Pour les amateurs de football, l'arrivée de la nouvelle année coïncide toujours avec le début des éliminatoires dans la NFL. Pendant que mon collègue Pierre Vercheval est à préparer ses prédictions étoffées pour la première ronde de matchs sans lendemain, je vous offre mon bilan d'une saison qui s'est avérée captivante à plusieurs égards.

Voici ce qui m'a marqué dans le merveilleux monde de la NFL en 2011.

MVP : Rodgers ou Brees?

Le débat, qui aurait été futile à la mi-saison, est aujourd'hui passionnant.

D'un côté, Aaron Rodgers, le joueur par excellence du dernier Super Bowl qui a presque mené les Packers de Green Bay à une saison parfaite. De l'autre, Drew Brees, qui a défoncé une panoplie de records et grâce à qui les Saints de La Nouvelle-Orléans ont compté une fois de plus sur l'une des attaques les plus dévastatrices du circuit.

Jetons d'abord un œil aux statistiques. Rodgers a complété 68,3% de ses passes pour des gains de 4643 verges. Il n'a été intercepté qu'à six reprises contre 45 passes de touché et a affiché la meilleure cote d'efficacité de la NFL à 122,5. Brees a battu la marque que détenait Dan Marino depuis 1984 en amassant 5476 verges aériennes. Il est le seul quart de la Ligue à avoir complété plus de 70% de ses passes (71,2%) et a décoché une passe de touché de plus que son rival des Packers, mais a été victime de 14 larcins.

Ironiquement, c'est un match dans lequel il n'a même pas joué qui pourrait affecter la candidature de Rodgers. Lors de la 17e et dernière semaine du calendrier, son remplaçant Matt Flynn, qui effectuait seulement son deuxième départ dans la NFL, a obtenu des statistiques absolument démentes contre les Lions de Detroit. Personnellement, je ne crois pas que la récente performance de Flynn enlève quoique ce soit aux accomplissements de son mentor, mais elle démontre tout de même que le général de l'attaque des Packers évolue dans un système favorable.

À mon avis, la palme devrait encore revenir à Rodgers, mais le débat est plus que pertinent.

La Tebowmania? Pas pour moi

Tout au long de la saison, j'ai résisté sans trop de difficulté à l'envie de sauter à pieds joints sur le train qui transportait les membres - plus nombreux à chaque semaine - du fan club de Tim Tebow.

Tout ce que représente Tebow à l'extérieur du terrain est absolument extraordinaire. Sérieux, organisé et dévoué, il est le modèle idéal pour tous les jeunes qui voudraient suivre ses traces. Il est l'exemple parfait que tu peux réussir même si tu n'es pas bâti dans le même moule que les autres, un beau message qu'il est bon de véhiculer à travers le football et le sport en général.

Par contre, quand je regarde ses performances avec mon œil d'analyste et d'entraîneur, je vois tellement de lacunes dans son jeu que je ne vois pas comment il pourrait soutenir ce rythme et connaître une longue carrière comme quart-arrière numéro un dans la NFL.

On a l'impression que la mode est aux quarts-arrières mobiles, à la Cam Newton, mais il faut aussi être capable de passer le ballon et ça, Tebow n'a pas encore prouvé qu'il pouvait le faire de façon constante.

Donnons-lui ce qui lui revient, il a permis aux Broncos de réaliser des remontées spectaculaires depuis qu'il a été nommé le quart partant de l'équipe. Il jouait bien dans des situations cruciales et le cran qu'il a démontré est un atout qui ne s'enseigne pas. Mais il faut avouer que Tebow a obtenu l'aide de sa bonne étoile à quelques reprises et, surtout, n'a rien fait seul.

Un match de football, ce n'est jamais l'histoire d'un seul joueur. Les Broncos ont aussi gagné des matchs grâce au brio de leur botteur ou la solidité d'une défensive inspirée par Elvis Dumervil et Von Miller. Pourtant, on ne parlait constamment que de Tim Tebow et ça, je suis convaincu que ça a dérangé quelques-uns de ses coéquipiers.

Je ne crois pas que Tebow deviendra un jour un quart-arrière élite dans la NFL. Il demeurera certainement dans la Ligue grâce à son éthique de travail, ses qualités de leader et le magnétisme qui lui permet d'attirer les foules, mais dans cinq ans, il ne sera pas le quart-arrière étoile des Broncos.

