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RÉSULTATS

Quand les athlètes ne contrôlent pas pleinement leur destinée

Caeli McKay Caeli McKay - Getty
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TABLEAU DES MÉDAILLES | SECTION SPÉCIALE | HORAIRE DE DIFFUSION

La devise olympique traditionnelle disant « plus vite, plus haut, plus fort » n'est plus entièrement valide, alors qu'il faudrait aussi ajouter « le mieux » pour les nombreux sports jugés qui se sont ajoutés au programme des Jeux au fil des ans.

S'il est pratiquement impossible de remettre en cause le chrono inscrit par un nageur, la hauteur de la barre franchie lors d'un saut ou la somme de poids soulevés, chaque personne peut toutefois avoir une opinion différente de l'exécution d'une manœuvre technique ou l'excellence d'une performance artistique.

Les dernières décennies ont été ponctuées de plusieurs scandales impliquant des juges aux Jeux olympiques. Il y a eu les allégations de collusion entre les juges en patinage artistique aux Jeux de Salt Lake City en 2002 et de Sotchi en 2014. La natation artistique a souvent été scrutée à la loupe, notamment à la suite de l'erreur d'une juge en 1992, qui a contraint Sylvie Fréchette à finalement recevoir l'or 16 mois plus tard.

Et même quand il n'est pas question de scandale, les spectateurs – et même certains athlètes – ont l'impression que les jeux sont faits d'avance dans des sports comme la natation artistique et le plongeon.

La Chine vise le balayage des huit médailles d'or en plongeon, après en avoir échappé une seule aux Jeux de Tokyo il y a trois ans. La domination des plongeurs provenant de la Chine est telle que le reste du monde semble se battre pour une place sur le podium lors des compétitions individuelles limitées à deux inscriptions par pays, et à deux places sur le podium lors des épreuves de plongeon synchronisé, où chaque pays compte sur un duo.

« La perception n'est pas entièrement fausse, a reconnu la plongeuse canadienne Caeli McKay lors d'un récent entretien avec La Presse Canadienne. Les Chinois ont atteint un niveau tellement élevé qu'il est difficile de croire que quelqu'un peut les battre. 

«I ls établissent fréquemment des records mondiaux. Ils exécutent leur liste de sauts avec constance », a-t-elle ajouté.

Le plongeur québécois Nathan Zsombor-Murray, qui entamera son parcours olympique à la plate-forme de 10 mètres synchro avec Rylan Wiens lundi, reconnaît que l'exécution des plongeurs chinois est phénoménale. Il a toutefois ajouté que cela pouvait peut-être influencer les juges à leur donner de meilleures notes — même quand ils ratent un peu leur saut.

« Je pense que les attentes de certains juges envers les Chinois affectent leur décision, a-t-il dit. Des fois, je les vois exécuter des plongeons pour lesquels ils reçoivent des 9.5 ou au moins des 9. Mais si je fais la même chose, j'obtiens des 8 ou des 8,5 ou peut-être au mieux un 9. Je trouve que parfois, les juges semblent regarder le plongeur, et non le plongeon. »

Zsombor-Murray s'est toutefois dit heureux du système de pointage actuel en plongeon, où les notes les plus faibles et les plus fortes ne sont pas comprises dans le calcul.

Le natif de Pointe-Claire redoute aussi le jour où des machines serviront à calculer les scores.

« Il y a un aspect artistique au plongeon, a-t-il insisté. Ce serait comme demander à l'intelligence artificielle de juger un œuvre d'art. Il y a un degré de subjectivité, et il est difficile de dire si nous serions capables de remplacer les juges par des machines. »

Afin d'essayer de rendre les résultats moins prévisibles, la natation artistique a aussi modifié son système de pointage au cours des dernières années. Mais pour y arriver, on a tenté de rendre moins subjective l'évaluation de la performance en mettant l'accent sur les éléments techniques.

Il reste toutefois un degré de subjectivité au moment de déterminer si un élément a été réussi ou non.

« Pour moi, c'est un bon pas vers le changement, a dit la nageuse artistique canadienne Audrey Lamothe. Ce n'est pas encore parfait, mais je crois que c'est un bon avantage puisqu'il suffit de bien exécuter son plus haut degré de difficulté pour avoir une bonne position. »

Cependant, les athlètes sont conditionnés à se concentrer sur ce qu'ils contrôlent. La décision d'un juge – quelle soit bonne, mauvaise ou encore le résultat de corruption – est hors du contrôle de l'athlète.

Ceux qui pratiquent des sports jugés doivent encore plus apprendre à tourner la page après une compétition. McKay le sait très bien, elle qui a terminé au pied du podium en compagnie de Meaghan Benfeito aux Jeux de Tokyo à la plate-forme de 10 mètres synchro, à un demi-point de la troisième place.

« C'est si petit comme écart que c'est difficile d'expliquer ce qu'un demi-point représente », a souligné McKay.

« C'est pour ça que je ne porte pas attention à ce que les autres plongeurs font », a-t-elle ajouté.

McKay et les autres athlètes qui évoluent dans des sports jugés espèrent exécuter le mieux possible ce qui est demandé d'eux. Ensuite, ils doivent attendre de voir quelle perception les juges ont eue de leur performance. Le spectateur reste parfois confus, loin de l'extase d'une performance «plus vite, plus loin, plus forte».