« Il a eu à bûcher bien plus que les gens peuvent penser »
MONTRÉAL – Aucun joueur du Canadien n'a osé confirmer la retraite de Carey Price, mais ils parlaient tous comme si le gardien avait accroché ses jambières. Jake Allen l'a décrit comme l'étalon de référence depuis 15 ans tandis que Brendan Gallagher a milité pour le retrait de son chandail.
La journée était particulière, lundi, dans l'environnement du Tricolore. Comme si l'odeur de la retraite de Price flottait dans les quartiers généraux du club à Brossard.
« Tout le monde trouve ça dommage que ça finisse en raison d'une blessure. Il a été tellement dominant depuis 15 ans. C'est difficile de le voir partir comme ça, on aurait voulu qu'il quitte comme il le souhaitait, comme en gagnant une coupe Stanley », a mentionné le défenseur David Savard qui, sans le savoir, l'a empêché d'en soulever une alors qu'il évoluait pour le Lightning de Tampa Bay quand Price a mené le Canadien en finale au printemps 2021.
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« Le hockey, c'est une chose, mais il y a aussi une vie après notre carrière. C'est à ça qu'il faut penser », a-t-il ajouté.
Le mieux placé pour parler était toutefois Allen. Les deux gardiens n'ont que trois ans de différence, mais Price a disputé 355 matchs de plus que lui (712 contre 357). En tout respect, Allen a expliqué que les partisans ne pouvaient pas s'imaginer ce que ça exige comme dévouement.
« J'ai une grande admiration pour les gardiens qui parviennent à jouer si longtemps dans la LNH. Il a eu à composer avec plusieurs choses que les gens ne peuvent pas vraiment comprendre. Et il l'a fait pour le chandail qu'il porte. […] Il a eu à bûcher bien plus que les gens peuvent penser », a confié Allen.
Dans le cas de Price, on parle de cinq saisons de plus de 60 matchs depuis son arrivée en 2007-2008 et il a frôlé ce plateau à deux autres reprises.
« Jouer si souvent pendant 14-15 ans, c'est la chose la plus impressionnante à mes yeux tout en ayant de grandes performances. Ça magane le corps de jouer avec de la douleur et de l'inconfort si souvent. Le hockey est plus exigeant que jamais, il y a toute une différence depuis mon premier match il y a 10 ans, c'est devenu beaucoup plus difficile pour le corps », a souligné Allen.
« Qu'il ait traversé ça, sans se lamenter, c'est fabuleux à mes yeux », a insisté celui qui est fasciné par la longévité des Price, Henrik Lundqvist, Martin Brodeur et Marc-André Fleury.
Difficile d'identifier un seul élément pour décrire l'arsenal supérieur de Price, qui trône au premier rang des victoires pour les gardiens du CH avec 361, mais Allen a résumé le tout ainsi.
« Si tu regardes les 15 dernières années, il a été l'étalon de référence pour les gardiens, il était si fluide et rapide devant son filet. Les entraîneurs des gardiens, les jeunes au hockey mineur et même des gardiens de la LNH s'inspirent de lui. Son jeu n'a pas tant changé alors que j'ai complètement modifié ma technique au fil du temps. Il n'a pas eu besoin de le faire car sa fondation était si solide », a vanté Allen.
Au final, Price se retrouve toutefois avec un corps hypothéqué au genou droit, aux chevilles et au dos. Lors de son point de presse, Price a confirmé, sans hésitation, qu'il accepte ce prix à payer. Allen voit une seule option pour limiter les dégâts physiques.
« Si tu changes la manière de jouer, tu vas revenir au style debout des années 1980 et ça ne fonctionnerait pas du tout. Ce n'est pas toujours bon pour notre corps, mais les choses avancent dans cette direction. Ainsi, je me dis que les jeunes ne doivent pas commencer à jouer comme des gardiens de la LNH quand ils sont très jeunes. Ça risque d'affecter leur corps éventuellement. Je prévois que les gardiens joueront encore moins de matchs par année à l'avenir. Je serai sans doute à la retraite quand ça se produira », a décortiqué Allen.
Pour piger dans les souvenirs à propos de Price, l'avis de Gallagher s'imposait en raison de leur longue association.
« Quand on était dans un match ultime en séries, contre Toronto ou Boston, je me sentais si nerveux, mais je me levais la tête et il était tellement calme, ça me soulageait énormément. D'exercer une telle confiance sur le reste de ses coéquipiers, c'est très spécial », a relevé Gallagher qui n'oubliera jamais ses spectaculaires arrêts de la mitaine et la foule qui scande son nom à tout rompre.
Quelques minutes plus tard, Gallagher a réitéré que le chandail de Price devait être retiré. En plus de ses accomplissements, Gallagher a rappelé que les gens venaient voir le CH expressément pour admirer le prouesses du 31.
Sur un ton différent, Allen y est allé d'une confidence amusante.
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« Je l'avais croisé pour la première fois dans un bar quand j'étais plus jeune, mais j'étais trop gêné pour aller le voir, je ne jouais pas encore dans la LNH. »
Fleury aussi a vécu des préoccupations reliées à l'âge
Par une belle coïncidence, le Wild du Minnesota et un certain Marc-André Fleury s'entraînaient également au Complexe Bell de Brossard, lundi.
À 37 ans, Fleury admet que ça lui fait un pincement au cœur de voir qu'un homologue de la trempe de Price doive envisager la retraire en raison d'une blessure.
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« C'est sûr. C'est plate et triste de voir que ce soit ça qui l'arrête, pour l'instant. Ce n'est pas car il est mauvais », a mentionné Fleury qui vieillit bien.
Car oui, le Québécois se considère chanceux d'avoir été plus épargné au niveau du bilan de santé.
« Ouais, il ne reste plus beaucoup de gardiens de mon âge dans la LNH, même si ça fait bizarre dire ça. Les cheveux blancs me poussent depuis l'an passé. Ça me fait réaliser que je suis chanceux, je sais que ça achève, je veux profiter de chaque journée », a-t-il réagi.
Son corps n'est pas toujours aussi souple certains jours, mais il ne craint pas, pour l'instant que sa profession l'empêche de s'amuser avec ses enfants quand il sera plus vieux.
Fleury a plutôt vécu une autre forme de remise en question liée à l'âge. En entamant la saison avec des performances difficiles, il avoue s'être posé la question s'il était rendu trop vieux.
« Parfois. Mais on a souvent remis mon âge en question quand j'ai eu des ennuis donc je dois être capable de composer avec ça », a noté Fleury qui ne se sentait pas plus lent.
« Rien ne marchait et plus ça rentrait, plus je me fâchais. J'étais en maudit, mais c'est difficile d'avoir du succès comme ça. Dans mon cas, c'est important que je m'amuse », a conclu Fleury qui a retrouvé son sourire depuis.
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