Un train nommé Cam Newton

Plusieurs joueurs recrues ont su tirer leur épingle du jeu dès leur première année dans la NFL. Andy Dalton, A.J. Green, Julio Jones et DeMarco Murray ont tous fait les manchettes, mais personne n'a eu un impact aussi significatif que Cam Newton.

J'ai beaucoup aimé le jeu de Dalton, le quart des Bengals de Cincinnati, qui a assurément un brillant avenir devant lui. Mais Newton a carrément, à lui seul, redéfini la position de quart-arrière. Le tout premier choix du repêchage de 2011 est un être supérieur, un athlète extraordinaire qui ajoute une dynamique unique à une équipe de football.

Au cours des dernières années, on a vu plusieurs quarts mobiles faire le saut chez les professionnels, mais avec des succès mitigés. Newton, lui, a tout pour réussir. Il est devenu le premier quart à terminer sa première saison dans la NFL avec des gains aériens supérieurs à 4000 verges, mais a aussi récolté 706 verges par la course en plus de transporter le ballon dans la zone des buts 14 fois, un record. En fait, à lui seul, Newton a marqué plus de touchés au sol que 20 des 32 équipes de la NFL.

Rien à voir, vous serez d'accord avec moi, avec les JaMarcus Russell et Vince Young de ce monde!

Manning, Luck ou les deux?

Pour moi, la plus grosse histoire dans la NFL depuis la fin de la saison régulière est le congédiement surprise de Bill et Chris Polian dans le département des opérations football des Colts d'Indianapolis. Il s'agit d'un développement majeur pour l'avenir de l'organisation puisque leurs remplaçants dans les chaises de vice-président et directeur général de l'équipe auront une décision cruciale à prendre.

Lorsqu'il est devenu évident que leur saison était destinée à tourbillonner jusqu'au fond de la cuvette, les Colts ont été vus comme la destination évidente pour Andrew Luck, un espoir exceptionnel que la plupart des observateurs voient comme le premier choix du prochain repêchage de la NFL. Mais certains croient que Peyton Manning, qui a passé la saison sur les lignes de côté, pourrait voir d'un mauvais d'œil l'arrivée précoce de son futur remplaçant.

Je suis d'avis que les Colts devraient s'inspirer de la philosophie adoptée par les Packers il y a quelques années, quand Aaron Rodgers avait glissé jusqu'à leur rang de sélection. Brett Favre venait de connaître sa quatrième saison de 4000 verges par la voie des airs, mais ça n'a pas empêché la direction de l'équipe de repêcher celui qui allait les mener au Super Bowl six ans plus tard.

Personne ne sait si Manning se remettra complètement de la blessure au cou qui l'a tenu à l'écart cette année, mais même s'il redevient le quart-arrière dominant qu'il a toujours été, je crois qu'il serait sage de penser à l'avenir et d'identifier immédiatement son successeur. Il n'y a rien de mal à laisser un quart-arrière d'avenir sur le banc pendant quelques saisons. Je dirais même que malgré les performances impressionnantes offertes par quelques quarts recrues cette année, la patience demeure la façon idéale d'intégrer un jeune dans le circuit.

Un jeune quart-arrière talentueux semble donc destiné à porter les couleurs des Colts la saison prochaine. Mais qui? Tout le monde parle de Luck, comme s'il était la seule option possible, mais pour avoir vu beaucoup de football universitaire cette année, je peux vous dire que d'autres joueurs sortent du lot. Et si les Colts voyaient en Robert Griffin III, le récipiendaire du trophée Heisman, un autre Cam Newton?

Les 49ers, la surprise de l'année

Le spectaculaire revirement de situation qui s'est opéré à San Francisco en 2011 est l'exemple parfait de l'impact que peut avoir un nouvel entraîneur sur une équipe de football.

Il y a quelques années que les 49ers, en vertu de leurs mauvaises positions au classement, font le plein de jeunes joueurs talentueux. Mais il aura fallu l'arrivée de Jim Harbaugh à la barre de l'équipe pour souder cette équipe et en faire l'une des puissances de la Ligue. Pour avoir mené les Niners à une fiche de 13-3, Harbaugh est sans contredit l'entraîneur de l'année dans la NFL.

