WASHINGTON – Dernier joueur à quitter la patinoire au terme de l’échauffement d’avant-match, Marc-André Fleury s’est emparé d’une rondelle libre qu’il a tirée du fond de son territoire jusque dans le but qu’allait défendre Braden Holtby et les Capitals en première période.

 

Ce geste a soulevé l’ire des partisans des Caps qui ont copieusement hué le gardien des Golden Knights alors qu’il retraitait au vestiaire.

 

Déjà tous de retour au vestiaire, les joueurs des Caps n’ont pas été témoins du geste de Fleury. Au fait : pour quelle raison le gardien des Knights s’est-il permis un tel geste qui aurait pu mettre le feu aux poudres si un ou des adversaires avaient encore été sur la patinoire? Était-ce une forme de provocation? Une forme de motivation? Un simple respect d’une superstition?

 

« Normalement David (Perron) et moi sommes toujours les derniers joueurs à quitter la patinoire au terme de l’échauffement. David ne jouait pas ce soir alors j’ai simplement décidé d’imiter ce qu’il fait habituellement avant de rentrer au vestiaire : tirer dans le filet adverse. Je ne le ferai plus », a commenté Fleury après le match que le gardien québécois et son équipe ont finalement perdu 6-2 aux mains des Capitals de Washington qui ne sont plus qu’à une victoire de la coupe Stanley.

 

Fleury n’a pas créé de tempête avec son geste.

 

Questionné après le match, Braden Holtby a indiqué que non seulement n’avait-il rien remarqué, mais qu’un tel geste le laissait complètement indifférent. « À ce moment de ma préparation, je peux t’assurer que je suis dans mon petit monde – le gardien des Caps a utilisé en anglais l’expression La-La Land – et que rien ne peut venir me déranger. Pour ce qui est de mes coéquipiers, nous avons assez d’expérience au sein de ce groupe pour mettre de côté un geste semblable et demeurer bien concentrés sur le travail que nous avons à faire. »

 

Plusieurs joueurs accordent une grande importance, parfois même une importance démesurée, à certaines superstitions.

 

Tenez : parce qu’ils ont gagné samedi, T.J. Oshie et Matt Niskanen sont venus « travailler » en métro une fois encore lundi. Ils ont gagné. Si les Golden Knights parviennent à pousser la finale à six matchs, il y a fort à parier que l’attaquant qui a marqué le premier but de la rencontre de lundi – il a ajouté deux passes – et Niskanen qui a disputé un autre fort match prendront le métro une fois encore.

 

Parce qu’il avait marqué et que son équipe avait gagné après qu’il eut fait le trajet entre son domicile et le T-Mobile Arena en finale de l’Ouest au volant d’une rutilante Lamborghini, Jonathan Marchessault s’est payé ce luxe à chaque match à domicile ensuite.

 

On verra si la défaite encaissée mercredi dernier le forcera à changer sa routine. Car Marchessault a besoin de secouer sa torpeur afin de reprendre sa production habituelle et aider son équipe à gagner. Car les Knights n’ont plus le choix. Il est minuit moins une pour l’équipe Cendrillon de la LNH. Ce qui veut dire que la Lamborghini conduite par Marchessault lors des derniers matchs se changera en citrouille – je sais la comparaison est simpliste, mais bon... – se changera en Hyundai – la voiture qu’il conduisait alors qu’il défendait les couleurs des Remparts dans la LHJMQ – si le Québécois et son club encaissent une autre défaite.

 

Des poteaux en séries

 

Fleury a-t-il chatouillé les Dieux du hockey lorsqu’il a envoyé la rondelle dans le but de Braden Holtby à la fin de l’échauffement?

 

Certains répondront oui parce que les Golden Knights ont eu besoin de près de 46 minutes avant de marquer un vrai but dans ce match.

 

D’autres ajouteront que les quatre poteaux frappés par les Knights au cours du premier tiers sont une autre indication négative.

 

Personnellement, je n’accorde aucune importance à ces superstitions. Et bien que les Knights aient perdu, bien qu’ils aient été éclipsés au pointage, il faut admettre qu’ils ont connu un extraordinaire début de rencontre et qu’en dépit d’un recul de 0-3 à la fin du premier tiers, ce sont eux qui ont été les meilleurs en première période.

 

Rapides, incisifs, tenaces, les Golden Knights auraient pu marquer un, deux peut-être même trois buts en première moitié de première période.

 

Erik Haula a frappé un poteau. Reilly Smith a raté un tir alors que tout le côté droit du but défendu par Braden Holtby était ouvert. James Neal, devant une cage complètement désertée par Holtby qui s’était compromis sur sa gauche croyant devoir affronter un tir de Haula qui a plutôt servi une passe parfaite à Neal, a tiré sur le poteau le plus éloigné. La rondelle a ensuite été touchée par Holtby qui aurait pu la faire dévier derrière lui. Mais la rondelle n’a pas voulu entrer.

 

« Je croyais vraiment qu’il avait marqué sur le jeu », a d’ailleurs reconnu le gardien des Caps après la victoire.

