas la même chose pour un match. La dynamique n’est pas la même non plus sur les lignes de côté et il faut éviter la confusion lors des changements d’unités par exemple. Les Alouettes vont effectuer des simulations au camp d’entraînement, mais ce n’est jamais la même réalité qu’un véritable affrontement.

L'attaque entre bonnes mains

Si je me penche un peu plus sur la formation des Alouettes maintenant, j’ai hâte de voir ce qui nous sera présenté sur le terrain. Contrairement aux dernières années, les attentes sont élevées pour les Alouettes avec leur fin de campagne en 2019 qui leur a permis d’atteindre les éliminatoires.

Surtout que, pour possiblement la première fois depuis le départ d’Anthony Calvillo, on note une véritable stabilité sur le plan offensif. L’entraîneur-chef est le même, les systèmes offensifs n’auront pas vraiment changé et on mise toujours sur le même quart-arrière, Vernon Adams fils.

Il n’y a pas de doute non plus sur le quart partant ce qui est une excellente nouvelle. Je peux vous assurer que lorsque l’attaque des Alouettes s’est présentée au camp d’entraînement, elle était déjà en mode d’ajouter des éléments au livre de jeux au lieu d’entamer sa préparation au cours 101. Elle évolue déjà aux cours avancés 201 et 301 pour ceux qui se rappelleront leurs études.

C’est un contexte enviable dans une campagne au calendrier raccourci, car ce n’est pas l’année à mon avis pour partir de zéro. Je pense à Ottawa avec un nouveau groupe d’entraîneurs où ça pourrait être difficile sans les matchs préparatoires pour trouver son rythme. Avec uniquement 14 matchs de prévus, ce n’est pas le temps de débuter la saison avec une fiche de 0-4.

On sent également que l’attaque des Alouettes est entre bonnes mains avec son quart. L’attitude de Vernon Adams est plus qu’encourageante alors que pour utiliser une expression de poker, on sent qu’il est « all-in ». Il a décidé de restructurer son contrat afin que des coéquipiers puissent rester dans le nid, il a organisé des mini-camps à ses frais aux États-Unis, il est arrivé plus tôt à Montréal pour le camp, donc je vois tout son leadership.

J’ai hâte de voir quelle sera sa progression, car pour ceux qui s’en souviennent, il a été victime de trois interceptions en demi-finale de division contre Edmonton, une rencontre qui s’est soldée par une défaite.

Je ne sais pas si vous vous souvenez, mais au cours de la saison, j’utilisais souvent l’expression qu’il semblait « béni ». Adams a terminé la saison 2019 avec 13 interceptions, mais si l’équipe adverse avait été simplement un peu plus opportuniste, ce chiffre aurait pu être bien plus élevé. Ce n’est pas le cas et il a connu une très bonne saison, mais je me dis qu’il doit quand même avoir réalisé qu’il ne doit pas trop forcer le jeu.

La bonne nouvelle pour le quart-arrière, c’est que William Stanback est de retour. Un bon porteur de ballon aidera sans contredit la cause de son quart. C’est certain que c’est dommage que son essai avec les Raiders n’ait pas fonctionné dans la NFL, mais les Alouettes ne seront certainement pas déçus de retrouver le meneur de la LCF en 2019 avec une moyenne de 6,2 verges par course. Il a aussi réalisé 12 courses de plus de 20 verges, un sommet dans la Ligue.

Il est un élément central aussi dans le plan de match aérien de Khari Jones, car la plupart des longues passes réalisées par Vernon Adams étaient après une feinte de remise à Stanback.

Parlant du jeu de passes, le groupe de receveurs au complet est de retour chez les Alouettes et on ajoute également le vétéran Naaman Roosevelt. Il va y avoir des décisions difficiles à prendre chez les entraîneurs pour former ce groupe. Je félicite les Alouettes, car tu veux créer de la compétition au camp et il ne pourra pas y avoir de journée de repos chez les receveurs avec tout le talent qu’on y retrouve.

Un seul point d'interrogation

La seule incertitude dans le schéma offensif est à mon avis sur la ligne à l’attaque. C’est un groupe essentiel au football, car tu as beau avoir un excellent quart et un merveilleux demi offensif, si tu n’as personne pour les protéger, tu n’iras nulle part. Les Alouettes ont appris que Trey Rutherford optait pour la retraite après avoir bien joué pour les Alouettes.

Jason Lauzon-Séguin qui aurait pu s’ajouter à la ligne à l’attaque aurait pris la même décision, alors qu'il n’est pas présent pour le moment. Donc au lieu d’avoir possiblement quatre joueurs canadiens, les Alouettes devraient opter pour deux Américains dans le groupe comme partants.

C’est aussi un nouveau défi pour Luc Brodeur-Jourdain comme entraîneur de la ligne à l’attaque. J’ai confiance qu’il va connaître du succès, mais c’est certain qu’il y a un ajustement de ce côté.

Je vais vous avouer que j’ai un petit pincement au coeur alors que les Alouettes avaient la possibilité d’avoir quatre joueurs francophones sur la ligne à l’attaque. J’étais déjà prêt à mentionner à Tony Washington, le bloqueur américain qui aurait complété l’unité du côté gauche, d’apprendre quelques lignes en français afin que je puisse parler de cette unité lors de la description des matchs en la surnommant « Le Bloc québécois ». On va rester loin de la politique, mais je trouvais le flash amusant alors qu’on pouvait s’attendre à avoir Washington, Gagnon, Matte, Foucault et Lauzon-Séguin devant le quart, mais tout indique que ce ne sera pas le cas.

