Les liens avec Montréal sont nombreux dans la vie de Mike Condon
MONTRÉAL – Grâce à Montréal, Mike Condon est parvenu à sortir de l'ombre des circuits professionnels mineurs en 2015. Quelques années plus tard, deux entraîneurs montréalais ont trouvé une nouvelle voie au jeune retraité pour qu'il épaule un gardien... montréalais à l'Université Northeastern.
« Je ne sais pas ce qui passe avec Montréal, mais les liens avec cette ville reviennent toujours dans ma vie », n'a pu que constater Condon, avec joie au bout du fil.
Aux yeux d'un athlète du Massachusetts, qui a grandi en adorant les Bruins de Boston, ça demeure fascinant. Mais Condon se sent surtout reconnaissant, car il a hérité d'un petit joyau en Devon Levi, ce choix de septième ronde des Panthers de la Floride qui appartient désormais aux Sabres de Buffalo.
Ce gardien québécois de 20 ans ne cesse de surprendre après avoir excellé au Championnat mondial junior en plus d'être sélectionné sur l'équipe canadienne pour les Jeux olympiques de Pékin.
À travers de telles expériences très formatrices, Levi a anéanti ses opposants au niveau universitaire la saison dernière avec une moyenne de buts alloués de 1,54 et une efficacité de ,952 derrière la défense menée par Jordan Harris.
Tout ça s'est déroulé devant les yeux de Condon qui vivait sa première année comme entraîneur des gardiens de ce programme universitaire.
« J'ai pu commencer à donner un coup de main. Je n'avais pas d'autres plans et je voulais découvrir l'autre côté du sport, le coaching. Depuis le début, c'est fort amusant. Que Devon ait remporté le trophée Mike Richter (remis au gardien par excellence de la NCAA), c'est plutôt fou, disons que je suis très chanceux », a humblement commenté l'entraîneur des gardiens de 32 ans. Devon Levi
Pour sa part, Levi se fait un devoir de vanter son apport.
« Il est l'une des grandes raisons pour lesquelles je suis revenu pour une autre année avec Northeastern. Je voulais travailler avec lui, j'ai senti que mon niveau a grimpé d'un cran grâce à Mike. J'ai hâte de voir jusqu'où je pourrai pousser mon jeu à ses côtés », a exposé Levi qui a gentiment insisté pour répondre à nos questions en français.
Pas besoin de gratter bien loin pour comprendre que le professeur et l'élève sont deux gentilshommes. D'ailleurs, Condon a expliqué d'entrée de jeu que c'est un charme de bosser avec Levi.
« Il est très intelligent, il étudie en informatique et il a un esprit analytique qui se transmet au hockey. Mais il est d'abord un jeune très agréable qui sourit toujours et qui se défonce dans ses passions », a noté Condon qui a disputé 129 parties dans la LNH avec le CH, les Penguins et les Sénateurs.
Une transition thérapeutique pour Condon
À 20 ans, le sport représente avant tout une source de plaisir pour Levi. Pour Condon, son parcours sportif a été ponctué de déceptions, de détours, d'immenses joies dans la LNH, mais aussi de souffrances physiques le menant à la retraite en 2020 au début de la trentaine.
Ainsi, ce mandat auprès de Levi s'avère précieux.
« Ça m'aide à demeurer près du hockey et d'un vestiaire. C'est devenu comme une transition thérapeutique. Puisque se retrouver à la retraite à 30 ans, c'est un peu comme une drogue, si tu arrêtes d'un coup, ça peut occasionner des problèmes », a-t-il lancé de manière très réaliste.
Rattrapé par des opérations à la hanche et une malformation au bas du dos, ses performances ont chuté.
« Je n'ai pas été en mesure de recouvrer la santé durant la pandémie, la douleur persistait. Un peu comme Carey (Price) avec son genou, tu peux traiter une partie du corps encore et encore, mais ton corps finira par te faire comprendre que tu as été trop exigeant et ça ne guérira plus comme tu le souhaites, que ça fasse ton affaire ou non », a noté Condon qui a été orienté vers le coaching par Jim Madigan et Brian Daccord.
Aujourd'hui, à titre d'exemple, Condon peine encore à enfiler son bas au pied gauche au lever. Guerrier dans l'âme, il recommencerait tout de même son parcours demain matin, « c'est un prix que je suis prêt à assumer ».
S'impliquer malgré sa liberté financière et sa jeune famille
Cette association avec Levi le revigore. Il faut ajouter que Condon a toujours adoré l'aspect psychologique dans le sport. Il sent donc utile auprès de son protégé.
« Je suis très, très chanceux d'avoir Mike dans mon coin. Il m'aide sur la glace, mais notre relation va beaucoup plus loin que ça. Je pense à nos discussions, juste lui et moi, quand on parle du côté mental », a souligné Levi.
Condon se fait un devoir de partager ses erreurs puisque l'ascension vers la LNH peut dérailler vite pour les gardiens alors que les ouvertures sont rares.
« J'apprécie énormément qu'il s'ouvre autant avec moi, ça me donne le sentiment que je ne suis pas le seul à devoir surmonter des défis. Ça me permet de trouver une manière pour composer avec les émotions, la pression et les batailles mentales à gérer pendant une saison », a témoigné Levi.
Mike CondonSouvent dénigré au fil de son parcours, Condon en a fait mentir plusieurs en atteignant la LNH. Son ardeur au travail l'a ensuite mené à un contrat de rêve pour un jeune qui a grandi avec des parents séparés alors que le budget serré l'obligeait parfois à prendre des douches à l'eau froide.
Après avoir bûché pendant plusieurs années, Condon aurait pu choisir de se la couler douce surtout qu'il est papa d'une petite fille de trois mois.
« Je n'oublie pas qu'il a une famille à la maison et qu'il fait ça bénévolement (les entraîneurs des gardiens ne peuvent pas être rémunérés dans la NCAA). Ça me démontre qu'il se soucie des jeunes, je sais qu'il est vraiment là pour moi », a cerné Levi avec maturité.
Avec son enfance modeste et ses aptitudes qui n'étaient pas exceptionnelles, Condon a rapidement compris que le chemin n'a rien de facile.
« Je suis content d'avoir assimilé à 12 ans, et non à 30 ans comme bien des gens, que tu dois mériter tout ce que tu souhaites dans la vie », a retenu Condon qui est fier de ses accomplissements sportifs.
Sur un ton plus léger, le lien qui unit Condon à Levi et Montréal fait inévitablement penser que le Canadien aura besoin de miser sur un gardien d'avenir. D'autant plus que les fils du directeur général Kent Hughes sont les coéquipiers de Levi à Northeastern.
« C'est une conclusion facile à tirer en sachant que Kent Hughes a vu jouer Devon si souvent, mais je dois dire que les Sabres ont été merveilleux avec Devon, je parle avec leur responsable du développement des gardiens chaque semaine. Ce serait une histoire cool qu'il aboutisse à Montréal, mais Buffalo connaît son potentiel et je ne sais pas ce que Kent serait prêt à payer, ça risque de coûter cher présentement », a conclu Condon avec le sourire dans la voix.