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RÉSULTATS

CH : deux mois pour respirer par le nez

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MONTRÉAL - Les débordements qui ont marqué la dernière semaine ont fait la preuve par 1000 ou si vous préférez par le nombre d'insultes et de menaces essuyées par le jeune défenseur David Reinbacher à la suite de sa sélection en première ronde mercredi dernier qu'il est temps que le Canadien et ses partisans s'offrent des vacances.

Qu'il est temps que tout le monde – j'ajoute mon nom à la longue liste – profite des deux prochains mois pour retrouver un brin de calme et deux brins de sérénité!

Qu'il est grand temps qu'on prenne de grandes respirations par le nez... même si l'air est un peu vicié par la fumée!

Je sais : les partisans ne s'offrent jamais de vacances. Au golf, autour des sentiers sur les terrains de balle, sur l'eau que ce soit en canot, en pédalo, en motomarine, en ponton ou en gros bateau qui fait de grosses vagues, autour d'un Coke froid ou d'une bière pour ceux et celles qui préfèrent le houblon ou en attendant son tour à la frontière ou dans une file d'attente devant un manège de la ronde ou pour aller célébrer le chant du cygne d'Indiana Jones, les partisans du Canadien parlent toujours de leur club préféré.

Ils débattent de ce qui va bien, de ce qui va moins bien, de ce qui va mal et très mal. 

Ces débats sont sains. Du moins généralement. Ils témoignent de la place démesurée qu'occupe le Canadien dans leur vie, mais c'est comme ça. Et ça fait bien l'affaire de l'équipe malgré tout, car ça l'assure de faire des millions $ même si le CH perd beaucoup plus souvent qu'il ne gagne depuis des années. Depuis trop d'années!

Depuis cinq jours, les débats ont pris le bord. Du moins du côté des partisans les plus vocaux et actifs sur des médias sociaux qui sont devenus à bien des égards asociaux.

Ils implorent tous les Dieux du hockey afin de maudire des dirigeants qu'ils vénéraient il y a une semaine à peine et même de leur jeter un mauvais sort parce qu'ils ont osé repêcher un joueur qui ne fait pas leur affaire.

Simonac!

La dernière fois que la très haute direction du Canadien a pris une décision pour faire plaisir à ses partisans c'était, en 2009, pour repêcher Louis Leblanc.

Les partisans entassés au Centre Bell étaient fous de joie. Ils chantaient des Louis! Louis! Louis! avec la même ferveur qu'ils avaient chanté dans le passé des Guy! Guy! Guy! pour saluer la magie offensive de Guy Lafleur et les prouesses défensives de Guy Carbonneau.

On connaît tous la suite.

Où est passée la patience promise?

J'ose croire que ceux et celles qui ont refusé de monter aux barricades composent toujours la majorité dite silencieuse.

Ce serait rassurant.

Car si, après avoir accueilli Kent Hughes, Martin St-Louis et le reste de l'état-major à bras ouverts, après avoir accepté leur plan de relance et compris qu'il faudrait au moins trois ans, sans doute quatre, pour le mener à bien, les partisans sont déjà à bout de patience, on n'est pas sorti du bois.

Outrés pour ne pas dire frustrés par le fait que le Canadien ait osé tourner le dos à leur candidat Matvei Michkov plusieurs amateurs – et quelques observateurs – ont indiqué que la lune de miel avec Kent Hughes était terminée.

Qu'il était temps de serrer la vis ! De réclamer des résultats immédiats!

Déjà?

Mais où diable est passée la patience promise?

Il me semble qu'il serait important de rappeler à ce groupe en voie de démontrer à quel point il est vrai que la mémoire est une faculté qui oublie, qu'ils ont accueilli Marc Bergevin à bras ouvert quand il est venu en relève à Pierre Gauthier. Qu'ils l'ont accueilli en héros. En Sauveur même... avant de le chasser de Montréal, couvert de goudron et de plumes!

Planifier et non improviser

Réglons une chose tout de suite : Kent Hughes comme les 31 autres directeurs généraux de la LNH et tous les dirigeants de toutes les équipes de sport, peu importe le sport, n'ont pas à bénéficier d'une lune de miel.

Ils doivent présenter leur philosophie aux partisans. Ils doivent expliquer comment ils entendent bâtir un club solide, indiquer le chemin qu'ils entendent parcourir et combien de temps il leur faudra pour se rendre à destination.

La sélection de David Reinbacher reflète exactement la philosophie de Kent Hughes et de la direction. L'état-major du Canadien accorde autant d'importance à l'individu qui se cache sous l'équipement qu'au joueur qui le porte.

