Ils s’appellent Mika Zibanejad, Eric Gryba, Patrick Wiercioch et Cory Conacher. Ces joueurs des Sénateurs en sont à leur première saison complète dans la Ligue nationale de hockey. Et ils vivront un grand moment jeudi alors qu’ils participeront à un premier match éliminatoire en carrière.

Rien pour calmer ces joueurs, leur baptême de feu aura lieu à l’intérieur de l’une des enceintes les plus intimidantes du circuit Bettman, le Centre Bell.

Le Canadien n’est pas la seule formation à aligner des joueurs sans expérience des séries, avec Brendan Gallagher, Alex Galchenyuk et Jarred Tinordi, Max Pacioretty. Les Sénateurs comptent aussi sur plusieurs joueurs n’ayant jamais participé aux séries. Même s’il n’est pas considéré comme une recrue, le gardien substitut Robin Lehner (qui avait disputé 13 matchs dans la LNH avant cette saison) n’a jamais gardé les buts en séries. La recrue suédoise Jakob Silfverberg a fait ses débuts dans la LNH lors des séries du printemps dernier, disputant deux matchs contre les Rangers, alors qu’il n’avait jamais joué en saison régulière dans la grande ligue. Andre Benoit avait disputé 8 matchs pour les Sénateurs en saison régulière en 2010-11, mais n’a jamais joué en séries.

L’intensité de la saison régulière n’a rien à voir avec celle des séries, c’est au printemps qu’on sépare les hommes des enfants, comme le dit l’adage.

Dans plusieurs journaux d’Ottawa, on s’attarde longuement sur le facteur « recrue » chez les Sénateurs.
Dans le Ottawa Sun, le titre qui coiffe la chronique du vétéran journaliste Bruce Garrioch est assez évocateur: « Can the Ottawa Senators' rookies handle the playoffs against Canadiens? »

« La saison régulière est une chose. Les séries éliminatoires en sont une autre, commente Garrioch. Vous ne pouvez acquérir de l’expérience si vous ne participez pas aux séries. Et avant la série tous les médias vont parler de votre manque d’expérience. Ça en prend pour en avoir. »

Pour sa part Wayne Scanlan, du Ottawa Citizen, aborde l’importance qu’ont eue les Zibanejad, Silfverberg, Wiercioch et compagnie sur les succès de l’équipe cette saison : « Alors, comment les Sénateurs ont-ils réussi à se qualifier pour les séries avec autant de joueurs d’impact sur la touche? La réponse est simple : la présence à Ottawa de plusieurs jeunes talents développés dans la Ligue américaine à Binghamton. Et cette réalité n’est pas un simple développement récent comme plusieurs pourraient le penser. En fait, le programme « Kids Day » des Sénateurs est en place depuis quelques saisons. Cette saison, les blessures ont tout simplement accéléré le processus. »

Parce que les blessures n’ont pas épargné les Sénateurs cette saison : Craig Anderson n’a disputé que 24 matchs; Milan Michalek 23; Erik Karlsson, 17; Jared Cowen, 7; Jason Spezza, 5.

Les jeunes ont eu leur chance et ils en ont profité. En 42 matchs, Zibanejad a totalisé 20 points, dont 7 buts, et un différentiel de +9. En 48 rencontres, Silfverberg a inscrit 10 buts, ajouté 9 passes et également conclu la saison avec un différentiel de +9. En 42 parties, Wiercioch a marqué 5 buts et ajouté 14 passes (et aussi pour un différentiel de +9). En 47 matchs avec le Lightning et les Sénateurs, Conacher a récolté 29 points (11 buts et 18 passes), ce qui lui confère le troisième rang chez les recrues du circuit, derrière Nail Yakupov et Jonathan Huberdeau et devant Brendan Gallagher.

« Certains mouvements de personnel faisaient partie du plan. Mais les blessures à Karlsson, Spezza, Cowen, Michalek et Anderson n’étaient pas prévues. Et c’est là que l’assimilation des Silfverberg, Zibanejad, Gryba, Benoit et Wiercioch ont aidé les Sénateurs à devenir une équipe des séries plutôt qu’une équipe faisant pitié », poursuit Scanlan.

« Évidemment, je ne voulais pas uniquement faire partie de l’alignement, je voulais contribuer et aider l’équipe à gagner. Les séries, c’est du nouveau pour moi. Je n’y ai malheureusement pas pris part l’an dernier. Ce sera un défi, un défi que j’ai grandement hâte d’affronter », a déclaré Zibanejad.

Pour l’entraîneur des Sénateurs, Paul MacLean, les séries font partie du plan de développement des joueurs : « Les séries, match après match, c’est un autre degré d’intensité. Nous nous attendons à ce que nos jeunes joueurs, qui ont grandement mûri cette saison, poursuivent leur progression. Et nous nous attendons à ce qu’ils continuent à grandir dans les séries. »

« Les blessures ont fait de nous une meilleure équipe. Ces blessures ont donné à nos jeunes joueurs une chance de jouer dans la Ligue nationale. Peut-être n’auraient-ils pas eu cette chance si toute l’équipe était restée en santé. Ils ont prouvé qu’ils peuvent jouer dans la ligue. Les jeunes ont profité de leur chance, ça explique la progression et les succès de notre équipe », de poursuivre MacLean.

« Avant la mise au jeu initiale, le défenseur Jared Cowen, qui a fait ses débuts au Madison Square Garden au printemps dernier, pourrait indiquer à Zibanejad, Gryba, Silfverberg, Wiercioch d’ignorer le bruit. « Comme je l’ai remarqué à New York l’an dernier, l’atmosphère change dès les premières notes des hymnes nationaux. Il y a tellement de couverture dans les séries, mais je n’accorde aucune attention à la couverture de notre équipe. La plupart des histoires sont amplifiées et la plupart de ces histoires-là n’ont aucun impact sur notre équipe. Certains joueurs analysent leur jeu, d’autres non. Tu dois simplement continuer à faire ce que tu as fait tout au cours de l’année, particulièrement si ça c’est bien passé pour toi. » Le meilleur conseil de Cowen est tout simple. « Bouclez votre ceinture et soyez prêts! », peut-on également lire dans l’article de Garrioch.

Dans le Ottawa Citizen, Ken Warren demande au capitaine Daniel Alfredsson ce qu’il attend de ses jeunes coéquipiers contre le Canadien.

« Je vais leur dire que tout va bien se passer. C’est comme leur premier match en saison régulière dans la LNH. Ce premier match régulier est une étape, ce premier match en séries en est une autre. Ils ont réussi leur saut dans la grande ligue. Ils vont réussir leur saut dans les séries aussi. Leur enthousiasme va nous transporter. Ça reste le même sport. Tout est amplifié, il faut savoir contrôler ses émotions. Ce sera une grande expérience pour eux », de déclarer le capitaine de 40 ans, qui croit que l’équipe possède assez de vétérans pour épauler les jeunes.

Warren souligne au passage les 111 matchs de séries pour Alfredsson, les 118 de Sergei Gonchar, les 104 de Chris Phillips et la large expérience en séries de Paul MacLean, comme entraîneur-adjoint avec les Red Wings de Detroit, de 2005-06 à 2010-11, avant de prendre les rênes des Sénateurs la saison suivante.