Visé par des spéculations de congédiement à plusieurs reprises depuis qu’il a succédé à Claude Noël au cours de la saison 2013-2014, Paul Maurice est aujourd’hui solidement ancré derrière le banc des Jets de Winnipeg.

Bien campé au 2e rang de la division Centrale et au 5e du classement général avec sa récolte de 98 points, son club est d’ailleurs considéré, à juste titre, comme un prétendant à la coupe Stanley.

En plus d’être ravi par les succès de son club et le leadership qu’affiche son entraîneur-chef, le directeur général des Jets est aussi d’une nature très patiente. Il l’a démontré en maintenant un très haut niveau de confiance à l’endroit de Maurice malgré les écueils qu’ont vécus les Jets au cours des dernières saisons. Des écueils sur lesquels ils se sont échoués en ratant les séries lors des deux dernières saisons et en encaissant une élimination dès la première ronde en 2014-2015.

Interpelé plus tôt cette semaine à la réunion des directeurs généraux à Boca Raton, Kevin Cheveldayoff a donc esquissé un sourire agacé lorsque je lui ai demandé s’il pouvait répondre à quelques questions sur son entraîneur-chef. « Je n’ai pas l’intention de congédier Paul », a-t-il répliqué du tac au tac.

Lorsque je lui ai dit que Pascal Vincent et non Paul Maurice était l’entraîneur-chef dont je voulais lui parler, Cheveldayoff qui marchait d’un pas pressé s’est arrêté avant de dire : « Vas-y avec tes questions, je rejoindrai les autres plus tard. »

Plus professionnel que spectaculaire

Dire que Kevin Cheveldayoff tient Pascal Vincent en haute estime serait un euphémisme.

« Pascal est un excellent coach. Vraiment. Derrière ce gars très discret qui est très loin des stéréotypes associés aux joueurs de hockey et aux entraîneurs qui les dirigent se cache un homme de hockey sensationnel. Il a un rôle crucial à jouer au sein de notre organisation, car c’est à lui que nous confions la responsabilité de préparer notre relève. Et je lui voue une confiance pleine et entière », a défilé le grand patron des Jets.

Cette nature effacée de Pascal Vincent lui allait très bien lorsqu’il a fait le saut avec les Jets à l’aube de la saison 2011-2012 lorsqu’il s’est joint à la nouvelle équipe d’entraîneurs des Jets dirigée par Claude Noël. Ce côté « excellent deuxième » lui a permis de demeurer en poste lorsque Paul Maurice est venu remplacer Noël. Mais cette discrétion qui donnait, de loin en tout cas, l’impression que Vincent était condamné à demeurer deuxième minait ses chances de faire le grand saut.

« C’est peut-être la perception que tu avais et que plusieurs ont encore parce que Pascal est un gars bien plus professionnel que spectaculaire. Mais je peux t’assurer qu’à l’interne, lorsque nous tenions nos réunions, il n’a jamais hésité à donner des points de vue qui n’allait pas nécessairement dans la même direction que les miens ou de ceux de son entraîneur-chef. Il ne se contentait pas de rouspéter pour afficher son désaccord. Ce n’est pas son genre du tout. Il affichait des points différents et surtout il apportait des solutions intéressantes pour faire face aux ennuis que nous connaissions. Au hockey, tu dois constamment t’ajuster. Quand ça va mal, tu n’as pas le choix. Quand ça va bien, tu dois t’ajuster aussi pour éviter que ça se mette à mal aller un moment donné. Tu dois tenter de tout prévoir. De tout planifier et je t’assure qu’en matière de préparation, Pascal n’a rien à envier à personne », ajoute le directeur général des Jets avec enthousiasme.

La grande demande

Parce qu’il avait appris à bien connaître Pascal Vincent au fil de ses premières saisons derrière le banc des Jets, Kevin Cheveldayoff n’a pas été le moindrement surpris lorsque le Québécois qui a été entraîneur-chef pendant 11 ans dans la LHJMQ – huit saisons avec les Screaming Eagles du Cap-Breton, et trois à la barre du Junior de Montréal – lui a fait la grande demande.

