Devon Levi est bien parti pour jouer à la hauteur des attentes
MONTRÉAL – Dans le sport professionnel, lorsqu'un athlète connaît une excellente saison, ses dirigeants le félicitent avec le sous-entendu qu'il devra faire aussi bien, sinon mieux, l'année suivante. Ainsi, Devon Levi a cru bon disputer une autre campagne universitaire pour se préparer à cette réalité.
Car Levi a été fumant en 2021-2022 devant le filet des Huskies de l'Université Northeastern. Mais, même s'il a accompli une saison historique pour un gardien dans la NCAA, Levi se souvient de ce qu'il avait vécu dans le Midget AAA.
« J'ai goûté à ce test quand je jouais pour les Lions du Lac-St-Louis. Ma troisième année a été la plus difficile personnellement, la plus éprouvante. Je vivais le défi mental de reproduire mes bons résultats de la saison précédente et je m'étais imposé beaucoup de pression. Je vois donc l'année actuelle comme une façon de progresser mentalement, c'est l'année parfaite pour y arriver », a cerné Levi avec une belle sagesse pour ses 20 ans.
En cinq sorties, Levi démontre son aplomb avec une moyenne de 1,77 et efficacité de .943 incluant une prestation de 49 arrêts, samedi dernier.
À ses yeux, la clé passe par afficher l'état d'esprit idéal.
« J'essaie de ne pas m'imposer trop de pression que ce soit pour les statistiques ou afin de réussir une saison comme celle de la saison dernière. Je sais que l'année précédente appartient au passé et qu'il n'y a pas de corrélation avec cette année. Je vois l'année avant tout comme une occasion de progresser », a précisé Levi tout en mentionnant que son équipe rêve des grands honneurs de la NCAA.
« On n'a aucune complaisance par rapport à ce qu'on a réussi la saison dernière, on demeure très affamés », a-t-il ajouté.
Cette progression et cet encadrement psychologique reposent entre les mains de Mike Condon, son jeune entraîneur des gardiens de 32 ans. Condon est épaté à tous les points du vue par le gardien montréalais, mais il tenait à le revoir au niveau universitaire.
« Il est encore un jeune homme, un kid, voilà pourquoi j'étais content qu'il décide de revenir, pour qu'il vieillisse un peu avant d'aller jouer avec les hommes », a entamé celui qui a eu à chausser les patins de Carey Price, blessé à un genou, pendant la saison 2015-2016.
« Il n'a pas encore joué une saison complète sans interruption. L'an dernier, pendant environ six semaines, il a été parti et il s'entraînait en Asie avec Équipe Canada en vue des Jeux olympiques. Le hockey demeure un marathon, il faut apprendre à son corps et à sa tête à composer avec les exigences d'une longue saison », a-t-il enchaîné.
Cette leçon, Condon l'a apprise sur le tard et il n'a jamais pu vraiment l'appliquer puisque sa carrière a pris fin à 30 ans.
Mike Condon« Dans mon cas, j'ai fait l'erreur trop souvent de pousser, pousser et pousser. Je finissais par arriver fatigué avant le lancement du match. Il faut trouver le bon équilibre dans les heures de préparation », a admis Condon.
Pendant la saison morte, Condon a pris le temps de bâtir un plan et un protocole pour que son protégé puisse gérer la pression engendrée par ses résultats exceptionnels.
« On se disait, mais pourquoi ne reviens-tu pas jouer une saison complète avec de telles attentes? Je crois que c'est préférable de s'habituer à cela au niveau universitaire. Quand il sera envoyé dans la gueule du loup, il saura qu'il a déjà relevé le défi », a noté Condon qui voit mal Levi tomber dans l'autre piège, celui de la complaisance.
Une prise contre Levi et Condon
Condon et Levi n'ont pas le même profil devant un filet, mais un parallèle intéressant peut se dresser puisqu'ils ne possèdent pas les attributs typiques des gardiens en demande. L'Université Northeastern étant située tout près du Fenway Park, on a envie de dire qu'ils avaient une prise (ou même deux) contre eux.
Combatif et acharné, Condon ne s'est pas taillé une place grâce son talent, mais plutôt à la sueur de son front et la douleur de ses hanches. Quant à Levi, il est très athlétique et brillant devant son filet, mais les dirigeants conservent des doutes étant donné sa « petite » stature de six pieds.
« Il n'a pas eu une carrière facile, il a dû se battre pour tout ce qu'il a obtenu. Ce n'est pas toujours facile mentalement quand tu t'attends à obtenir plus que ce que tu obtiens. On l'a regardé de haut et il a appris beaucoup de leçons qui sont tellement importantes. Il m'aide en m'enseignant ça », a insisté Levi.
« Pour Devon, on parle de sa grandeur alors que, dans mon cas, je n'avais pas été repêché. Tu peux bien tenter de ne pas entendre ce qui se dit à ton sujet, mais on demeure des humains et ça peut finir par t'atteindre », a réagi Condon à ce sujet.
Une thèse sur Juuse Saros ?
Là où Levi peut se démarquer, outre avec son talent, c'est via ses aptitudes d'étudiant. Il est reconnu pour très bien analyser le jeu devant et calculer ses actions pour augmenter ses chances.
Condon s'est donc tourné vers un sujet d'études incontournable, le jeu de Juuse Saros qui excelle dans la LNH à cinq pieds onze pouces.
« Saros, il est sick !, s'enthousiasme Levi. J'adore la statistique selon laquelle que, même s'il est le plus petit gardien, il est celui qui se fait frapper par la rondelle le plus souvent dans la poitrine. Il est toujours fin prêt, il est intelligent, il anticipe les passes, il est très athlétique et il est probablement celui qui suit le mieux la rondelle dans la LNH. Quand tu ralentis des vidéos de lui, tu peux voir que ses yeux sont rivés sur la rondelle », a résumé Levi qui s'inspire, en partie, du répertoire du Finlandais.
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Ce dont Levi raffole également avec Condon, c'est qu'il n'existe pas un fossé générationnel entre lui et son entraîneur. Ses techniques et ses expériences ne datent pas d'une autre époque. Bref, il s'abreuve de son parcours.
« Oh oui et j'aime en savoir plus sur son passage avec le CH. Évidemment, je le regardais jouer pendant cette année. Je vivais encore à Montréal, c'est très cool. Je l'ai vu à la Winter Classic, je me souviens de son arrêt incroyable de la mitaine en deuxième période. Je lui en ai parlé quelques fois », a conclu Levi qui progresse dans la bonne voie pour voler, à son tour, des buts dans la LNH.