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RÉSULTATS

Des records du Canadien qui ne sont plus si intouchables

Hampus Lindholm, Brad Marchand, David Pastrnak, Jake DeBrusk et Patrice Bergeron Hampus Lindholm, Brad Marchand, David Pastrnak, Jake DeBrusk et Patrice Bergeron - Getty
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MONTRÉAL - D'ici un mois, au maximum, on saura si les surprenantes performances des Bruins de Boston en 2022-2023 leur permettront de reléguer aux oubliettes des records du Canadien de Montréal établis en 1976-1977 et qui paraissaient intouchables. Si jamais ils accomplissent pareil exploit, les joueurs des Bruins auront toute l'admiration de quelques-uns des piliers du Tricolore de l'époque. En fait, ils l'ont déjà.

« Je pense que les Bruins connaissent une saison phénoménale. Il faut donner crédit au directeur général Don Sweeney. Je pense que (le gardien Linus) Ullmark fait vraiment une grosse différence avec cette équipe-là », a déclaré Mario Tremblay, un porte-couleurs du Canadien en 1976-1977, maintenant analyste au Réseau des Sports.

« C'est un club qui n'a pas beaucoup de faiblesses. [Les Bruins] connaissent du succès parce qu'ils sont bons, parce qu'ils ont un bon esprit d'équipe, comme nous avions, et parce que les gars ont du plaisir à jouer ensemble », ajoute Tremblay.

Depuis l'expansion de 1967-1968, la saison de référence dans la LNH est celle que le Canadien a connue en 1976-1977. Cette équipe hors du commun fait de nouveau parler d'elle gracieuseté des Bruins, cette même organisation qui a livré tant de duels épiques au Tricolore durant les années 1970.

Réunissant 11 futurs membres du Temple de la renommée, incluant le directeur général Sam Pollock, l'entraîneur-chef Scotty Bowman et le flamboyant ailier droit Guy Lafleur, le Canadien cuvée 1976-1977 a amassé 132 points en 80 matchs (60-8-12) et affiché un taux d'efficacité de ,825, le meilleur depuis que la LNH est passée de six à 12 clubs il y a 55 ans.

Lafleur, le défenseur Larry Robinson, le gardien Ken Dryden et l'ailier gauche Steve Shutt avaient tous été élus au sein de la première équipe d'étoiles.

En plus d'une multitude d'honneurs individuels, le Canadien avait gagné la coupe Stanley, bien sûr, en 14 matchs (12-2).

« Nos succès allaient au-delà du talent individuel [des joueurs]. C'était la chimie », souligne Robinson, l'un des membres du fameux « Big Three » à la ligne bleue du Canadien avec Serge Savard et Guy Lapointe.

« De 1976 à 1979, ces équipes étaient aussi proches qu'une famille. Pas seulement les joueurs; les épouses, les enfants, tout le monde. Nous aimions être ensemble. Nous avions l'habitude de tenir des fêtes à l'Halloween ou à Noël. Tout le monde était toujours là, et tout le monde appréciait la compagnie des autres », relate Robinson.

Deux records en banque

Malgré trois revers à leurs quatre dernières sorties, les Bruins (50-11-5, 105 points) détenaient une confortable avance au sommet du classement général de la LNH, mercredi matin, et présentaient un taux d'efficacité de ,796.

Ils ont atteint les plateaux des 100 points et des 50 victoires lors d'une même saison plus rapidement que toute autre équipe dans l'histoire de la ligue, soit en 61 et 64 rencontres respectivement.

Lors de cette 64e partie, ils sont devenus la première équipe de la LNH à assurer leur place pour les séries éliminatoires.

Mathématiquement, les Bruins pourraient compléter la saison avec 66 victoires, quatre de plus que la marque que détiennent les Red Wings de Detroit (1995-1996) et le Lightning de Tampa Bay (2018-2019), tous deux en 82 matchs, et 137 points, pour un taux d'efficacité de ,835.

« Il n'y a personne qui aurait prédit au début de l'année que les Bruins de Boston seraient en tête de la Ligue nationale, qu'ils pourraient égaler ou battre le record de notre équipe de 1976 », note Savard.

