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Pascale St-Onge veut une enquête élargie du commissaire sur les abus dans le sport

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OTTAWA - La ministre fédérale des Sports, Pascale St-Onge, a déclaré mercredi que le nouveau commissaire à l'intégrité dans le sport doit enquêter en profondeur sur la culture toxique d'abus existant dans les diverses organisations sportives canadiennes.

Alors que des centaines d'athlètes pratiquant une grande variété de sports continuent de dénoncer des situations d'abus physiques, sexuels et psychologiques, la ministre St-Onge affirme qu'il est évident qu'il faut en faire plus.

À sa sortie du caucus libéral hebdomadaire, la ministre a déclaré aux journalistes qu'elle souhaitait la tenue d'une enquête publique sur les abus dans le sport et que celle-ci devrait être encadrée par le bureau du commissaire.

Le cabinet de Mme St-Onge est actuellement au coeur de la tourmente concernant des allégations d'abus sexuels visant le monde du hockey canadien. Le premier ministre Justin Trudeau et la ministre des Sports réclament tous deux des changements majeurs au sein de la direction de Hockey Canada en raison de sa gestion de la situation.

Mercredi, M. Trudeau a dit croire que le conseil d'administration et la direction de la fédération ne comprennent pas la gravité de la situation alors que la présidente par intérim a défendu la décision du C.A. de ne pas exiger la démission des hauts dirigeants.

« Je ne peux pas comprendre à quel point Hockey Canada refuse d'accepter la réalité qu'ils n'ont plus la confiance des parents et des Canadiens », a-t-il déclaré.

Comme prédit, la Fédération ontarienne de hockey (OHF) a emboîté le pas et suspendu aussi le versement de ses cotisations.

Par ailleurs, les partis d'opposition à la Chambre des communes ont mis de la pression sur le gouvernement pour sa propre gestion de la crise. Le député du Bloc Québécois, Sébastien Lemire, a demandé qu'une enquête indépendante se penche sur l'ensemble de la gestion de crise à Hockey Canada.

En juin dernier, la ministre Pascale St-Onge a suspendu le financement fédéral de Hockey Canada et a promis de ne pas dégeler les fonds jusqu'à ce que la fédération s'engage à collaborer avec le nouveau commissaire à l'intégrité dans le sport.

Ce commissariat a été créé en juin dernier, par le gouvernement fédéral, à titre d'agence indépendante chargée d'enquêter sur les cas d'abus dans le sport.

Pas qu'une affaire de hockey

Le hockey est loin d'être le seul sport aux prises avec des problèmes d'abus. La ministre St-Onge a reçu le mandat des Sports il y a un an, mais dès ses premiers mois en fonction, des centaines d'athlètes liés à au moins huit sports ont allégué avoir été victimes d'abus, de mauvais traitements ou été témoins de malversations.

Le bobsleigh, le skeleton, l'aviron, la boxe, le rugby, le soccer et le ski alpin font partie de la liste de disciplines visées par des allégations.

En 2018, d'anciennes skieuses ont déposé des poursuites contre Canada alpin alléguant que la fédération avait camouflé une affaire d'agression sexuelle impliquant un entraîneur dans le but, entre autres, d'éviter la perte de commanditaires. Cette poursuite a fait l'objet d'un règlement à l'amiable en 2019. L'entraîneur en question, Bertrand Charest, a été reconnu coupable, en 2017, de plusieurs chefs d'accusation d'agression sexuelle et d'exploitation d'athlètes mineures.

Plus récemment, en mars dernier, 70 gymnastes et ex-gymnastes ont adressé une lettre à Sport Canada réclamant la tenue d'une enquête indépendante sur la culture toxique qui sévit dans leur sport. Depuis, le nombre de signataires est passé à plus de 500 et d'autres gymnastes continuent de s'exprimer publiquement pour dénoncer des abus physiques, psychologiques et sexuels aux mains d'entraîneurs.

Tout comme avec Hockey Canada, la ministre St-Onge a coupé les vivres à Gymnastique Canada jusqu'à ce que la fédération s'engage auprès du commissaire à l'intégrité du sport.

Elle a donné jusqu'en avril aux organisations sportives pour s'engager auprès du commissaire, mais jusqu'ici seulement cinq groupes l'ont fait, soit Volleyball Canada, le Conseil des Jeux du Canada, l'organisme « Le sport c'est pour la vie », l'Institut canadien du sport en Atlantique et Canada Haltérophilie.

La députée libérale Kirsty Duncan, qui était ministre des Sports en 2018 et 2019, a déclaré dans un discours à l'Université de la Saskatchewan, le mois dernier, que le Canada devrait s'inspirer de la grande enquête menée sur le scandale du dopage, en 1989, à la suite de la disqualification du sprinter Ben Johnson, qui avait été dépouillé de sa médaille d'or aux Jeux olympiques de Séoul.

À l'instar de l'enquête sur le dopage, le Canada doit maintenant déclencher « une commission d'enquête sur les abus, le harcèlement et les agressions sexuelles dans le sport », croit Mme Duncan.

« Il faut que les gens soient entendus, que l'on révèle l'ampleur du problème et que des recommandations soient formulées pour permettre au gouvernement de les implanter », a-t-elle soutenu.

Plusieurs de ses collègues sont du même avis. Le député Chris Bittle, qui siège au Comité permanent du patrimoine canadien dont la principale préoccupation actuelle est d'aller au fonds de l'histoire chez Hockey Canada, a dit être ouvert à l'idée d'une enquête élargie.

La ministre de la Famille, Karina Gould, trouve que ce n'est « pas une mauvaise idée » de lancer une enquête publique sur les abus dans le sport.

« Responsabilités non assurées »

Hockey Canada fait l'objet d'un examen minutieux depuis mai, lorsqu'on a appris que l'organisation avait réglé à l'amiable la poursuite d'une femme qui alléguait avoir été agressée sexuellement par huit joueurs de l'équipe nationale masculine junior de 2018, lors d'un gala de mérite sportif à London, en Ontario, cette année-là.

Hockey Canada a par la suite admis qu'elle avait puisé dans les frais d'adhésion au hockey mineur pour payer des « responsabilités non assurées », y compris les réclamations pour agressions sexuelles présumées.

Les pressions pour un changement à la direction de l'organisme sportif en difficulté se sont intensifiées lors des audiences parlementaires à Ottawa cette semaine. La ministre fédérale des Sports, Pascale St-Onge, a déclaré qu'il était temps de « faire le ménage ».

Mais la présidente par intérim du conseil d'administration de Hockey Canada, Andrea Skinner, a réitéré qu'elle continuait de soutenir le PDG et la haute direction, insistant sur le fait qu'on pouvait changer une culture tout en maintenant une stabilité à la haute direction.

Interrogée jeudi matin, la ministre St-Onge a estimé que pour sauver Hockey Canada, "la meilleure chose à faire, c'est de remplacer les dirigeants le plus rapidement possible, de travailler

à reconstruire l'organisation avec une nouvelle culture, avec des nouvelles pratiques qui protègent les joueurs, qui protègent aussi les membres du public, et qui protègent les femmes.

« Je pense qu'il y a moyen de reconstruire en ayant de nouvelles personnes et en changeant la culture, mais ça doit être fait très rapidement, a-t-elle déclaré.

« Avec ses dirigeants qui n'ont pas le support ni des commanditaires, ni de leurs propres membres qui commencent à quitter le navire, certainement pas de la population canadienne, après tout ce qu'on entend, donc, j'espère qu'ils vont prendre la bonne décision avant que tout s'écroule, finalement, pour l'organisation. »