La soirée était prometteuse, il y aurait forcément du drame. L’une des deux équipes allait devenir la première formation canadienne à remporter un match dans les séries de la MLS, l’autre allait en sortir très vite, ayant à peine eu le temps de goûter à la saveur enivrante des séries d’après-saison. La question était de savoir laquelle était laquelle…

Une performance irréprochable

« Ça risque d’être un peu brouillon au début du match », avait annoncé l’entraîneur-chef par intérim Mauro Biello, songeant sans aucun doute à la façon dont son équipe avait joué en première demie contre le même adversaire trois jours plus tôt. Mais c’était sans compter sur la réussite totale des changements tactiques auxquels il avait pensé en visionnant le match deux fois plutôt qu’une. Le besoin de stabilité au milieu de terrain a amené Patrice Bernier devant Marco Donadel et Nigel Reo-Coker, le besoin de surprendre a poussé Ignacio Piatti à l’aile gauche. « Et il faudra couper les services à Giovinco », avait-il ajouté.

Le meilleur buteur de la MLS, celui qui a réécrit le record de tirs au but vieux de 15 ans avec 181, le premier joueur de l’histoire de la MLS à réussir au moins 20 buts ET 10 aides dans la même saison, a dû trouver le match très long, privé de ballons en première demie et bien contenu en seconde. Les jaillissements de Michael Bradley n’ont pas eu le même éclat et Jozy Altidore s’est agité devant sans arriver à se démarquer. Non pas parce que ces trois joueurs avaient subitement perdu tout leur talent, mais plutôt parce qu’en face, l’équipe en bleu les surclassait.

L’Impact de Montréal a livré sans aucun doute sa meilleure performance de la saison. Et le plus beau de la chose, c’est que c’est Patrice Bernier qui a donné le ton en réussissant un superbe but, son premier de la saison, sur une passe non moins magnifique d’un Piatti en très grande forme. À ce moment précis, le capitaine a balayé du revers de la main toutes les frustrations des derniers mois, les moments de doutes et les remises en question, retrouvant des sensations qui avaient pavé sa très belle carrière. Ce 1 à 0 allait se transformer en 2-0 quinze minutes plus tard avec le but de Piatti, puis en 3-0 avant la fin de la demie avec le but de Drogba…12 buts en 12 matchs, faut-il le rappeler?

Le sort du Toronto FC était alors scellé. Un semblant de réveil au début du deuxième engagement a amené une timide marée rouge sur le terrain, vite engloutie par la vague bleue locale. Le douzième joueur, formé par les 18 069 spectateurs dans le stade, était en voix. Faisant fi de la froidure d’un hiver qui s’annonce, il a supporté pas à pas ses favoris, saluant les bons coups, célébrant les buts, acclamant les héros d’un match sans bavure, d’une rencontre électrisante.

Le Toronto FC était pour la première fois en séries après sept ans de vaches maigres et d’espoirs déçus et c’est la tête basse qu’il reprendra le chemin de la 401, Greg Vanney regrettant sans aucun doute d’avoir trop tardé à faire des changements qui auraient peut-être pu apporter un autre éclairage à ce match. Mais permettez-moi d’en douter. Lorsqu’on fait face à une équipe à qui tout réussit, comme l’Impact en ce jeudi soir, ni rien ni personne ne peut y faire quoi que ce soit.

La soirée était magnifique. Après le déluge de la veille et les vents puissants qui ont soufflé sur la ville, c’est un ciel dégagé qui a surplombé le stade, éclairé par une lune rose éclipsée seulement par la brillance des acteurs sur le terrain. Pour la première fois de son histoire, l’Impact de Montréal a franchi le premier jalon des séries. La route se poursuivra dimanche, dans ce même stade qui portera encore les échos de cette victoire, contre Columbus, battu deux fois par les Montréalais cette saison. Le douzième joueur se chargera sûrement de le leur rappeler.

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