Qui pourra arrêter Max Verstappen et Red Bull?
C'est la grande question à l'aube de la saison 2023 de Formule 1, qui commencera cette fin de semaine. Il faut dire que l'an dernier, Red Bull a été particulièrement dominant. Dix-sept victoires en 22 Grand Prix (15 pour Max Verstappen et deux pour Sergio Perez), 28 podiums, un titre des pilotes acquis avec quatre courses à faire et celui des constructeurs remporté lors de l'épreuve suivante...
Il est clair que l'écurie menée par Christian Horner arrive en 2023 comme étant la grande favorite.
Les courts essais hivernaux (seulement trois jours à Bahreïn) sont venus confirmer cet énoncé. Mais comment se porte la concurrence à l'aube d'une saison 2023 sous le signe de l'évolution, comparativement à la grande révolution technique de 2022? Tour d'horizon des forces en présence.
Red Bull au sommet de son art
Je le disais, les essais hivernaux de la semaine dernière sont venus confirmer la bonne forme des Red Bull. Max Verstappen a été le plus rapide dès la première journée, en plus de prendre le deuxième rang derrière Zhou Guanyu lors du deuxième jour de tests.
Quant au jour 3, c'est Sergio Perez qui a été le plus rapide, enregistrant le meilleur temps de la semaine.
Évidemment, on le répète chaque année, il faut prendre les résultats des essais d'avant-saison avec un grain de sel. Certaines équipes cachent leur jeu, d'autres effectuent des tours rapides avec peu d'essence, et surtout, les voitures vont encore beaucoup évoluer pendant la saison. Un avertissement qui tiendra pour toutes les équipes. Sauf que pour l'instant, c'est la seule référence sur laquelle s'appuyer et Red Bull a dégagé l'image d'une équipe en plein contrôle. La voiture s'est montrée rapide et fiable tout au long des essais.
Pour le reste, on sait que Red Bull n'est pas du genre à gaspiller les occasions qui se présentent à l'équipe. Verstappen a été excellent lors des deux dernières saisons, l'équipe derrière les stratégies rate rarement son coup, bref, si la fiabilité et les performances sont au rendez-vous, ce sera très difficile de rivaliser avec les champions en titre.
Il reste maintenant à savoir comment Verstappen et Perez collaboreront entre eux, alors que la tension entre les deux a monté un peu en fin de saison. A-t-on profité de la saison morte pour régler de vieux conflits qui traînaient? C'est à espérer, car sinon, la présence de Daniel Ricciardo comme pilote d'essais au sein de l'écurie pourrait alimenter quelques rumeurs en cours de saison.
Finalement, il faudra aussi surveiller l'impact que pourraient avoir les sanctions sur les tests aérodynamiques en lien avec le dépassement du plafond sur les dépenses en 2021. Si les effets ne se font pas encore sentir, cela pourrait représenter une opportunité pour Ferrari et Mercedes en fin de saison.
Des changements pour Ferrari
Un peu comme Red Bull, les essais hivernaux chez Ferrari se sont déroulés sans trop d'ennuis. La voiture est compétitive et fiable à première vue, et bien qu'il est important de ne pas tirer de constats trop définis après seulement trois jours de tests, on peut avancer que la Scuderia sera encore une fois la principale rivale de Red Bull.
Par contre, contrairement à l'an dernier où l'on sentait que Ferrari commencerait la saison avec une petite longueur d'avance sur ses rivaux, cette fois, on a l'impression que les Rouges ont tout de même un écart à rattraper sur Red Bull en vue de la première course de la saison.
Surtout, c'est au chapitre de la gestion des courses qu'on voudra voir une progression cette année. Le nombre d'erreurs a été trop grand l'an dernier pour se battre pour le titre, et cela a engendré plusieurs changements.
Le plus important est évidemment le départ du directeur de l'écurie, Mattia Binotto, qui a été remplacé par Frédéric Vasseur. L'ancien directeur d'Alfa Romeo aura le mandat de relancer l'équipe, mais aussi, de faire progresser encore plus Charles Leclerc. Les deux hommes se connaissent bien pour avoir travaillé ensemble dans les catégories inférieures et avec Alfa Romeo lors de l'arrivée de Leclerc en F1.
Il y a aussi des changements au département stratégique, puisque le responsable de la stratégie, Inaki Rueda, s'est vu confier un nouveau poste à l'usine. Il sera remplacé sur le muret des puits par Ravin Jain.
Il faudra donc voir si l'équipe sera en mesure de réduire le nombre d'erreurs en cours de saison. L'équipe stratégique devra en faire moins, mais aussi les pilotes, alors que Leclerc et Carlos Sainz ont commis leur part de faux-pas pendant la saison. C'est ce qui pourrait faire la différence entre une lutte serrée toute la saison et un autre championnat dominé par Red Bull.
