Que doit faire la direction des Blue Jays?
À 14 jours de la date limite des transactions, les Blue Jays de Toronto se retrouvent dans une situation qui est loin d'être évidente. On vend, on achète, on se débarrasse, on continue, on fait quoi?
La saison 2024 est possiblement le pire scénario anticipé. Étrangement, la saga Ohtani a été le début d'une panoplie d'évènements qui ont basculé contre les Jays. Tout l'entourage de l'équipe, incluant les partisans, semblait excité de la possibilité de mettre sous contrat le meilleur joueur au monde. Savoir que les propriétaires étaient prêts à verser autant d'argent afin d'améliorer l'équipe était une situation rêvée.
On connaît la suite. Pas de Shohei Ohtani, on se tourne plutôt vers un vétéran de 39 ans, Justin Turner, d'un joueur d'utilité, Isiah Kiner-Falefa, d'un frappeur de choix en Daniel Vogelbach, et on décide de ramener Kevin Kiermaier. Ces changements n'excitaient personne. Pas de Cody Bellinger non plus pour venir appuyer Vladimir Guerrero fils et Bo Bichette. Voulant se fier au talent à l'interne, la direction a cruellement surévalué le personnel en place.
On commençait la saison avec beaucoup trop d'espoir. L'espoir que Justin Turner puisse influencer l'attaque à produire davantage avec des coureurs en position de marquer. L'espoir que Daulton Varsho explose cette année, l'espoir que George Springer, malgré ses 34 ans, puisse jouer comme s'il en avait 27. L'espoir que Bo Bichette soit encore parmi les meneurs au chapitre des coups sûrs, l'espoir que Vladimir Guerrero fils produise comme à sa saison 2021. L'espoir qu'Alek Manoah redevienne le lanceur dominant d'il y a deux ans, l'espoir que Cavan Biggio puisse enfin s'établir comme un joueur régulier, en fait, l'espoir que tout le personnel qui était de retour puisse être meilleur que l'an dernier.
Pouvait-on réellement demander au personnel de partants d'être meilleur qu'en 2023? On a mis sous contrat Yariel Rodriguez afin d'ajouter un autre partant, mais difficile de faire mieux alors que les quatre principaux partants - Kevin Gausman, Jose Berrios, Chris Bassitt et Yusei Kikuchi - avaient amorcé en 2023 entre 31 et 33 départs, tout en maintenant une moyenne de points mérités aux alentours de 3,60.
Évidemment, il est impossible de prévoir les blessures. Celle à Jordan Romano n'a pas aidé la cause, mais elle exposa le manque de profondeur. La direction n'a pas tous les torts cependant. Vrai que les attentes étaient trop élevées pour certains, mais comment expliquer les déboires de Bo Bichette? De Daulton Varsho? D'Erik Swanson pour ne nommer que ceux-ci?
Qu'en est-il des espoirs de l'organisation? Honnêtement, c'est plutôt mince. Ricky Tiedemann est le plus bel espoir, mais le lanceur gaucher est souvent blessé depuis le début de sa carrière. Orelvis Martinez a un bel avenir, mais ce joueur de deuxième but, qui avait commencé la saison au niveau AAA, a été suspendu 80 matchs pour avoir utilisé une substance illégale. Leo Jiménez a aussi un bel avenir. S'il joue bien à l'arrêt-court en l'absence de Bo Bichette, ça pourrait faire bouger les choses. Mais peu importe les différentes publications sur le réseau de filiales, les Jays se retrouvent en moyenne au 25e rang sur les 30 équipes. Autrement dit, l'organisation est loin d'être en mesure de rebâtir rapidement avec ce qu'ils ont en place.
Sachant tout ça, quelle serait la meilleure décision pour l'organisation afin de basculer la saison 2024? Voici quelques options. Je ne crois pas à une vente des effectifs. Vladimir Guerrero fils va rester un membre des Blue Jays. Jose Berrios et Yariel Rodriguez sont sous contrat jusqu'en 2028. George Springer et Kevin Gausman jusqu'en 2026. Chris Bassitt et Chad Green jusqu'en 2025. Jordan Romano deviendra joueur autonome en 2026 et Daulton Varsho en 2027. La base est là. Cependant, le joueur qui pourrait être sacrifié est Bo Bichette. Il deviendra joueur autonome après la saison 2025, donc il a encore une belle valeur. Mais si Bichette ne frappe pas, ça devient difficile de le garder puisqu'en défense, il est parmi les pires joueurs à sa position. Par ailleurs, je suis loin d'être convaincu de son désir de rester avec les Jays.
Cependant, si les Jays veulent faire un grand coup, les joueurs qui ont réellement de la valeur sont leurs lanceurs partants. Toutes les équipes recherchent des lanceurs. Peuvent-ils sacrifier Berrios? Gausman? Green?
Et si au contraire, les Jays décidaient d'être acheteurs? Ajouter un Luis Robert ou encore un Jazz Chisholm afin d'appuyer Vlad Guerreo fils comme le proposait Steve Philips sur le MLB Network? Toronto est un gros marché. Les propriétaires viennent de dépenser une fortune pour améliorer le stade. Les Jays ne peuvent pas se permettre une reconstruction.
L'équipe a sous-performé, mais reste-t-il assez de temps pour sauver la saison? En fait, la vraie question selon moi est la suivante : est-ce que la direction en place est capable de gérer cette crise? Pour moi, c'est le nerf de la guerre et la réponse est non. Voilà pourquoi les Jays sont dans le trouble.
On a attendu trop longtemps pour amener un vent de fraîcheur dans la direction baseball. À moins de deux semaines de la date limite, les Jays devront prendre de sérieuses décisions et sortir l'équipe des eaux troubles, alors que c'est cette même direction qui les a placés dans cette situation. En fait, je souhaite un statu quo à la date limite des transactions afin de ne pas empirer les choses, mais qu'un changement de direction serait la meilleure chose pour redresser le bateau, quitte à oublier la saison 2024, mais repartir en force en 2025.
Bravo à Émilien Pitre et Louis-Philippe Langevin
Je voulais souligner l'exploit des deux joueurs québécois qui ont été repêchés respectivement en 2e ronde par les Rays pour Émilien Pitre et en 4e ronde par les Royals pour Louis-Philippe Langevin.
Un exploit fabuleux puisque la planète baseball ne cesse de grandir, les programmes universitaires sont remplis plus que jamais d'athlète de pointe et les équipes du baseball majeur peuvent piger dans une mer de joueurs de baseball. Et ils ont choisi deux gars de chez nous, développés au Québec, dans les programmes de la fédération.
Je vais toujours crier à qui veut l'entendre que de se faire repêcher et de jouer dans le baseball professionnel et un grand exploit. Ce qu'Édouard Julien a réalisé jusqu'ici, Abraham Tor, Otto Lopez, Charles Leblanc, n'est rien de moins que fantastique! Mais aussi, Archer Brookman dans la filiale des Tigers, Pier-Olivier Boucher chez les Braves, Nicolas Deschamps chez les Jays, Miguel Cienfuegos chez les Padres, Eric Cerantola chez les Royals, Nathan Landry chez les Red Sox et Jeremy Pilon chez les Rays.
Ajoutons tous les Québécois qui jouent dans la ligue Frontier avec les Capitales et les Aigles, entre autres. Vous gardez les flammes bien en vie pour tous les jeunes qui rêvent de jouer un jour pour une organisation du baseball majeur, comme Claude Raymond l'a fait pour moi, comme Denis Boucher, Russell Martin, Éric Gagné et j'en passe qui l'ont fait pour une génération de joueurs.