Certes, comme vous, j'espérais que Bianca Andreescu puisse se faufiler en début de tournoi à Roland-Garros pour trouver ses marques et repères. Franchement, comment peut-elle bien se sentir sur le terrain après toutes les mésaventures des dernières semaines et mois?

Rappelons les faits : quarantaine pleine en Australie alors qu'elle manque de ressources physiques pour passer avec succès le test tout à fait unique que représente Su-Wei Hsieh au 2e tour.

Elle accepte tout de même de rester sur place à Melbourne pour disputer une épreuve de la série 250. Elle s'incline en demi-finale après avoir bataillé comme une morte de faim face à Marie Bouzkova. Visiblement et cruellement, Bianca manque de matchs et cela se reflète dans ses choix de jeu sur moments importants. Rappelons-nous que c'est le début d'une longue saison et qu'il ne faut pas la juger sévèrement après plus d'une année sans jouer. Comme elle est vaillante, dévouée et bien entourée, je suis convaincue que le meilleur reste à venir...

Entre ce tournoi à Melbourne de la série 250 et l'épreuve de la série 1000 à Miami, on compte à peu près un mois. Bianca a le temps de peaufiner son jeu, travailler sur l'aspect physique tout en continuant d'élaborer de nouvelles pistes en travaillant sur différentes avenues qui pourront éventuellement lui apporter beaucoup stratégiquement parlant.

Est-ce que vous êtes en mesure de réaliser jusqu'à quel point se rendre en finale à Miami est un exploit colossal dans un tournoi de si grande importance? Tout cela sans tournoi préparatoire? Malgré un petit pépin à un pied en finale face à la no 1 mondiale Ashleigh Barty, Bianca prouve avec 5 grosses victoires que son jeu est encore suffisamment percutant et que sa force mentale lui permet d'exceller en fin de match. Ce qu'elle produit en Floride est tellement gigantesque que cela me force à croire qu'elle finira éventuellement par revivre de grands exploits.

Pour que cela arrive, il faut créer du momentum. Un gros travail de fond sur et hors terrain, beaucoup de soins pour réparer et revigorer le corps et l'esprit sans oublier de jouer, si possible, un ou deux tournois préparatoires.

C'était bien cela le plan en débarquant à Madrid pour la saison terre battue, mais on lui annonce en sortant de l'avion que son test COVID est positif! Diantre! Bien prête à se reprendre la semaine suivante à Rome, mais les Italiens lui refusent l'entrée au pays, mais quelle poisse! Bianca est donc forcée de se rabattre sur le tournoi de Strasbourg juste avant Roland-Garros ce qui n'est pas idéal de jouer potentiellement 3 semaines de suite. Comme la prudence est le mot d'ordre dans son cas, Bianca livre deux beaux matches, mais déclare forfait ensuite puisqu'elle ressent des petites douleurs aux abdos. Dommage parce que la Roumaine Sorena Cirstea représentait un bien meilleur test que ne furent Zanevska et Lazaro Garcia lors des deux premiers tours, plus proches de la 250e que la 50e place.

Alors, encore une fois, Andreescu doit s'adapter rapidement d'entrée aux Internationaux de France face à la coriace Tamara Zidansek. Ne vous fiez pas à son classement de 85e mondiale. La Slovène compte en peu de temps une finale à Bogota, des victoires sur Jennifer Brady, Su-Wei Hsieh, Sloane Stevens en plus d'amener Ashleigh Barty à la 3e manche à Madrid il y a un mois. J'en rajoute : l'an passé à Roland-Garros, elle mène 3-0 au 3e set devant Garbine Muguruza avant de s'incliner 8-6. On peut vraiment dire que cette ancienne championne junior de planche à neige a trouvé sa voie à 23 ans. Elle torture Bianca pendant 3:20 pour lui arracher la victoire 9-7 à la manche ultime. 

Selon son entraîneur Sylvain Bruneau, Bianca a manqué de temps et de matches pour adapter son jeu de jambes à la réalité de la terre battue. Pour qu'elle soit efficace au maximum, il faut être plus à l'aise, que les déplacements se fassent plus naturellement. En entrevue après la défaite, on lit sur le visage de notre championne Grand Chelem jusqu'à quel point elle est déçue de ne pas avoir profité des opportunités en balles de bris à la 3e manche, mais très heureuse d'être en santé. Ce qu'elle a trouvé difficile fut de contrôler ses émotions. Avec plus de matchs emmagasinés, tout deviendra plus facile dans cet aspect aussi. S'entraîner fort, c'est bien, mais il n'y a rien comme les matches pour limer la nervosité. Prochaine étape, le gazon de Berlin et d'Eastbourne avant Wimbledon. 

Malgré tout, je ne suis pas inquiète pour elle, je sais jusqu'à quel point elle a de l'étoffe. Elle a sûrement pleuré un bon coup lundi soir, mais dès aujourd'hui il faut se tourner vers de verts pâturages pour la prochaine étape qui arrive à grands pas. Vivons avec elle dans l'expectative car de toute façon c'est la seule manière de se positionner pour accomplir de hauts faits d'armes. N'est-ce pas le grand leader Winston Churchill qui nous rappelle que le succès, c'est d'aller d'échec en échec sans perdre son enthousiasme?