« C’est Pascal qui est venu me voir pour me demander si j’accepterais de lui offrir le poste d’entraîneur-chef du Moose et non moi qui lui ai offert le job. J’étais très satisfait de son travail avec le grand club. Pascal et Paul avaient une très belle complicité. Paul pouvait commencer de répondre à une de mes questions et c’est Pascal qui terminait la réponse tant ils étaient sur la même longueur d’onde. Mais quand il m’a fait cette proposition, je ne pouvais refuser. Et je ne le regrette pas du tout. »

Après avoir raté les séries l’an dernier à sa première saison derrière le banc du club-école des Jets, Pascal Vincent et son Moose sont premiers dans la division Centrale de la Ligue américaine avec une fiche de 39 victoires, 19 revers et huit défaites en prolongation ou tirs de barrage. Les Wolves de Chicago leur soufflent dans le cou, mais le Moose maintient une avance de cinq points.

« Le développement de nos joueurs est plus important que les victoires et les défaites, mais quand je regarde le Moose jouer, je vois les Jets évoluer sur la glace tellement nos deux clubs jouent de la même façon. C’est très rassurant pour un directeur général de constater cette constance. Et comme mes deux équipes sont installées à Winnipeg, j’ai la chance de les avoir toutes les deux à l’œil. Paul et Pascal se parlent tous les jours. Ils sont aussi complices qu’ils l’étaient même s’ils ne sont plus dans le même bureau. C’est un luxe pour notre organisation », insiste Cheveldayoff.

Au 4e et 5e rang dans la LNH pour les buts marqués par match (3,29) et les buts accordés par partie (2,58), les jets sont également 4es et 5es en matière d’efficacité en avantage (23,3 %) et désavantage (83,1 %) numériques.

Sous la gouverne de leur entraîneur-chef âgé de 46 ans, le Moose est 2e dans la Ligue américaine avec une attaque massive qui fait Banco 21,7 fois sur 100 et un désavantage numérique qui ferme la porte 85 fois sur 100.

Vincent aura la bénédiction des Jets

Kevin Cheveldayoff n’a pas la moindre intention de congédier Paul Maurice. Il l’a claironné. Et dans les faits, il serait bien fou de procéder à un changement pareil. Mais si les aléas de la vie laissaient les Jets de Winnipeg sans entraîneur-chef du jour du lendemain, le directeur général aurait une solution à portée de main.

« Pascal a été un très bon adjoint pour nous, mais il démontre à tout le monde qu’il est d’abord et avant tout un entraîneur-chef. Et un très bon entraîneur-chef. À mes yeux, il est prêt pour la LNH. »

Parce que le poste est comblé à Winnipeg, les Jets accepteraient-ils d’offrir la chance à Vincent de faire le saut ailleurs?

« Certainement, répond candidement Cheveldayoff. Je serais déçu de perdre un aussi bon allié, mais comme homme de hockey, je considère que je n’ai pas le droit d’empêcher un membre de mon organisation d’améliorer son sort. Si une équipe me contacte pour obtenir le droit de parler à Pascal, elle l’obtiendra. C’est certain », a ajouté le DG des Jets.

Et si cette permission était demandée pour permettre à Pascal Vincent de faire un simple changement d’organisation? Si, au lieu de faire le saut dans la LNH, Vincent se voyait offrir les rennes d’un club-école? Que ce soit avec le Canadien de Montréal qui procédera à une analyse complète de toutes les structures de l’organisation comme l’a mentionné Marc Bergevin plus tôt cette semaine, ou une autre organisation qui pourrait restructurer son club-école, Kevin Cheveldayoff se montrerait-il aussi concilient?

« Ma philosophie demeure la même : tu ne peux pas empêcher un gars d’améliorer son sort. Mais je m’assurerais de savoir s’il s’agit bien d’une amélioration. À moins que tu sois au courant de quelque chose que je ne sais pas encore, je me pencherai sur cette question si jamais elle m’est posée. Pour le moment, notre organisation va se concentrer sur les séries autant du côté des Jets que du Moose », a conclu Kevin Cheveldayoff.