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Hernan Losada : le goût du risque

Hernan Losada Hernan Losada - PC
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MONTRÉAL – Hernan Losada est tombé en amour avec le métier d'entraîneur environ quatre ans avant qu'on lui donne une première chance de l'exercer.

À 32 ans, voyant arriver le crépuscule de sa carrière de joueur, le milieu de terrain argentin avait commencé à se demander de quoi serait faite la suite. Il savait qu'il voulait rester actif dans le football, mais pour y faire quoi exactement? Il ne le savait trop. Dans l'optique de se donner un maximum d'options, il s'était engagé dans le long processus pour l'obtention de ses qualifications de coach.

Une fois éteintes les dernières notes de son chant du cygne, les patrons du FCO Beerschot Wilrijk, son club de cœur, lui ont offert de travailler pour la maison. Il a accepté d'occuper trois postes en simultané : entraîneur-chef de l'équipe réserve, entraîneur-adjoint au sein de la première équipe et recruteur. 

« Après deux mois, je savais ce que je voulais faire », a raconté Losada lors d'un entretien avec RDS pendant la semaine de congé du CF Montréal.

« Avec les U20, c'était exceptionnel de voir la progression des jeunes joueurs, d'essayer de trouver des choses dans la semaine et après voir les résultats la fin de semaine. C'était formidable. Je dirais que ça, pour moi, ça m'a procuré presque plus de plaisir que j'en ai éprouvé comme joueur. »

Pour quelqu'un qui ne savait trop ce que l'avenir lui réservait, Losada a été fixé assez rapidement. À peine un an après le début de son stage exploratoire, Beerschot a congédié son entraîneur et l'a désigné comme son remplaçant. Même s'il se savait prêt – et l'avenir lui a donné raison – son cœur s'est serré.

« C'est très dangereux de devenir le coach d'une équipe où tu as joué pendant plusieurs saisons. Tu es un peu une idole, en quelque sorte, et du jour au lendemain tu peux tout perdre! Si tu commences à perdre des matchs, tout le monde va oublier ce que tu as fait comme joueur. Mais la vie, on dit que c'est fait pour prendre des risques. Et si les choses ne vont pas comme tu l'espérais, c'est toujours une leçon. »

À Beerschot, le pari de Losada a été payant. Moins d'un an après son entrée en poste, l'équipe a gagné sa promotion en première division belge. Sa réputation était sauve. L'année suivante, toujours mû par cette envie de se mettre en danger, il a décidé de quitter sa « zone de confort » pour tenter sa chance en Amérique du Nord. La quinzaine de mois qu'il a passé à la tête de D.C. United, et qui s'est conclue par son congédiement, lui a fait connaître l'envers de la médaille.

« Ça a été difficile, bien sûr que ça a été difficile. J'ai un cœur. Mais c'était aussi un bon moment pour faire une analyse de moi-même, pour regarder un peu pourquoi on est arrivés dans cette situation et ce que je pouvais améliorer. Ça a été un moment dur, mais un moment d'apprentissage qui a été bon pour moi. »

« J'ai fait des bonnes choses là-bas, mais aussi des choses qui, peut-être, ne marchaient pas pour D.C. United. Et c'était à moi de le reconnaître et de m'ajuster. »  

Dans son ADN

Son penchant pour l'audace, Losada en retrace l'origine à l'éducation qu'il a reçue de ses parents, qui l'ont toujours encouragé à sortir du cadre et à assumer ses erreurs. « Mon père m'a toujours dit que quand un match finit, il ne faut pas que tu puisses te dire : "mais pourquoi je n'ai pas fait ça?" », relate-t-il.

Ces sages paroles sont devenues, plusieurs années plus tard, le point central de sa philosophie footballistique. De la Belgique à la capitale américaine jusqu'à son arrivée récente à Montréal, Losada a célébré de grands accomplissements et été confronté à de sérieuses remises en question. Il a passé en revue ses échecs, reconsidéré certaines de ses méthodes, fait plus d'une fois son mea culpa. Mais jamais il n'a dérogé de son idée directrice.    

À ses joueurs, il demande de foncer sans égard pour de potentielles conséquences fâcheuses. De s'approcher du feu quitte à se griller un sourcil une fois de temps en temps. D'avancer avec comme seule promesse d'y retourner si ça ne fonctionne pas.

Son message, résumé : « n'arrêtez pas d'essayer, continuez à travailler et faites des erreurs. Mais c'est comment on va réagir à ces erreurs qui compte », met-il en perspective, citant en exemple la récente victoire de ses hommes contre l'Union de Philadelphie.

« Il y a des moments où c'est nécessaire d'être pragmatique et d'autres moments où c'est vraiment nécessaire de prendre le risque. Surtout à la maison, où pour moi c'est impossible de penser à un match en disant qu'on va être conservateurs, qu'on va faire attention à ceci, faire attention à cela. Non! C'est l'autre équipe qui va faire attention à nous. Le plan de match, c'est pour gagner, pour mettre la pression, pour mettre nos fans derrière nous après la première minute. »

Losada se défend de se laisser guider par ses émotions. Lorsqu'on lui suggère que sa hardiesse a peut-être coûté un précieux point plus tôt cette saison à Austin, il rétorque que ses décisions à la fin de ce match avaient davantage été motivées par les ressources limitées à sa disposition que par une obstination aveugle à aller chercher trois points ou rien.

En d'autres mots, ce n'est pas parce que l'idée que certains se font du gros bon sens peut lui provoquer des démangeaisons qu'il en est allergique.

« Le prochain match, on va à Vancouver. C'est cinq heures de vol, trois heures de décalage horaire... Ce sont des circonstances difficiles, donc on va faire un match pragmatique. Ça, je peux dire ça. Mais à 15 minutes de la fin, si j'ai la sensation qu'on est sur le match et qu'on a une chance de gagner, alors le côté pragmatique, on va le mettre de côté et on va utiliser le côté plus offensif pour essayer de prendre les trois points. C'est comme ça. »