MONTRÉAL – C’est déjà un casse-tête de bâtir une formation de haut niveau dans la Ligue canadienne de football en raison du ratio de joueurs canadiens et du plafond salarial. Mais imaginez quand l’autonomie sera à la portée de 65 % de vos joueurs, que vous devrez intégrer deux cuvées de repêchage en même temps et que vous devrez effectuer le prochain repêchage sans la tenue de la saison universitaire 2020.

Les défis du directeur général Danny Maciocia – et de tout son organigramme – ne s’arrêtent pas là. Le grand patron du département football des Alouettes de Montréal devra également s’assurer que ses protégés reviennent sur le terrain dans une forme pré-pandémie après une interruption de plus de 18 mois!

Mais avant toute chose, Maciocia devra se plonger dans une étude de son effectif. La première question à laquelle ses joueurs devront répondre est fort simple. 

« D’abord, est-ce que les joueurs veulent encore continuer leur carrière au football professionnel ? Sont-ils passés à autre chose dans leur tête? », a convenu Maciocia en sachant que plusieurs athlètes ont eu à se tourner vers un autre métier pour subvenir à leurs besoins. 

Heureusement, le dirigeant montréalais peut se rassurer, jusqu’ici, à ce chapitre. 

« Aucun joueur ne m’a annoncé que ça ne lui tentait pas de continuer à jouer pour les Alouettes en 2021. Je crois que tout le monde a hâte de fouler le terrain de nouveau », a-t-il révélé mardi lors du bilan virtuel de l’organisation. 

C’est bien beau, mais ça ne veut surtout pas dire que tous les joueurs cadreront dans la vision de l’état-major. Rappelons que les entraîneurs miseront sur l’arrivée des joueurs repêchés en 2020 et en 2021 simultanément. 

Alouettes : Comment bâtir l'édition 2021

« Dans les prochaines semaines, on veut établir le noyau que l’on souhaite conserver pour 2021. [...] Ça fera un surplus de joueurs canadiens. Ça va créer une congestion et ce sera à nous de gérer le tout », a admis Maciocia qui n’aurait jamais imaginé un tel scénario possible dans le monde du football. 

La complexité venant du repêchage ne fait que commencer à cette ligne. Le plus périlleux sera de recruter des joueurs sans qu’ils n’aient pu disputer leur saison de repêchage. Bref, ils n’ont pas évolué à leur niveau de « maturité » habituel et plusieurs athlètes n’ont pas obtenu le temps de jeu nécessaire pour se faire justice. Les archives vidéos sur ces joueurs n’abondent pas non plus. 

Ce n’est pas pour rien qu’une permission spéciale a été instaurée. Elle permet aux joueurs de reporter leur admissibilité au repêchage de 2022. 

« Voilà le défi. On est tous dans le même bateau, mais on devra baser nos évaluations sur la saison 2019 », a répondu Maciocia qui, comme ses homologues, ne veut jamais lésiner sur les efforts dans le recrutement. 

Une autonomie qui causera des maux de tête

Les dommages collatéraux seront uniquement mesurables dans quelques années. Mais le plus grand problème guette les équipes à court terme. Il s’agit de la période des joueurs autonomes, en février, qui s’annonce complètement déstabilisante. Déjà que ça bouge beaucoup annuellement, les équipes devront trancher sur plusieurs joueurs sans trop savoir ce que l’avenir leur réserve. Par exemple, est-ce que le plafond salarial sera amputé? Combien de joueurs provenant des deux repêchages méritent qu’on mise sur eux au lieu d’un vétéran?

« Ce sera notre plus gros défi et de loin. Je dirais qu’environ 65% des joueurs deviendront joueurs autonomes à travers la LCF. Si la convention collective n’est pas modifiée, on avancera avec les mêmes balises. Mais il y aura tellement de travail à effectuer. Ce sera nos journées les plus occupées pour figurer ce casse-tête », a confirmé Maciocia qui prévoit peu de sommeil en amont et pendant ce moment névralgique. 

On ne veut souhaiter de malheur à personne, mais les équipes doivent redouter le scénario dans lequel un contrat est accordé, en février, à un joueur A tout en laissant partir le joueur B qui aurait mérité ce poste sinon. Ensuite, le joueur A pourrait choisir de quitter le football car il a trouvé une autre profession durant l’interminable attente. 

Les précautions devront être tout autant nombreuses du côté de la préparation physique. 

« La réponse du gouvernement a été très décevante »

« Des joueurs ont un gymnase dans leur sous-sol, mais ce n’est pas la même chose. On fera un suivi strict chaque semaine avec les joueurs. Chaque réalité est différente et certains athlètes n’ont pas accès à un gymnase non plus », a mentionné le DG. 

Pendant que Maciocia devra en arriver à plusieurs verdicts malgré l’inconnu, les joueurs pressent la LCF d’annoncer au plus tôt si la saison 2021 aura lieu peu importe le contexte.  

« Comme n’importe qui, le plus tôt sera le mieux, mais on doit aussi penser à la sécurité de nos joueurs. Je suis très confiant qu’on jouera en 2021 et qu’on tiendra un camp d’entraînement en mai. Mais tout notre travail commence maintenant », a déclaré Maciocia à ce sujet. 

Ainsi, avec tout le travail qu’il investit et qui attend son groupe, sa conclusion ne nous surprend guère.  

« Pour moi, c’est très simple : on joue. Il n’y a aucun doute dans ma tête que ce sera le cas. Sinon, je serais idiot de me lever à 5 h ou 6 h du matin pour abattre tout ce boulot avec notre personnel. Si j’avais un 1 % de doute, je ne le ferais pas. »

À noter que Alouettes tiendront, mercredi à 17 h, une clinique d’entraîneurs virtuelle et gratuite sur leur site web. Les participants seront Danny Maciocia, André Bolduc, Luc Brodeur-Jourdain et Pierre-Olivier Breault des Carabins en plus du médecin des Alouettes, le Dr Vincent Lacroix.