Il y a de ces personnes qui laissent une trace lumineuse derrière elles, de celles qui vous font du bien, de celles qui gravent un sourire dans votre visage. Nathalie Moreau était l’une d’elles. Était. Un verbe qui la caractérise bien, « être », et un temps auquel on n’aurait pas dû le conjuguer, l’imparfait. Pas si tôt, pas si vite.

Nathalie Moreau est décédée lundi des suites du cancer de l'ovaire pour lequel elle était ambassadrice de l’Institut du cancer de Montréal pour la recherche de cette maladie avec sa jumelle Sylvie Moreau. Nathalie a travaillé à RDS à deux reprises au cours des quinze dernières années et c’est là que notre amitié s’est développée. Efficace dans son rôle des communications et du marketing, elle avait une délicatesse doublée d’un grand aplomb pour dénouer n’importe quelle crise. Une grande sensibilité aussi, ce qui explique bien pourquoi tout le monde l’aimait. Elle avait amorcé sa carrière à la Fédération des sports en fauteuil roulant, ce qui a certainement contribué à façonner son empathie et sa compréhension des autres. Puis elle est venue à RDS une première fois. Nous avons tout de suite sympathisé.

Au cœur d’une journée chargée, on se donnait parfois rendez-vous dans son bureau ou le mien, pour prendre une pause et refaire le monde. Et on reprenait quand le monde en avait besoin à nouveau. Sa grande gentillesse faisait qu’on avait toujours envie d’être avec elle, qu’on se sentait bien avec elle. Elle a ensuite quitté RDS pour un court séjour chez Bell avant de revenir « dans le monde du sport ». Jamais retour ne m’aura autant fait plaisir.

Nathalie me racontait comment elle était souvent confondue avec sa célèbre sœur, Sylvie. Avec patience, elle expliquait aux gens qu’elle n’était pas la comédienne, mais bien souvent on ne la croyait pas, me disait-elle un peu dépitée. Pourtant, bien qu’identiques, les deux sœurs étaient très différentes, l’une extravertie à l’exubérance enthousiaste, l’autre plus posée et discrète, travaillant dans l’ombre des feux de la rampe. Mais elles étaient parfaitement complémentaires, comme le soleil et la lune, brillant chacune de leur éclat propre.

Quand elle est partie vers Radio-Canada, c’était pour s’éloigner du monde du sport et se rapprocher de celui du spectacle où gravitait sa jumelle avec le projet de bâtir un jour quelque chose avec elle. Ce jour ne viendra pas, le destin étant cruellement intervenu entre-temps.

Nathalie laisse bien des gens derrière elle. Sa sœur Sylvie bien sûr, mais aussi son frère Philippe-André, réalisateur à RDS. Il a la grande sensibilité de Nathalie et le même souci du travail bien fait. Nathalie avait aussi une autre sœur (France), un frère aîné (Jean-Pierre), puis un conjoint, Martin Côté qui a aussi fréquenté RDS un certain temps, et trois fils qui viennent de voir l’un des phares de leur vie s’éteindre doucement.

Nous ne referons plus le monde Nathalie et moi. Elle nous l’a laissé perfectible, mais avec des outils pour l’améliorer : apprécier tout comme elle chacun des moments qui passent en ne prenant rien pour acquis, mais n’y voyant que des privilèges. La santé, l’âge, la famille, l’amitié sont des privilèges que trop souvent nous ne voyons plus comme tels.

Un jour où on lunchait ensemble, j’avais déploré le fait que nous ne nous voyions pas assez souvent. Elle m’avait répondu : « Ce n’est pas grave, on sait qu’on s’aime ». Et c’est vrai, on s’aime. Pour l’éternité.