On peut être d'accord ou non avec cette philosophie. Mais il faut toujours en tenir compte quand vient le temps d'accorder de l'importance, ou non, à des rumeurs qui envoient un joueur ou un autre à Montréal. Rêver à un joueur sans prendre le temps de chercher ce qui se cache derrière les chiffres, sans prendre le temps d'analyser ce que les statistiques aussi avancées soient elles ne disent pas, mènent tout droit à des réactions comme celles qui se sont multipliées dès le moment où Carey Price a lancé le prénom « David » avant de complètement oublier le nom de famille de celui qu'il voulait inviter sur la grande scène.

Tout ça n'assure pas que la sélection de Reinbacher offrira au Canadien le défenseur de premier plan qu'il croit avoir repêché.

Et si cette sélection s'ajoute à la longue liste des échecs essuyés par le Canadien au fil des dernières années avec ses premiers choix, Kent Hughes et ses recruteurs mériteront les critiques qu'ils essuieront.

Mais alors que la reconstruction suit son cours, alors que le Canadien est loin d'être un aspirant logique à une place en séries, la direction du Tricolore doit respecter son plan. Elle doit éviter d'improviser. De perdre le cap. Elle doit éviter de tourner à gauche ou à droite sans trop savoir où cela va mener l'équipe. Elle doit aussi, et surtout, éviter de prendre des décisions simplement pour faire plaisir aux partisans.

Ou faire taire ceux et celles qui critiqueront, peu importe les décisions prises... avant de changer leur fusil d'épaule pour un tout ou un rien.

Rappelez-vous ce qui est arrivé l'an dernier : hué copieusement à son arrivée au Centre Bell une heure ou deux avant le repêchage, Juraj Slafkovsky a été chahuté lors de sa sélection à titre de tout premier choix devant le favori de la foule Shane Wright.

Wright a finalement attendu au quatrième rang avant d'entendre son nom et plus tard dans la soirée Slafkovsky a été ovationné alors qu'il montait les marches en serrant des mains dans un coin du Centre Bell.

Kent Hughes et les dirigeants du Canadien ne sont pas des saints. Ils commettront des erreurs. Ils mériteront aussi plusieurs des critiques dirigées vers eux à un moment ou à un autre au fil des prochaines années.

Mais pour l'instant, c'est en se rendant coupables d'improvisation qu'ils mériteraient d'être critiqués. Et non en respectant le plan qu'ils ont établi, qu'ils ont présenté aux partisans et que les partisans ont accepté.

Ce plan est simple : l'an dernier, la saison prochaine et l'autre après sans doute, toutes les décisions prises par le Canadien seront motivées par le développement des jeunes.

On en a eu une autre preuve samedi avec la transaction qui a envoyé Joel Edmundson à Washington afin de faire plus de place aux jeunes arrières gauchers de l'organisation.

Si le Canadien arrive à donner Mike Hoffman quitte à payer pour qu'il parte, ou à enfouir son contrat quelque part dans la Ligue américaine – loin de Laval il va sans dire – il démontrera là encore à quel point le développement du jeune talent en place est la ligne directrice.

Faire abstraction de cette philosophie – qu'il est tout à fait possible de remettre en doute cela dit – rend impossible toute analyse constructive.

D'où l'importance de profiter des deux prochains mois pour prendre un pas ou deux de reculs avant de revenir à la charge la saison prochaine.

Surtout qu'elle arrivera bien assez vite.

Encore quelques trous à combler

D'ici là, Kent Hughes et les membres de l'état-major du Tricolore auront quelques dossiers qui les priveront de longues vacances. De fait, ils ne le sont jamais totalement.

Ils devront négocier de nouveaux contrats avec Rafaël Harvey-Pinard, Jesse Ylönen, le nouveau venu Alex Newhook, Nicolas Beaudin, Lucas Condotta et Mitchell Stephens. Ils pourraient même se rendre en arbitrage si les négociations devaient se compliquer avec cinq de ses joueurs autonomes avec restrictions, puisque du groupe, Jesse Ylönen est le seul à ne pas avoir le droit à cette option. 

En plus, le Canadien a encore quelques trous à boucher : il faudra ajouter un gardien pour épauler Cayden Primeau devant la cage du Rocket ou même éventuellement le remplacer dans l'éventualité qu'il soit réclamé au ballottage à son renvoi à Laval en début de saison. 

Ce ne serait pas une vilaine idée non plus de trouver un brin de renfort pour son club-école après les départs d'Alex Belzile et Anthony Richard qui poursuivront leur carrière au sein des organisations des Rangers et des Bruins.

Remarquez que ce genre de renfort pourrait être disponible par le biais du ballottage une fois les camps d'entraînement terminés en octobre prochain.

On verra!

Vous ferez bien ce que vous voudrez, mais de mon côté je ferme les livres et laisserai le Canadien régler tranquillement ce qu'il lui reste à régler.

On aura bien du temps ensuite pour en débattre.

Et rappelez-vous cette phrase célèbre : il n'y a pas que le hockey – ou le Canadien – dans la vie! Surtout aux mois de juillet et d'août.

Bon été à tous et toutes.