« Je ne suis pas [la ligue] d'assez près pour pouvoir évaluer les équipes en début d'année, puis connaître les faiblesses et les forces aussi bien que dans le temps où j'étais bien impliqué. Mais je pense que les Bruins démontrent qu'ils ont probablement la meilleure méthode de travail. C'est la plus belle réussite de la Ligue nationale. [...] Pour gagner, il faut que tu joues en équipe, parce que ce n'est pas un sport individuel, c'est un sport d'équipe. Boston, c'est peut-être l'équipe qui fait le mieux ce que nous, on faisait », renchérit celui qui a été directeur général du Canadien de 1983 à 1995.

Un objectif unique

En plus du talent et de la chimie, le Canadien de 1976-1977, comme l'édition de la saison précédente et de celle qui allait suivre, avait cette faculté à orienter toutes ses énergies vers la seule cible qui importait vraiment : la victoire ultime.

« Avant le début de la saison, notre objectif n'était pas de participer aux séries, mais de gagner la coupe Stanley. Et si on avait un résultat inférieur à cela, ce n'était pas une bonne saison », mentionne Robinson.

Capitaine de la sensationnelle édition de 1976-1977, Yvan Cournoyer voyait, dans chaque victoire, une source de motivation et d'énergie.

« Chaque partie était importante, et c'était un défi pour nous d'aller chercher la victoire, parce que c'est un encouragement. Plus on gagne, et plus on veut gagner. Et c'est pour ça, je pense qu'on a perdu seulement huit parties.

« C'est exigeant, mais on ne s'en aperçoit pas. Quand on gagne, on n'est pas fatigué. Quand on perd, on est beaucoup fatigué », illustre Cournoyer.

Quand il revient sur cette glorieuse époque, Ken Dryden s'attarde particulièrement à un sentiment d'émulation qui était rattaché au riche passé de l'équipe et qui poussait les joueurs à toujours vouloir être meilleurs.

« Lorsque vous évoluiez à Montréal à cette époque particulière, vous aviez la pression de jouer à Montréal et des succès et des réalisations du Canadien de Montréal depuis le milieu des années 1950. Nous faisions partie d'une histoire de plus de deux décennies. Cela faisait donc partie de notre espoir et de nos attentes, [de celles] des fans, des médias, des entraîneurs, des gérants et des propriétaires, que c'est ce que nous devions réaliser. Et donc, en réalité, nous jouions toujours contre nous-mêmes en plus de jouer contre le reste de la ligue. Je pense que cela nous a beaucoup aidés. »

Près de 46 ans plus tard, les artisans de tous ces exploits sont encore très fiers de ce qu'ils ont accompli. Mais ils savent aussi, comme le rappelle d'ailleurs Mario Tremblay avec justesse, que les records sont faits pour être battus. Et si les Bruins effacent une ou plusieurs prestigieuses marques du Canadien, il faudra leur rendre hommage. Tout simplement.

« Je pense que ce dont nous sommes le plus fiers, c'est de la façon dont nous avons fait ce que nous avons fait en tant qu'équipe au cours de ces années », précise Dryden, qui se considère absolument privilégié d'avoir fait partie d'une telle formation.

« C'est entre les mains des Bruins, ajoute l'ex-numéro 29 du Tricolore. S'ils finissent par atteindre ces objectifs, tant mieux pour eux. Tout comme nous avons été heureux de faire ce que nous avons fait. Ce sera une réussite extraordinaire. C'est entre leurs mains, comme c'est entre les mains de n'importe quelle équipe, et comme c'était entre nos mains. Il nous reste qu'à regarder et apprécier. »

Savard est du même avis.

« Si Boston bat [des records du Canadien], tu donnes la main et tu dis "C'est un exploit, ça".»

«Un record, ça ne t'appartient pas pour la vie. Ça t'appartient jusqu'à ce que quelqu'un vienne le battre. Et ça ne nous enlèvera pas le mérite des quatre coupes Stanley [consécutives] et d'avoir perdu seulement huit matchs. »