« Une montagne à grimper » chez Mercedes
Ce sont les mots utilisés par Lewis Hamilton au terme des trois jours d'essais sur le Circuit de Sakhir. C'est que Mercedes a connu une semaine en montagnes russes. Parfois encouragé par des progrès évidents sur la monoplace de l'an dernier, parfois démoralisé par des ennuis de fiabilité, ce n'est pas facile de bien cerner le véritable rythme des Flèches d'argent… de retour en noir pour sauver du poids (comme bien d'autres équipes, d'ailleurs).
Commençons par le positif. Le point le plus important, et les deux pilotes l'ont souligné à plusieurs occasions, c'est que le nouvelle Mercedes ne marsouine plus. Un soulagement pour Hamilton et George Russell qui se sont fait brasser plus souvent qu'à leur tour au volant l'an dernier, mais surtout, qui permet à la voiture de gagner en performance, notamment dans les lignes droites.
Du côté négatif, l'écurie de Toto Wolff a connu sa part de problèmes, particulièrement lors de la deuxième journée. Lewis Hamilton a alors rencontré des ennuis avec son fond plat et George Russell a perdu du temps de piste en raison d'un problème hydraulique.
En termes de temps au tour, Lewis Hamilton a inscrit le deuxième meilleur temps des trois jours de tests, ce qui est encourageant en soi. Malgré tout, on est prudent chez Mercedes et on concède déjà qu'il y a encore du travail à faire avant de vraiment pouvoir rivaliser avec Red Bull et Ferrari.
Il faut cependant garder en tête que l'écurie a gagné beaucoup de terrain en cours de saison l'an dernier, rivalisant avec les deux autres écuries de pointe en fin d'année, donc attendons avant de les écarter de la course trop rapidement. Surtout que Mercedes a souvent caché son jeu pendant les essais au cours des dernières années et que l'équipe compte sur un duo de pilote très constant.
Le mystère Alpine
Pour savoir réellement quel genre de rythme présentera Alpine cette saison, il faudra attendre la séance de qualifications ce samedi. Parce que les essais hivernaux ont donné bien peu de détails.
En fait, lorsqu'on regarde uniquement les chiffres, on peut avoir l'impression que la nouvelle monoplace est une catastrophe. Si on jette un coup d'œil au meilleur temps au tour de chaque écurie, Alpine vient au dernier rang. Au chapitre du nombre de tours complétés, l'écurie française est à l'avant-dernier échelon. Alpine est également la seule équipe dont le tour le plus rapide des essais 2023 est plus lent que celui des essais 2022.
Finalement, ajoutez à tout cela que la monoplace a eu quelques épisodes de marsouinage, et vous n'avez pas beaucoup de raisons d'être optimistes à une semaine du début de la saison.
Mais, il y a un mais. Lorsqu'on écoute les commentaires des pilotes et du directeur, Otmar Sfaznauer, c'est un son de cloche bien différent. En fait, l'optimisme règne chez les Bleus (et rose)! Les deux pilotes sont satisfaits du comportement de la voiture, on assure que tous les objectifs ont été atteints et on entamera la saison en étant « prudemment optimiste », pour reprendre les mots du directeur.
Comment cela s'explique-t-il? C'est qu'Alpine s'est concentré principalement sur les longs relais. On n'a pas fait de tours en pneus C4 ou C5, les plus tendres de la gamme de Pirelli. Pas de tours non plus avec un réservoir d'essence peu rempli. Et déjà cette fin de semaine, Alpine comptera sur une première évolution. Impossible donc de savoir vraiment à quoi s'attendre samedi en qualifications. L'objectif de conserver le quatrième rang des constructeurs est toutefois bien clair.
La grande nouveauté cette saison pour Alpine, c'est bien sûr l'arrivée de Pierre Gasly. Si l'écurie a complètement raté son coup l'an dernier en perdant les services de Fernando Alonso et d'Oscar Piastri en l'espace de quelques jours, les choses ont finalement bien tourné. Avec Gasly, Alpine a un pilote d'expérience, mais qui peut encore se développer. Surtout, le Français mérite une nouvelle chance de se faire valoir hors de l'équipe B de Red Bull. Ce sera intéressant de voir le genre de saison qu'il pourra offrir.
Un autre faux départ pour McLaren?
Un peu comme Alpine, McLaren n'a pas connu des essais très concluants au niveau des chiffres. Mais contrairement à Alpine, le sentiment au sein de l'équipe n'est pas très rassurant.
Dès le lancement de la voiture, les commentaires du nouveau directeur Andrea Stella laissaient craindre un manque de performance. Stella avait alors affirmé qu'il n'était pas pleinement satisfait de la monoplace présentée.
