PARIS, France - Quand Rafa retrouve Toni : pour la première fois depuis que son oncle, qui l'a accompagné jusqu'au plus haut niveau, conseille Félix Auger-Aliassime, Rafael Nadal affronte le jeune Canadien en huitièmes de finale de Roland-Garros dimanche.

Depuis 2018, l'entraîneur sexagénaire n'est plus aux côtés de son neveu, qu'il a façonné depuis l'enfance sur les terrains de Manacor, le fief familial des Nadal dans l'est de Majorque. Il apporte depuis plus d'un an son expérience à Auger-Aliassime, no 9 mondial, par ailleurs entraîné à temps plein par le Français Frédéric Fontang.

Mais Rafa et Toni, c'est 16 titres en Grand Chelem (sur ses 21) et dix sacres à Roland-Garros (sur ses 13) en dix-sept ans passés côte à côte sur le circuit ATP.

Va-t-il alors donner des conseils à « FAA » avant qu'il défie le roi de l'ocre?

« Bien sûr que non! J'ai dit à Félix que mon éthique ne me permet pas de lui donner des conseils pour battre mon neveu. C'est comme si je donnais des conseils à quelqu'un pour battre mon fils! », sourit l'entraîneur majorquin lors d'un point-presse improvisé au bord du court no 12, où le Québecois s'est entraîné à la mi-journée.

« Quand Félix est venu à l'académie me demander qu'on collabore, je lui ai dit: "Si on joue contre Rafa, bien sûr que je ne vais pas faire ça quand tu vas marquer un point", raconte-t-il en montrant son poing serré. Et si Rafael avait dit non, je ne l'aurais pas pris. »

« Plus qu'un oncle »

Sur le Central dimanche après-midi, il prévoit de suivre ce match forcément particulier depuis un endroit « neutre ». Ni dans la box de l'un, ni dans celle de l'autre.

Si le sujet a occupé près de la moitié des questions en conférence de presse, ni Nadal ni Auger-Aliassime ne font tout un plat de ces retrouvailles familiales.

« Pour moi, c'est très simple : c'est mon oncle, je ne crois pas qu'il pourra vouloir que je perde, sans aucun doute, mais il est professionnel. Maintenant, il aide un autre joueur. Je n'ai aucun problème avec ça », désamorce « Rafa ».

« Il n'y a pas d'histoire : je sais les sentiments qu'on a l'un pour l'autre. Je sais qu'il veut le meilleur pour moi, et moi le meilleur pour lui. On est avant tout de la même famille. Pas juste de la même famille : on est une famille qui vit ensemble tout le temps, on habite dans le même village, on passe du temps ensemble à l'académie. On a vécu des émotions incroyables ensemble. Il est plus qu'un oncle, confie-t-il. Je ne pourrai jamais le remercier assez pour tout ce qu'il a fait pour moi pendant tant d'années. »

Toni l'a-t-il consulté avant d'accepter de conseiller le talent canadien?

« Il n'a pas à me demander quoi que ce soit. Il est assez grand pour prendre ses propres décisions, non? », sourit le neveu.

« Cas particulier »

« On savait dès le départ que c'était quelque chose qui pouvait arriver, évidemment un cas particulier », rappelle « FAA » (21 ans), qui n'avait jamais gagné le moindre match à Roland-Garros avant cette édition 2022, mais n'a plus perdu un set depuis qu'il a été mené deux manches à zéro au premier tour.

« Quand on est ensemble, on parle de Rafa, de ce qu'il fait bien, de ce que je peux apprendre de lui, des choses aussi que Toni trouve que Rafa faisait moins bien », explique-t-il.

Cette fois néanmoins, Auger-Aliassime ne voit pas l'utilité de longs discours, même avec celui qui connaît vraisemblablement le mieux Nadal.

« Je ne sais pas si j'ai besoin qu'il m'explique comment Rafa joue, on sait tous ce qu'il fait bien... Je ne crois pas que Toni va m'apprendre quelque chose de nouveau sur le jeu de Rafa », sourit le Montréalais, qui a mis l'accent sur son déplacement et son jeu de jambes auprès de l'entraîneur majorquin.

« Même avec Fred (Fontang), ce n'est pas comme s'il y avait beaucoup de choses à dire. Je le connais. Au final, c'est à moi de trouver des solutions pendant le match. Personne, ni Toni, ni Fred, ni moi n'avons la recette pour gagner. De toute facon, s'il y avait un secret pour battre Rafa, il n'aurait pas gagné treize fois ici... »

Auger-Aliassime voit avec ce face-à-face « une occasion de voir où est-ce que je me situe par rapport à lui ».

Pour Toni, dans tous les cas, se profile « une défaite douloureuse ».