Avec le cricket, le CIO veut élargir l'horizon olympique
LAUSANNE, Suisse - Le Comité international olympique (CIO) devrait entériner jeudi l'arrivée du cricket aux JO 2028 de Los Angeles, dans un appel du pied à tout le sous-continent indien qui marque sa volonté de séduire de nouvelles audiences tout en préservant la tradition.
Concrètement, l'instance réunie à Bombay jusqu'à mardi prochain doit valider jusqu'à cinq « sports additionnels » proposés par les organisateurs des Jeux de Los Angeles, des disciplines censées refléter une tradition locale et qui n'ont aucune garantie de revenir aux Jeux suivants.
Mais cette catégorie, qui s'ajoute aux 28 disciplines olympiques établies, mêle en réalité expérimentations éphémères – le karaté aux JO-2020 de Tokyo, le breaking aux JO 2024 de Paris – et premiers pas olympiques de sports amenés à s'inscrire dans la durée.
C'est notamment le cas de l'escalade, du skate et du surf, apparus lors de l'édition japonaise en 2021, reconduits aux JO 2024 de Paris et inclus d'emblée dans le « programme sportif initial » des JO 2028 – à la place de la boxe, de l'haltérophilie et du pentathlon moderne, laissés sur le banc en attendant de jauger leurs réformes.
L'Inde en 2036?
Parmi les disciplines présentées par les organisateurs de Los Angeles figurent le « flag football » – une variante sans plaquage du football américain –, le baseball/softball, le squash, la crosse et enfin le cricket, dont l'ancrage californien est pourtant peu évident.
Car c'est surtout pour le CIO que le retour de ce sport aux Jeux a du sens – après une apparition lors de l'édition parisienne de 1900, le temps pour les Anglais de battre les Français dans un unique match –, compte tenu de son immense popularité dans une des régions les plus imperméables à l'olympisme.
« Les droits TV de LA 2028 sont déjà vendus aux États-Unis, mais pas encore en Inde, où l'arrivée du cricket garantirait de bien meilleures audiences », souligne auprès de l'AFP Jean-Loup Chappelet, spécialiste de l'olympisme à l'Université de Lausanne.
D'autant que l'Inde, qui vient de détrôner la Chine comme pays le plus peuplé au monde, accueille jusqu'au 19 novembre le Mondial de cricket en rassemblant jusqu'à 130 000 personnes dans son arène d'Ahmedabad, une foule à faire rêver même une Coupe du monde de soccer.
Seulement 48e au tableau des médailles des JO 2020, l'Inde est également le seul grand pays avec l'Argentine à n'avoir jamais accueilli les Jeux. Une lacune vouée à être comblée dès 2036, quand la rotation continentale ramènera en Asie la grand-messe olympique après l'édition 2032 déjà attribuée à Brisbane?
Boxe en sursis
Si l'organisation à Delhi des Jeux du Commonwealth en 2010 avait soulevé nombre de critiques – infrastructures, retards, inondations, conditions sanitaires –, « tous les présidents du CIO veulent le plus de candidatures possibles pour les Jeux », surtout dans une période où elles ont tendance à se raréfier, relève Jean-Loup Chappelet.
Mais le cricket ne sera pas le seul enjeu jeudi pour la commission exécutive, qui doit trouver un équilibre entre l'envie de nombreuses fédérations internationales d'être aux Jeux et le souci de maintenir un quota de 10 500 athlètes environ.
L'instance devra notamment trancher le sort de l'haltérophilie, minée par le dopage, du pentathlon moderne, inventé par Pierre de Coubertin, mais discrédité à Tokyo par les accusations de maltraitance animale, et de la boxe, dont la fédération a perdu sa reconnaissance olympique après une cascade de scandales portant sur la gouvernance comme sur l'arbitrage.
L'haltérophilie comme le pentathlon devraient sauver leur place aux Jeux grâce à leurs efforts de réforme – la première en confiant son programme antidopage à l'Agence internationale de contrôle et le second en remplaçant l'épreuve équestre par un parcours d'obstacles contesté par les puristes, mais très spectaculaire.
Quant à la boxe, sport olympique historique et populaire, elle est assurée depuis plusieurs mois d'être à Los Angeles, mais rien ne garantit son avenir ensuite: une jeune instance initiée par la fédération américaine, World Boxing, cherche à gagner des membres et remplacer auprès du CIO la fédération historique, dirigée par un Russe proche du Kremlin.