Lors des tests, McLaren est de loin l'équipe qui a le moins roulé avec une quarantaine de tours de moins qu'Alpine à l'avant dernier rang. L'écurie a eu plusieurs problèmes mécaniques tout au long des trois jours d'essais. Le temps le plus rapide de McLaren place l'équipe au huitième rang.
De plus, l'écurie admet qu'elle n'a pas atteint tous ses objectifs de développement. On compte beaucoup sur une évolution importante lors du Grand Prix d'Azerbaïdjan, le quatrième de la saison, pour rectifier le tir. Entre-temps, ça pourrait être compliqué pour McLaren.
C'est donc dans ce contexte qu'Oscar Piastri fera son arrivée avec l'équipe. Piastri représente l'une des meilleures recrues à faire son entrée en F1 depuis quelques années. Champion de F3 et de F2 dès sa première année, son C.V. est impressionnant, mais les attentes sont élevées. Surtout qu'il doit composer avec un autre bon jeune pilote en Norris, qui est bien en selle chez McLaren... et qui espère pouvoir compter sur une voiture qui lui permettra d'exprimer son talent.
Le début d'une longue transition pour Alfa Romeo
Les changements sont nombreux chez Alfa Romeo et se continueront d'ailleurs au cours des prochaines années. Frédéric Vasseur a pris le chemin de Ferrari, si bien que des changements à la direction de l'écurie étaient requis. Andreas Seidl, auparavant directeur chez McLaren, prend en charge tout le groupe Sauber, et Alessandro Alunni Bravi agira comme directeur d'équipe.
De plus, la saison 2023 sera la dernière de l'écurie sous l'appellation Alfa Romeo, qui se retire de l'opération. Audi arrivera officiellement en 2026, si bien que l'équipe devrait retrouver l'appellation Sauber au cours des prochaines saisons. Il sera intéressant de voir comment cette transition se passera en attendant la grande arrivée d'Audi.
Pour les pilotes, pas de changements, si ce n'est que la coupe de cheveux spectaculaire de Valtteri Bottas. Le vétéran fera équipe avec Zhou Guanyu.
Sur la piste, c'est encourageant. L'écurie a connu une fin de saison 2022 très difficile, mais a démontré un bon rythme à Sakhir et Bottas assure que la voiture est bien meilleure que celle de l'an dernier. D'ailleurs, Zhou Guanyu a effectué le meilleur temps de la deuxième journée d'essais et Bottas, le troisième meilleur chrono des trois jours d'essais. Ne vous attendez pas à cela ce week-end, mais il reste qu'il s'agit de signes encourageants pour une équipe qui voudra se retrouver plus souvent dans les points.
Aston Martin attire le regard de tout le monde
Les essais n'ont pas commencé comme prévu pour Aston Martin. En début de semaine, on apprenait que Lance Stroll s'est blessé lors d'un entraînement de vélo et qu'il allait devoir céder sa place à Felipe Drugovich.
Puis, Drugovich a dû immobiliser sa voiture en bordure de piste en raison d'un problème électrique... lors du tout premier tour des essais!
Était-ce un signe des jours à venir? Il semble bien que non, car Aston Martin est définitivement l'écurie qui a attiré le plus l'attention au cours de la dernière semaine. Fernando Alonso et Drugovich ont pris le volant d'une voiture rapide, équilibrée et grandement améliorée comparativement à l'an dernier, si bien qu'on se demande si l'écurie de Lawrence Stroll ne sera pas l'équipe à battre en milieu de peloton cette saison. La monoplace semble aussi particulièrement efficace pour préserver les pneus sur les longs relais.
Aston Martin n'a jamais caché ses ambitions et c'est encore une fois le mot qui définit le mieux cette écurie. La voiture 2023 est la première sous la supervision du nouveau directeur technique, Dan Fellows, anciennement chef de l'aérodynamisme chez Red Bull. On a remplacé un champion du monde parti à la retraite par un autre ancien champion du monde. La nouvelle usine sera terminée en cours de saison. Aucun doute, on ne lésine pas sur les efforts chez les Verts.
Attendons maintenant de voir si le rythme affiché lors de la dernière semaine peut se poursuivre une fois que tout le monde sera à fond en qualifications samedi. Attendons aussi de voir à quel point la blessure de Stroll a nui ou non à sa préparation. Mais chose certaine, Aston Martin voudra connaître une bien meilleure saison que celle de l'an dernier, et ça semble bien parti pour être le cas!
Haas mise sur l'expérience
Le temps passe vite chez Haas. Il y a deux ans à peine, on misait sur la jeunesse avec un duo de recrues en Mick Schumacher et Nikita Mazepin. Maintenant, on entamera la saison avec une paire de vétérans en Kevin Magnussen et Nico Hulkenberg.
