Passer au contenu principal

RÉSULTATS

Une transition sans heurt pour Maureen Murphy

Maureen Murphy Maureen Murphy - PC
Publié
Mise à jour

MONTRÉAL – L'entraînement tire à sa fin. L'horaire du jour laisse peu de place à la fantaisie. Peu de temps après la séance, les joueuses de l'équipe montréalaise de la Ligue professionnelle de hockey féminin quitteront en autobus pour Toronto, où elles doivent jouer le lendemain devant une foule record. Avant de rentrer au vestiaire, l'entraîneuse Kori Cheverie envoie ses ouailles pratiquer leur jeu sur les unités spéciales.

L'exercice dure quoi, une dizaine de minutes? Ce n'était pas suffisant pour Maureen Murphy.

« Elle était insultée parce que son unité n'avait pas eu autant de répétitions que l'autre, révélait la gardienne Ann-Renée Desbiens dans un corridor de l'Auditorium de Verdun. Elle était comme : "Ouais, mais il m'en manque une" et on était comme : "Ok, mais il ne reste plus de temps!" »

C'est finalement Cheverie qui a eu le dernier mot. « Je lui ai dit : "Tu as déjà marqué trois buts en avantage numérique dans cette pratique. Garde l'autre pour le match demain!" »

On savait Murphy talentueuse. Elle avait terminé dans le top-10 des meilleures pointeuses de la NCAA dans les deux saisons qui ont précédé la création de la LPHF. Ses accomplissements dans les rangs universitaires ont non seulement convaincu Montréal de la sélectionner au 18e rang du repêchage, mais aussi de lui accorder l'un des six contrats de trois ans à sa disposition avant le début de la saison.

C'est cette habitude qu'on lui a découvert de vouloir « toujours travailler plus » qui lui a permis de commencer sa carrière professionnelle avec éclat. Avec un peu plus du tiers de la saison derrière elle, elle est la deuxième pointeuse de son équipe et la huitième de la ligue avec huit points, un but et sept passes décisives, en neuf rencontres. Ses performances lui ont récemment valu une invitation de l'équipe nationale américaine pour participer au dernier volet de la Série de la rivalité.

Bien sûr, jouer avec Marie-Philip Poulin ne nuit pas à l'accumulation de statistiques flatteuses. C'est d'ailleurs une variante de ce constat qui sort en premier de la bouche de Murphy lorsqu'on lui parle de ses bonnes performances. Il s'agit toutefois d'un excès d'humilité qu'on ne pouvait laisser passer aussi naïvement.  

Après tout, une place aux côtés de celle qui est presque universellement décrite comme la meilleure joueuse au monde ne se donne pas en cadeau. Elle se mérite.

Comme le reste de ses coéquipières, Murphy a commencé l'année en quête de constance et de résultats. Mais le potentiel était là, bien visible, et les choses ont débloqué rapidement. Sa présence sur le premier trio, flanquée de Poulin et de la Tchèque Tereza Vanišová, est devenue la norme.

« Au début, tu te demandes si tu es assez bonne pour jouer avec elle, dit l'Américaine de 24 ans en parlant de Poulin. Je ne dis pas ça parce qu'elle me faisait sentir ainsi. Mais j'ai grandi en l'idolâtrant et tout d'un coup, je me retrouve sur son trio. C'est un peu fou. Mais tu finis par te rendre compte qu'elle est une fille comme les autres. »

« Au début, j'étais super excitée de pouvoir jouer avec, se rappelle Poulin. Je savais ce qu'elle apportait. Ce qu'elle avait fait avec [Alina] Müller et [Chloé] Aurard à Northeastern, c'était remarquable. Je savais ce qu'elle apportait. Dès nos premières pratiques ensemble, on s'est parlé, ça a bien marché. »

Une vieille âme

À première vue, Murphy est une fille discrète, réservée. Elle affirme pourtant qu'elle est la plus bavarde du trio dont elle est la benjamine. Elle le justifie par un besoin de survivance. Celles qui la côtoient parlent plutôt d'une insatiable soif de savoir.

« Pour que notre trio ait du succès, je dois toujours savoir où [mes partenaires] sont sur la glace, explique-t-elle. Elles sont si rapides que pour ne pas perdre leur trace, je dois toujours être aux aguets. Je les fais parler et elles sont très ouvertes. Si j'en arrache, si j'ai une mauvaise présence, le simple fait de leur parler m'aide beaucoup. »

« C'est sûr que c'est elle qui parle le plus, approuve Poulin, mais elle veut comprendre, elle pose des questions pour être meilleure. Elle est curieuse. C'est ça qu'on veut, voir les plus jeunes vouloir s'améliorer à chaque présence. »

« Ce qui m'impressionne vraiment avec Maureen, c'est sa maturité, ajoute Desbiens. Elle sort à peine de l'université, mais elle a déjà une vieille âme. C'est une personne qui est à son affaire, elle est disciplinée, elle s'assure de vraiment tout faire en son possible pour être bien préparée. »

Cheverie décrit sa numéro 15 comme une attaquante qui possède « un bon lancer, une bonne vision », une fille qui possède la polyvalence nécessaire pour être utilisée dans une multitude de circonstances. Mais elle juge qu'elle doit encore surveiller son utilisation afin de la protéger contre elle-même ou contre certaines situations.

Par exemple, si elle constate, en cours de match, que Murphy traverse un passage à vide, elle l'enverra faire quelques présences sur un autre trio. « Habituellement, ça suffit pour la ramener dans le match et susciter une réponse de sa part », a-t-elle remarqué. Elle a aussi décidé de muter sa recrue sur la deuxième vague du jeu de puissance. L'un des effets recherchés est d'atteindre un meilleur équilibre entre les deux unités. Mais c'est aussi une façon « de lui faire prendre de l'expérience sans l'exposer constamment aux meilleures joueuses défensives ou aux premiers trios adverses ».

Comment Murphy réagit-elle à ce genre de stratégie?

« Elle n'aime pas ça, elle est compétitive, convient Cheverie. Mais c'est mon style de gestion. Je ne dirai pas que je ne suis pas dure avec mes joueuses, mais j'ai l'habitude de faire un suivi pour expliquer mes décisions. La réponse de Murph est généralement très positive. »

« C'est plaisant d'affronter les gros trios parce que souvent, je connais ces filles, elles sont mes amies, dit Murphy. Quand tu joues avec ‘Pou', toutes les équipes vont t'envoyer leurs meilleures joueuses et toutes ces filles vont te donner la meilleure version d'elles-mêmes. J'ai confiance en Kori qu'elle fera ce qui est le mieux pour moi et pour l'équipe. »

Jusqu'à maintenant, la formule produit des résultats épatants.