Une première médaille en boxe depuis 1996?
La dernière fois que le Canada a remporté une médaille en boxe aux Jeux olympiques, Montréal vibrait encore au rythme du roller-hockey, des Oh Henry! étaient lancées sur le gazon synthétique du Stade olympique chaque fois que Henry Rodriguez frappait un circuit et tout juste après s'être remis de Chabada, les Québécois n'avaient encore aucune idée qu'ils s'apprêtaient à vivre encore pire grâce à Los Lobos et sa Macarena qui pollueraient les ondes.
David Defiagbon et Félix SavónC'était en 1996 et pendant que Donovan Bailey, Bruny Surin, Glenroy Gilbert et Robert Esmie écrivaient l'histoire en infligeant aux Américains leur première défaite au relais 4x100 m et qu'Annie Pelletier s'offrait le bronze après une remontée spectaculaire qui a séduit ses compatriotes, le regretté David Defiagbon montait sur la deuxième marche du podium après avoir mordu la poussière en finale du tournoi des poids lourds contre le légendaire Félix Savón.
Personne ne le savait encore à ce moment-là, mais les Jeux de la XXVIe olympiade ont marqué la fin d'une période particulièrement faste pour la boxe canadienne. Pendant douze ans – des Jeux de Los Angeles en 1984 à ceux d'Atlanta en 1996 – les représentants de l'unifolié ont gagné neuf médailles – dont une d'or. Le pays envoyait également des délégations presque complètes à cette époque : dix athlètes à Los Angeles, Séoul et Barcelone avec un sommet de onze à Atlanta.
À compter du 27 juillet à Paris, ils ne seront que deux – Wyatt Sanford et Tammara Thibeault – à concourir dans l'une des treize catégories – sept chez les hommes et six chez les femmes –, le plus faible contingent depuis les Jeux de Pékin en 2008, alors que seul l'Ontarien Adam Trupish s'était qualifié. Un dénouement malheureusement hautement prévisible, étant donné que les jeunes boxeurs et boxeuses peinent à développer leurs habiletés dans des conditions optimales.
« Quand tu joues au hockey, tu es certain d'avoir des matchs. Quand tu t'inscris à la boxe, tu n'es pas certain d'avoir des combats, a récemment expliqué le coentraîneur de l'équipe nationale Vincent Auclair en entrevue avec RDS.ca. Ça prend quelqu'un de ton poids, de ton niveau... avec un peu de chance, tu vas pouvoir te battre deux fois dans l'année. Pour un jeune, c'est très plate.
« Il faut créer un engouement, une compétition pour que les jeunes restent accrochés au gym de boxe. Le nouveau directeur général Christopher Lindsay (nommé en avril 2023, NDLR) a fait un excellent travail pour relancer les championnats nationaux et un circuit de tournois nationaux. »
Car c'est résolument en augmentant le niveau de compétition à l'interne que le pays redeviendra un acteur significatif sur la scène internationale. Il faut que les championnats canadiens ou encore les qualifications olympiques redeviennent extrêmement difficiles à gagner, opine Auclair.
« Si tu vas en Ouzbékistan, qui a qualifié 11 boxeurs pour les Jeux [de Paris], il y a environ 400 boxeurs dans les championnats juvéniles qui regroupent des boxeurs âgés de 14 et 15 ans. Ici, il y en a peut-être 50, continue celui qui est diplômé en intervention sportive. Le bassin de jeunes athlètes avec qui les dirigeants de l'équipe nationale travaillent est plus volumineux que le nôtre.
« Après ça nous permettrait d'avoir une meilleure matière de départ pour identifier et sélectionner les boxeurs et boxeuses et les convertir en qualifications pour les Jeux olympiques. »
Ironiquement, c'est au moment que le Canada est au plus bas que l'une de ses meilleures chances de médaille en près de 30 ans survient. Invaincue depuis son élimination en quart de finale du tournoi des poids moyens des Jeux de Tokyo tenus en 2021, Thibeault – championne du monde en titre et médaillée d'or aux derniers Jeux panaméricains – sera l'une des favorites à Paris. Battu dès son premier combat à Tokyo, Sanford en sera également à ses deuxièmes Jeux.
« Les Jeux olympiques, l'expérience du village, le niveau de boxe... ils savent ce que c'est, conclut Auclair. Je suis convaincu que cette première expérience va les aider. Depuis leur participation aux Jeux de Tokyo, ils se sont entraînés avec cette image-là et ce niveau de compétition en tête. »
Montréal a peut-être perdu ses clubs de roller-hockey et de baseball et la télévision québécoise ne présente même plus de talk-shows de fin de soirée, mais il y a encore des chansons ringardes qui jouent à la radio et des boxeurs qui rêvent de remporter des médailles aux Jeux olympiques!