Ingérence dans le vestiaire, sorties publiques enflammées et promesses énigmatiques : les récentes décisions de Joey Saputo l’ont aspiré dans l’œil de la tempête alors que l’Impact traverse le pire début de saison de son histoire. Mais il n’y a pas qu’à Montréal où la gestion du proprio est remise en question.

Saputo fait aussi l’objet de vives critiques en Italie, où le Bologne FC, le club de Serie A dont il est le propriétaire, vient de terminer une campagne historiquement mauvaise. Lundi dernier, le Corriere di Bologna publiait un éditorial corrosif, sous la plume du journaliste Daniele Labanti, dans lequel étaient énumérées les plaies qui coulent l’équipe locale depuis trois ans. Les ressemblances avec la réalité de l’Impact sont frappantes.

« Pas besoin de figures rhétoriques et d'artifices littéraires pour décrire la gestion du football de Bologne: les résultats sont suffisants », commence Labanti, notant les 21 défaites encaissées par Bologne et son incapacité à atteindre la barre des 40 points à la conclusion du championnat italien.

« Plus de 100 millions dépensés par le propriétaire sans aucun résultat sportif. Un entraîneur avec un contrat renouvelé, mais cloué au pilori par les fans. Les sifflements du public. Aucun plan pour l’avenir. Un trou dans les droits de télévision. Le joueur le mieux payé de l’équipe, le plus grand investissement de l’ère Saputo, isolé et relégué au rang de parure. Une poignée de joueurs de deuxième division ajoutés et de qui on souhaite une explosion miraculeuse. »

Après cette pénible énumération, Labanti tranche : « Voilà la photographie d'une entreprise sportive à la dérive, sans guide, sans idées, sans compétences, soutenue par les injections volontaires d'argent de la riche famille du patron. Après trois années en Serie A, le chaos règne à Bologne. »

Visiblement curieux des résultats obtenus par Saputo en Amérique, Labanti apporte à l’attention des lecteurs les conclusions tirées par notre collègue Olivier Brett dans sa récente chronique intitulée « Président désigné ». Puis il repart dans sa tirade.

« Les équipes de Saputo sont dans un cul-de-sac à partir duquel il est difficile de voir une issue, sinon de recommencer et commettre des erreurs. Lorsqu'une entreprise dépense 5 millions d'euros pour acheter Avenatti et Falletti, penser à simplement corriger la situation en mettant un pansement est de la science-fiction. Lorsque le contrat de l’entraîneur est renouvelé et que sa cessation est discutée dix mois plus tard, parler d’un plan et demander plus de temps est grotesque. Bologne n'a pas besoin de temps, elle ne fait rien. ‘Il n'y a pas de vent favorable pour le marin qui ne sait pas où aller’, a écrit Sénèque. De bons marins, de bons capitaines et de bonnes idées sont nécessaires à Bologne. Ne continuez pas à sauter dans l'obscurité. Les faits suffisent à illustrer l'inadéquation du travail actuel. »

« Si Saputo ne s'est pas moqué de nous, ou si ses intentions sont encore ‘de bâtir une Bologne dont on puisse être fiers’, je pense qu'une gestion sérieuse et approfondie et une restructuration technique s'imposent, conclut le journaliste. Les résultats ne sont pas des opinions. »

Un entraîneur-chef sacrifié?

Toujours selon le Corriere di Bologna, Saputo arrivera en Italie mercredi pour y rencontrer son entraîneur-chef Roberto Donadoni. Saputo lui ferait alors part de sa décision de le démettre de ses fonctions.

Donadoni avait été placé à la barre du Bologne FC en octobre 2015, peu après la nomination de Saputo au poste de président du club. En juillet 2017, ses adjoints et lui s’étaient vu accorder une prolongation de contrat valide jusqu’à la fin de la saison 2018-2019. Il doit toucher un salaire de 4,2 millions d’euros pour le reste de la durée de l’entente.

Sous la gouverne de Donadoni, Bologne n’a jamais fait mieux qu’une 14e place au classement de la Serie A. L’équipe vient de terminer sa saison avec une fiche de 11-21-6.