Ça démontre bien comment les objectifs de l'écurie ont évolué. Guenther Steiner ne veut plus jouer au gentil et patient directeur d'école qui doit accepter les erreurs de ses élèves. Chaque dollar est compté chez Haas, et il veut compter sur des pilotes fiables qui ne vont pas détruire la voiture trop souvent et qui iront chercher le maximum de points disponibles. Haas n'a pas le budget pour se permettre des erreurs d'apprentissage.
Quand on vous dit que chaque sou est compté, on le réalise avec le nouveau muret des puits de l'équipe. Seulement trois personnes peuvent y prendre place! L'écurie estime que ça lui permettra de faire des économies de 250 000$ qu'elle pourra investir dans la voiture. Il n'y a pas de petits montants!
Bref, l'écurie espère aller chercher sa part de points grâce à son duo de pilotes d'expérience. Les essais se sont bien passés et l'équipe américaine devrait être en mesure de lutter en milieu de peloton.
Déjà l'année de la dernière chance pour Tsunoda?
Chez AlphaTauri, ce sera intéressant de suivre la dynamique particulière du duo de pilotes. Pourquoi particulière? Parce que d'un côté, vous avez Yuki Tsunoda qui disputera sa troisième saison avec une équipe qu'il connaît bien maintenant et qui devrait profiter du départ de Gasly pour prendre la place de leader. Sauf que le Japonais a encore beaucoup de maturité à prendre dans son pilotage et il n'a pas encore été en mesure de répondre aux attentes placées en lui pour l'instant.
De l'autre côté du garage, on retrouvera un pilote recrue en Nyck De Vries. Mais ne vous laissez pas berner par le terme « recrue ». Oui, il s'agira de sa première saison en Formule 1. Cependant, De Vries a énormément d'expérience. Il est notamment champion en Formule Renault 2.0, en Formule 2 et en Formule électrique. À 28 ans, il est six ans plus vieux que Tsunoda. Il a aussi pris beaucoup d'expérience en tant que pilote d'essais de Mercedes et on le voyait souvent aux côtés de Toto Wolff dans les paddocks.
Bref, même si Gasly n'y est plus, c'est tout un défi qui sera opposé à Tsunoda. Ce sera à lui de monter son niveau d'un cran, car il ne voudra pas se faire éclipser par le nouveau venu au sein de l'équipe. Et comme Red Bull n'est pas très patient avec ses pilotes, un écart trop grand avec De Vries pourrait amener son lot de conséquences...
Beaucoup d'espoir chez Williams
Malheureusement, l'écurie Williams a retrouvé le dernier rang au classement des constructeurs l'an dernier.
Par contre, il y plusieurs raisons d'avoir de l'espoir chez Williams. À commencer par l'arrivée de James Vowles comme directeur d'équipe. Le départ de Jost Capito cet hiver a été une surprise, mais l'arrivée de Vowles offre de belles perspectives à l'écurie. Il s'agira de sa première expérience comme chef d'équipe, mais l'ancien stratégiste de Mercedes est une figure respectée et était un rouage important des années de domination de l'écurie allemande.
La présence d'Alex Albon peut aussi donner espoir à Williams. À son retour en Formule 1, Albon a fait du bon travail et a permis à l'écurie d'aller chercher de précieux points pendant que Nicholas Latifi avait toute sorte d'ennuis avec cette voiture. Albon n'est pas un futur champion du monde ni un espoir de premier plan comme Piastri, par exemple, mais je demeure convaincu qu'il peut devenir un très bon pilote en milieu de peloton. Un de ses défis sera maintenant de mieux communiquer avec ses ingénieurs afin d'aider l'équipe à améliorer la voiture.
Cette année, il fera équipe avec Logan Sargeant. Le pilote américain a terminé quatrième l'an dernier à sa première saison complète en Formule 2.
Finalement, l'écurie a aussi connu de bons essais. Albon et Sargeant ont beaucoup roulé et Williams figure au deuxième rang pour le nombre de tours complétés derrière AlphaTauri.
Mais est-ce que tout ça permettra à l'équipe de se sortir du dernier rang des constructeurs? C'est un mandat beaucoup plus facile à dire qu'à faire!
Bref, les questions sont nombreuses à l'aube de cette nouvelle saison. RDS sera votre destination pour suivre cette saison 2023 en diffusant, encore une fois cette année, tous les Grand Prix. On vous donne donc rendez-vous ce samedi pour la séance de qualification du Grand Prix de Bahreïn à 9 h 30, et dimanche, pour la course, dès 9 h avec une émission d'avant-course d'une heure.
À toutes et à tous, je vous souhaite une excellente saison!