Le camp d’entraînement est long, donc LBJ a le temps pour dénicher le meilleur groupe de cinq hommes afin de former une unité étanche. C’est aussi ça la ligne à l’attaque, car ce n’est pas uniquement de placer les cinq meilleurs joueurs, mais d’avoir ceux qui offriront la meilleure cohésion. Je suis impatient de voir la combinaison pour le 14 août.

Une défense à l'image de son coordonnateur?

Si l’attaque fait preuve de stabilité, on s’attend à bien des changements sur le plan défensif. Déjà, cette unité a perdu les services d’Henoc Muamba qui a quitté pour Toronto. De son côté, John Bowman n’est pas de retour avec les Alouettes et ce sont deux grands meneurs à remplacer.

On ne se cachera pas toutefois que la défense a connu des ennuis lors de la dernière campagne. Le problème qui revenait sans arrêt, elle n’était pas en mesure de réaliser de gros jeux. La défense des Alouettes venait au septième rang pour les interceptions, huitième pour les échappés provoqués et elle figurait au neuvième échelon pour les sacs du quart.

Les deuxièmes essais étaient aussi une grande difficulté chez les Montréalais alors que l’unité n’était pas capable de freiner l’attaque adverse pour quitter le terrain. Je pense que la goutte de trop a été le match contre Edmonton en demi-finale alors que Trevor Harris s’est offert en spectacle avec 36 passes complétées sur 39 tentatives. Même si ce n’était pas des jeux compliqués, ce n’est pas normal qu’il n’ait pas fait face à plus de pression. Aucun sac n’avait été réalisé dans cette rencontre.

C’est pourquoi on retrouve plusieurs nouveaux joueurs pour remodeler la ligne défensive. C’est évident que la priorité n’est pas d’accorder de points pour une unité défensive, mais un élément central dans le football à trois essais, c’est de pouvoir appliquer de la pression sur le quart-arrière.

Je suis impatient de voir si mon ancien coéquipier Barron Miles va pouvoir rendre l’unité défensive des Alouettes à son image. C’était « Monsieur Gros Jeux » lorsqu’il jouait dans la LCF. Il a terminé sa carrière avec 66 interceptions et 13 bottés bloqués, donc il changeait l’allure d’un match. S’il peut juste amener un peu cette dynamique à cette unité qui n’était pas en mesure de faire pencher la balance en sa faveur avec des revirements, ce serait une victoire pour la défense.

Il faudra leur laisser le temps d’apprivoiser le plan de match et c’est pourquoi je suis content que l’attaque reparte sur des bases solides, car son mandat sera de marquer beaucoup de points en début de saison afin de permettre à la défense de trouver sa vitesse de croisière.

De belles batailles s’annoncent au camp avec le départ de Bo Lokombo, Taylor Loffler entre autres. Le camp d’entraînement nous offrira les réponses.

Un choix stratégique pour les botteurs

Ça peut paraître une évidence, mais si je regarde du côté des unités spéciales, je n’ai d’autre choix que de vous parler des botteurs de l’équipe. Ce poste sera intéressant à suivre au camp, car il y a des décisions à prendre.

Boris Bede a été échangé aux Argonauts en 2020, donc la voie est ouverte et je me demande ce qui sera privilégié.

Par le passé, les Alouettes ont privilégié l’utilisation d’un seul botteur pour toutes les facettes. Je me souviens de Terry Baker, Damon Duval et récemment Boris Bede, ces joueurs faisaient toutes les tâches qui incombaient à un botteur avec les dégagements et les placements.

Cette année, j’ai l’impression que trois scénarios se présentent au camp. Le premier, il y a le botteur américain Matt Mengel qui a évolué pour UCLA alors que lui pourrait remplir toutes les fonctions. Si les Alouettes optent pour un seul botteur, ce pourrait être l’heureux élu.

Sinon, Montréal a aussi dans ses rangs son premier choix au dernier repêchage international, le botteur Joseph Zema. Cette année, les équipes de la LCF doivent avoir un joueur international dans leur formation. Zema est Australien et il a évolué dans une petite université américaine. Il pourrait s’occuper des bottés de dégagements et on aurait ainsi une bataille entre botteurs canadiens pour les placements.

Finalement, la dernière option à mes yeux, ce sera une lutte toute canadienne pour deux postes. Mon botteur de dégagement serait Félix Brière et celui pour les placements, ce serait une lutte entre Tyler Crapigna et David Côté. Ce sera une belle décision stratégique du groupe d’entraîneurs.

Comme vous pouvez voir, il y a de belles batailles qui s’annoncent au camp des Alouettes avec le secondeur intérieur, le maraudeur, la ligne à l’attaque et l’identité du ou des botteurs de l’équipe. C’est ce qu’il faut se souvenir du football alors qu’il n’y a aucune garantie.

Lorsque je regarde les joueurs invités au camp, je peux me dire que la direction a fait du bon travail pour avoir un groupe relevé et les éléments me paraissent encourageants pour envisager un bon début de saison.

Propos recueillis par Maxime Tousignant