Pour l'amateur qui écoute les matchs dans son salon, il peut être difficile de comprendre comment un simple changement d'entraîneur peut transformer une équipe moribonde en une formation aspirant aux grands honneurs. Mais le football étant le sport d'équipe ultime, l'arrivée d'un leader capable de faire comprendre à chaque membre du groupe que son rôle est aussi important que sa volonté à l'accepter peut faire toute la différence.

C'est clairement ce que Harbaugh a réussi à accomplir. Il a apporté avec lui une nouvelle attitude, a mis de l'ordre dans la cabane et semble avoir peint un portrait clair pour tous les individus dans le vestiaire. Et quand l'équipe a commencé à collectionner les victoires, les joueurs se sont mis à croire de plus en plus à sa formule.

Harbaugh a aussi été assez intelligent pour adapter son système aux joueurs qui étaient à sa disposition. Il a joué avec ses forces : il a mis l'accent sur l'attaque au sol et le contrôle du temps de possession tout en diminuant la charge de travail qui pesait sur les épaules d'Alex Smith.

Smith est un bon quart-arrière, un partant légitime, mais il n'est pas et ne sera jamais un Tom Brady ou un Peyton Manning. Il doit être supporté par une bonne attaque au sol et une grosse défensive et c'est exactement ce qu'il a autour de lui cette année.

À San Francisco, Jim Harbaugh a su mettre tout le monde dans une position optimale et c'est pourquoi son arrivée a fait une si grosse différence.

Des têtes auraient dû rouler à San Diego

À l'inverse, plusieurs équipes n'ont pas obtenu des résultats à la hauteur des attentes placées en elles en début de saison. On peut notamment penser aux Colts, aux Jets, aux Eagles et aux Chargers.

Les Chargers, une force dominante la saison dernière, ont dû se contenter d'une fiche de ,500 cette année et ont été écartés des éliminatoires malgré le fait qu'ils évoluent dans l'une des divisions les plus faibles de la NFL. Et donc, en toute logique, l'entraîneur Norv Turner, qui a le don de faire sous-performer ses équipes, et le directeur général A.J. Smith, qui a eu la brillante idée de laisser partir Darren Sproles, ont reçu la confirmation qu'ils seront de retour dans leurs fonctions l'an prochain.

Celle-là, pour être honnête, je ne la comprends pas du tout.

Chez les Jets, on devra écouter les éliminatoires à la télévision après avoir fait les frais du match de championnat de l'Association américaine au cours des deux saisons précédentes et personne n'encaisse le choc plus difficilement que Rex Ryan. L'exubérant entraîneur essuie plus de critiques que jamais, mais personnellement je ne suis pas prêt à le crucifier.

C'est vrai qu'il parle beaucoup et qu'il manque parfois de belles occasions de se la fermer, mais il faut comprendre que c'est le style d'entraîneur qu'il est. Parmi les entraîneurs pour qui j'ai évolué dans ma carrière, je le compare un peu à Don Matthews.

L'idée maîtresse de Matthews, c'était de s'occuper de jouer le rôle du mauvais garçon et de s'attirer les foudres des médias. Il était prêt à se faire critiquer par tout le monde parce qu'il savait qu'il était capable d'accepter les conséquences. Pendant ce temps, ses joueurs pouvaient faire leur travail sans distraction et il s'empressait de leur donner tout le crédit quand l'équipe connaissait du succès.

C'est un peu ça, Rex Ryan. Il n'est pas imbécile! Toutes ses sorties et ses déclarations sont calculées dans le but d'attirer les regards vers lui de façon à ce qu'on laisse ses joueurs tranquilles. C'est quand la dernière fois que Mark Sanchez a dû justifier ses mauvaises performances dans les médias? Et voilà...

Le problème avec cette tactique, c'est qu'elle s'essouffle généralement après quelques années. Ryan saura-t-il se renouveler et sauver sa peau dans la Grosse Pomme? C'est un dossier qui sera intéressant à suivre.

L'heure des prédictions

Je vous laisse avec mes prédictions pour le premier tour éliminatoire, que vous pourrez suivre avec toute notre équipe sur les ondes de RDS et RDS2.

Cincinnati c. Houston (samedi, 16h30, RDS2)
Detroit c. La Nouvelle-Orléans (samedi, 20h00, RDS2)
Atlanta c. NY Giants (dimanche, 13h00, RDS)
Pittsburgh c. Denver (dimanche, 16h30, RDS)

*Propos recueillis par Nicolas Landry.