 

La chance de Holtby ou la malchance des Knights ne s’est pas arrêtée là. Sur une même séquence Brayden McNabb et Ryan Carpenter ont ensuite frappé un poteau et la barre transversale.

 

Bon!

 

Les fans des Capitals diront que le grand Alex Ovechkin s’est aussi fait voler par un poteau en début de rencontre. Ils soutiendront qu’avec toutes les déveines que les Caps ont multipliées en séries depuis leur entrée dans la LNH en 1974, il est bien normal que la chance soit maintenant de leur côté.

 

Mais quand même. Pendant que les Knights ont tout fait sauf marquer au premier tiers, les Caps ont enfilé trois buts sur 10 tirs.

 

T.J. Oshie a profité d’une pénalité – Colin Miller a fauché dangereusement Lars Eller en zone neutre – pour marquer le premier but du match. Après une mise en jeu gagnée par Evgeny Kuznetsov qui a poursuivi avec une passe savante qui a mystifié la défense des Knights, Tom Wilson oublié dans l’enclave a déjoué Marc-André Fleury d’un tir précis. Avec 21 secondes à faire au premier tiers, Devante Smith-Pelly s’est transformé en Ovechkin en soulevant la rondelle dans la lucarne alors qu’il était tout près du filet défendu par Fleury. DSP est rendu à six buts en 23 matchs de séries. Il en a enfilé sept en 75 matchs de saison régulière. Tout un éveil pour l’ancien du Canadien qui démontre à quel point la confiance est essentielle dans les performances d’un joueur de soutien. D’un joueur tout court!

 

Malgré leurs 25 tirs tentés (11 cadrés) contre les 14 des Caps (11 cadrés), malgré leur domination aux cercles des mises en jeu (7 sur 11 : 64%) les Knights tiraient de l’arrière par trois buts.

 

Ils ne sont pas écrasés en deuxième. Ça non! Même après que John Carlson – James Neal a été chassé pour un coup de bâton aux dépens de Braden Holtby – eut donné les devants 4-0 aux Caps, les Knights n’ont pas lâché.

 

Mais le mal était fait.

 

Les buts de James Neal et Rilley Smith ont laissé croire un instant que les Knights pourraient peut-être réaliser l’impossible et combler l’écart, mais Brett Connolly – une fois encore en avantage numérique – a scellé l’issue de la rencontre.

 

Des Caps trop forts

 

Les Knights n’ont pas à rougir de leur performance. Ils ont disputé un bon quatrième match. Blanchis en quatre avantages numériques, ils ont quand même créé de belles occasions. Malgré les six buts accordés sur les 23 tirs des Caps, Marc-André Fleury ne peut pas vraiment être blâmé. « Sur cinq des six buts, il a été battu par des jeux parfaits. Je n’ai jamais songé une seconde à le rappeler au banc », a d’ailleurs assuré Gerard Gallant.

 

S’il n’est pas à blâmer, Marc-André Fleury n’a toutefois pas réalisé les miracles multipliés lors des trois premières rondes. Des miracles sans lesquels les Golden Knights ne peuvent battre les Capitals.

 

Parce que même en jouant un solide match de hockey, match qu’ils ont amorcé sur les chapeaux de roue, les Golden Knights ne jouent pas au niveau des Capitals.

 

Leurs leaders ne peuvent rivaliser avec les leaders des Capitals.

 

Avec les quatre passes récoltées lundi, Evgeny Kuznetsov a maintenant gonflé à 12 buts et 31 points sa récolte offensive en 23 matchs de séries. Ovechkin n’est pas loin derrière avec ses 14 buts et 26 points. Et il est clair que le capitaine est la pierre angulaire de son équipe, qu’il est le moteur qui propulse ses coéquipiers, un moteur qui carbure à une émotion contagieuse.

 

Mais maintenant qu’il est acquis que Marc-André ne pourra gagner le Conn Smythe si les Capitals soulèvent la coupe Stanley, Kuznetsov livre un sérieux duel à Ovechkin dans la course au titre de joueur par excellence des séries.

 

Les Capitals ont été chanceux de s’en tirer comme ils l’ont fait dans les dix premières minutes de la première période. C’est vrai. Mais les Capitals savent mettre toutes les chances de leur côté parce qu’ils sont simplement plus forts que leurs rivaux.

 

Je conclurais en prétendant qu’ils sont même trop forts pour les Golden Knights qui semblent fatigués et qui semblent avoir perdu cette aura qui les a aidés tout au long de la saison et lors des trois premières rondes.

 

La finale n’est pas finie. Je sais.

 

Et s’il est périlleux d’avancer un score final pour le cinquième match qui sera disputé jeudi à Las Vegas on peut assurer sans le moindre risque de se tromper que les Golden Knights joueront avec l’énergie du désespoir devant leurs partisans qui survolteront le T-Mobile Arena.

 

Mais quand même. Les 31 derniers clubs qui ont pris les devants 3-1 en grande finale ont tous soulevé la coupe Stanley.

 

Si les Caps continuent à jouer comme ils l’ont fait lors des trois derniers matchs, la question ne sera donc plus : est-ce que la coupe paradera finalement pour la première fois de son histoire à Washington, mais bien simplement quand?